marți, 23 februarie 2021

Andrei Koncealovski ( n. 20 aug.1937-)

 

Andreï Konchalovsky: 

ni dissident, ni partisan, ni courtisan: conversations avec Michel Ciment

Actes Sud

Dès son premier film, Le premier maître, en 1965, Andreï Konchalovski impose son souci d'indépendance. Appartenant à la génération du cinéma russe des années 1960, il travaille avec Tarkovski sur Andreï Roublev, puis réalise Sibériade en 1979. Aux Etats-Unis, il tournera Maria's lovers et Runaway train. En 2019, il réalise un film sur Michel-Ange. ©Electre 2019



Andreï MIKHALKOV-KONTCHALOVSKI

cinéaste soviétique (Moscou 1937).

Petit-neveu du peintre Vassili Sourikov, neveu du peintre Piotr Kontchalovski, fils des écrivains Serguei Mikhalkov et Natalia Kontchalovskaia, frère aîné de Nikita Mikhalkov. Diplômé du conservatoire de Moscou (1952) puis du VGIK en 1965 (classe de Mikháil Romm), il réalise en cours d'études un court métrage, l'Enfant et le Pigeon (Malčik i golub, 1962), joli conte (un gamin échange un album de timbres contre un pigeon, auquel il rend la liberté) couronné d'un Lion de bronze au Festival des films pour enfants à Venise. Simultanément, il commence une activité de scénariste qu'il poursuivra tout au long de sa carrière, en particulier pour son camarade d'études Tarkovski (le Rouleau compresseur et le Violon [1961], Andreï Roublev [id.]) et pour des réalisateurs d'Asie centrale : Abbasov ( Tachkent, ville du pain, 1968), Aïmanov (la Fin de l'ataman, 1970), Okeev (le Féroce, 1973).

C'est en Kirghizie qu'il tourne son premier long métrage, le Premier Maître (Pervyj učitel ', 1965), d'après un récit de l'écrivain kirghiz Tchinguiz Aïtmatov qui évoque les difficultés rencontrées par un jeune soldat de l'Armée rouge devenu instituteur à une époque (1923) où le pouvoir soviétique a du mal à s'affirmer dans la société locale encore dominée par le féodalisme : par son approche antihéroïque et antidogmatique de l'histoire, par son écriture marquée par le réalisme le plus pur et cependant le plus concerté, cet admirable film constitue la véritable naissance de la Nouvelle Vague soviétique.

Avec son film suivant, le Bonheur d'Assia (Asino sčast'e,1967), il poursuit dans la même veine de rigoureux réalisme en racontant les aventures sentimentales d'une kolkhozienne boiteuse que se disputent deux hommes mais qui refuse de se marier : cet étonnant film est d'une vérité psychologique et sociale percutante ; mais, jugé trop cru et trop sombre par les autorités, il ne sera que peu diffusé en URSS et pas du tout à l'étranger. Après ce contretemps, le cinéaste se tourne vers des thèmes classiques empruntés à Tourgueniev (le Nid de gentilshommes [Dvorjanskoe gnezdo], 1969) et à Tchekhov (Oncle Vania [Djadja Vanja], 1971) : dans un tout autre registre que précédemment (il met en œuvre la séduction romanesque et la somptuosité des couleurs), il y fait preuve de la même maîtrise technique et de la même pénétration psychologique tout en prouvant, par ces deux « exercices de style », qu'il est capable de traiter tous les sujets.

La Romance des amoureux (Romans o vljublennyh,1974) procure une relative déception : sur le thème de la solitude d'un jeune soldat arraché à la vie normale et à l'amour, le film semble réintroduire le cliché du « héros positif » tout en cédant aux séduisantes facilités d'une love story soviétique. Quant à Sibériade (Siberjada,1978), superproduction épico-didactique sur l'histoire de la Sibérie depuis le début du siècle, elle manifeste un souffle dramatique et une beauté plastique méritoires mais trouve ses limites dans un certain conformisme idéologique. À partir de 1984, il a commencé aux États-Unis une seconde carrière avec un beau film inspiré d'un récit de Platonov, Maria's Lovers (1985), suivi par des productions plus commerciales : Runaway Train (1985), Duo pour une soliste (Duet for One, 1986), le Bayou(Shy People, 1987), Tango et Cash (Tango and Cash,1989), Voyageurs sans permis (Homer and Eddie, id.), le Cercle des intimes (The Inner Circle, 1992). De retour en Russie, il revient dans le village où il avait tourné le Bonheur d'Assia et signe une comédie sur les mystères de l'âme slave avec l'actrice Inna Tchourikova: Riaba, ma poule (Kuročka, Rjaba, 1994) avant de signer, aux États-Unis The Odyssey (1997). ▲


Andreï Kontchalovski

né en 1937

25 films  1

De son vrai nom, Andrei Sergeyevich Mikhalkov, il nait le 20 Aout 1937 à Moscou dans une famille d'intellectuels et d'artistes (son père Sergueï est écrivain). Il prendra comme pseudonyme le nom de son grand-père maternel (le peintre Piotr Kontchalovski) pour ne pas être confondu avec son frère, le cinéaste Nikita Mikhalkov. Son nom se transcrit souvent Andrey Konchalovsky, à l'anglo-saxonne, du fait de sa carrière hollywoodienne.

Se destinant à une carrière de pianiste, il étudie dix ans durant au Conservatoire de Moscou. Sa rencontre en 1960 avec Andreï Tarkovski, avec qui il co-écrit plusieurs scénarios (Le rouleau compresseur et le violonL'enfance d'IvanAndreï Roublev), l'oriente vers le cinéma.

Son premier long-métrage, Le premier maître (1965) reçoit un accueil favorable en U.R.S.S. où il est projeté dans de nombreux festivals internationaux. Son deuxième film, Le bonheur d'Assia (1967), est censuré par les autorités soviétiques, car la peinture trop réaliste de la misère paysanne ne correspond pas à la vision officielle des kolkhozes. Ressorti en salles vingt-ans plus tard, le film sera considéré comme son chef-d'œuvre.

Cinéaste prolifique, Kontchalovski se tourne alors vers l'adaptation de classiques russes, Tourgueniev et Tchekhov, avant de réaliser l'épique Sibériade qui remporte le grand prix du jury au Festival de Cannes de 1979, rendant possible son exil aux États-Unis en 1980.

Ses réalisations hollywoodiennes les plus populaires sont Runaway Train (1985) - sur un scénario original de Kurosawa - et Tango et Cash (1989) avec Sylvester Stallone et Kurt Russell.

Kontchalovski retourne s'établir en Russie dans les années 1990, bien qu'il continue de produire des films historiques pour la télévision américaine, L'Odyssée (1997), Le Lion en hiver (2003).

En Russie, il tourne Le cercle des intimes (1991) qui met en scène le projectionniste de Staline et pose la question de la collusion avec le totalitarisme, puis Riaba ma poule (1994) où l'on retrouve les personnages du Bonheur d'Assia dans la Russie post-soviétique. La Maison de fous (2002), décrivant la vie d'un asile psychiatrique en Tchétchénie, lui vaut le Lion d'Argent au festival de Venise.

Filmographie

1965Le premier maître 

(Pervyy uchitel). Avec : Bolot Beyshenaliyev (Diouchen), Natalya Arinbasarova (Altynai), Darkul Kuyukova (Koltinai). 1h42.

1923. L'arrivée de Diouchen, jeune soldat de l'Armée rouge, envoyé par le Komsomol à l'aoul de Koksaï en Kirghizie, provoque un attroupement. Le jeune homme se présente et explique sa mission : éduquer et apprendre à lire. La masse ignorante toise cet être étrange, puis, stupéfaite par ses propos, exprime son étonnement, se moque de lui et le plante, sur place, seul avec sa mission...

  
1966Le bonheur d'Assia 

Avec : Ia Savvina (Assia Kliatchina), Alexandre Sourine (Sacha), Ivan Petrov (Stepan). 1h39.

Assia, une jeune kolkhozienne est amoureuse du chauffeur dont elle attend un enfant. Mais, cette passion est mal partagée. Elle s'obstine, malgré les avances d'un autre prétendant, puis décide, lucidement et courageusement, d'élever seule son enfant.

  
1969Dvoryanskoe gnezdo
  
  
1971Oncle Vania
 L'histoire se passe dans une demeure de campagne dans une province profonde russe. La vie y est ennuyeuse et paraît ne pas avoir de sens pour les protagonistes qui souffrent et s'étiolent de ne pas avoir pu réaliser leurs rêves. Oncle Vania est un homme cultivé qui est attiré par Éléna venue avec son mari plus âgé et fat, et pourtant la pesanteur des choses retombe sur chacun d'entre eux...
  
1974Romans o vlyublyonnykh
  
  
1979Sibériade 
(Sibiriada). Avec : Nikita Mikhalkov (Alexi Oustoujanine), Nathalia Andreïtchenko (Anastasia Solomine), Serguéi Shakourov (Spiridon Solomine), Vitali Solomine (Nikolaï Oustoujanine). 4h45.

Au début du siècle, dans le petit village sibérien d'Elan accroché aux berges d'un fleuve, deux familles rivales se font face et s'affrontent, les riches Solomine et les Oustoujanine, pauvres, rebelles et idéalistes. L'histoire en marche va bouleverser la vie de la communauté. Le petit Nikolaï, fils d'Afanassi le chasseur, le rêveur, est en butte aux vexations de la petite Nastasia Solomine. Mais les années passent, qui apportent le bruit confus de la révolution, et Nikolaï montre un peu trop aux Solomine son espoir de voir les choses changer. Il finira par être roué de coups et chassé du village ; Nastasia, qui l'aime, le rejoint...

  
1984Maria's lovers

Avec : Nastassja Kinski (Maria Bosic), John Savage (Ivan Bibic), Robert Mitchum (M. Bibic), Keith Carradine (Clarence Butts), Anita Morris (Mme Wynic). 1h44.

1946. Ivan, prisonnier de guerre des japonais, regagne sa ville natale afin d'épouser celle qu'il a toujours aimé, Maria. Courtisée par un capitaine, la jeune femme accepte quand même de se marier avec lui. Peu après, Ivan s'apercoit qu'il ne désire plus sa femme. Il la quitte et Maria se donne au capitaine qui lui fait un enfant...

  
1985Runaway train 

Avec : Jon Voight (Oscar 'Manny' Manheim), Eric Roberts (Buck), Rebecca de Mornay (Sara), John P. Ryan (Renken). 1h50.

Mornay, l'un des detenus les plus dangereux du penitencier de Stronehaven, en Alaska, est l'ennemi jure du gardien chef Ranken. Par -50 degres, il reussit a s'evader par les egouts. Roken le retrouve dans un train sans frein roulant a toute vitesse. Ils se livreront un duel sans merci

  
1986Duo pour une soliste
 

(Duet for one) avec : Julie Andrews (Stephanie Anderson), Alan Bates (David Cornwallis), Max von Sydow (Dr. Louis Feldman), Rupert Everett (Constantine Kassanis), Margaret Courtenay (Sonia Randvich). 1h47.

Une violoncelliste virtuose est frappée en pleine gloire par la sclérose en plaques.

  
1987Le bayou
 

(Shy people). Avec : Jill Clayburgh (Diana Sullivan), Barbara Hershey (Ruth), Martha Plimpton (Grace), Merritt Butrick (Mike), John Philbin (Tommy). 1h53.

Vivant à New York, les rapports de Diane avec sa fille comme dans son travail de journaliste deviennent trop stressante pour elle. Pour repartir sur de bonnes bases, elle décide de quitter la ville électrique et d'aller habiter chez une cousine dans le bayou de la Louisiane...

  
1989Voyageurs sans permis

(Homer & Eddie). Avec : James Belushi (Homer Lanza), Whoopi Goldberg (Eddie Cervi), John Waters (les voleurs), Robert Glaudini (les voleurs), James Thiel (les jumeaux). 1h42.

Un homme attardé se fait aider d'une femme sociologue pour se réconcilier avec son père mourant qui l'a désavoué quelques années auparavant.

  
1989Tango et Cash

(Tango & Cash). Avec : Sylvester Stallone (Raymond 'Ray' Tango), Kurt Russell (Gabriel 'Gabe' Cash), Teri Hatcher (Katherine 'Kiki' Tango), Jack Palance (Yves Perret), Brion James (Courier/Requin). 1h44.

Deux flics que tout sépare, aussi bien le look que les méthodes, vont être amenés à collaborer pour lutter contre la bande du gangster Yves Perret, qui s'est juré de les faire tomber ensemble...

  
1991Le cercle des intimes

(The inner circle). Avec : Tom Hulce (Ivan Sanshin), Lolita Davidovich (Anastasia), Bob Hoskins (Beria), Aleksandr Zbruyev (Staline), Feodor Chaliapin Jr. (Professeur Bartnev). 2h17.

L'histoire véridique de Ivan Sanchin, officier du KGB et projectionniste privé de Staline de 1939 jusqu'à la mort du dictateur...

  
1994Riaba ma poule

(Kurochka Ryaba). Avec : Inna Tchourikova (Assia), Viktor Mikhajlov (Vasili Nikitich (sous le nom V. Mikhajlov)), Aleksandr Surin (Stepan), Gennadi Yegorychyov (Tchikounov), Gennadi Nazarov (Seryozha). 1h57.

Il était une fois, dans un petit village ayant résisté aux changements de la Perestroïka une de ses habitantes, Assia, qui vivait seule avec sa poule, Riaba. La vente des œufs lui permet de distiller elle-même de l'eau de vie, qu'apprécie fort Stepan, le père de son fils unique Serioga. Celui-ci est parti tenter sa chance en ville et Stepan, depuis longtemps rejeté par Assia, vit aux crochets d'une tzigane. Le village serait bien tranquille si Tchikounov, propriétaire d'une belle exploitation, représentant du système capitaliste, n'empêchait ses habitants de dormir par l'utilisation nocturne d'une bruyante scie électrique. Les fréquentes demandes en mariage de Tchikounov n'intéressent pas Assia, et devant l'échec des protestations de l'ensemble du kolkoze et de son président, Assia décide de mettre le feu à la scierie...

  
1995Lumière et compagnie

 
  
1997L'odyssée

(The odyssey). Téléfilm avec : Armand Assante (Ulysse), Greta Scacchi (Penelope), Isabella Rossellini (Athena), Bernadette Peters (Circe), Eric Roberts (Eurymachus). 2h53.

L'odyssée retrace le parcours fantastique d'Ulysse, héros de la guerre de Troie, qui après avoir défié les dieux, déchaîne la colère de Poséidon.Celui ci condamne Ulysse à errer sur les flots pour l'éternité, l'empêchant de regagner son royaume d'Ithaque. Une malédiction qui va modifier l'itinéraire d'Ylysse l'entrainant dans un voyage peuplé d'embûches : des cyclopes aux monstres Charybde et Scylla en passant par sa fascinante descente aux enfers.

  
2002La maison de fous

(Dom durakov). Avec : Yuliya Vysotskaya (Janna (Zhanna en VO)), Sultan Islamov (Ahmed), Stanislav Varkki (Ali), Vladas Bagdonas (Le médecin), Yevgeni Mironov (L'Officier). 1h44.

En 1996, dans un hôpital psychiatrique situé en Ingouchie, près de la frontière avec la Tchétchénie, les patients se trouvent livrés à eux-mêmes lors de la guerre. Tous les soirs, Janna et les autres malades regardent un train passer, féérique et illuminé. Cette jeune femme se rêve à bord de ce train avec le "fiancé" qu'elle s'est imaginé, le chanteur canadien Bryan Adams. Un soir, le train ne passe pas et le lendemain, c'est le chaos. Le directeur de l'hôpital a disparu. Des combattants tchétchènes débarquent, puis les Russes contre-attaquent... Dans cette folie meurtrière, Janna est la seule à apporter un peu de douceur et de joie lorsqu'elle joue de l'accordéon.

  
2003Un lion en hiver

(The lion in winter). Téléfilm avec : Patrick Stewart (le Roi Henry II), Glenn Close (Eleanor d'Aquitaine), John Light (Geoffrey), Rafe Spall (John), Yuliya Vysotskaya (Alais). 2h33

Le Roi Henry II garde sa femme Eleanor enfermée dans ses tours.

  
2007Dans le noir

Segment de Chacun son cinéma
  
2007Gloss

(Glyanets). Avec : Yuliya Vysotskaya (Galya), Irina Rozanova (Alina), Aleksei Serebryakov (Stasis), Aleksandr Domogarov (Kilmenko), Yefim Shifrin (Valyushkin). 1h57.

Galya, une jeune provinciale, arrive à Moscou avec le rêve de toutes les jeunes filles russes : faire la couverture des magazines et partager la vie d'un millionnaire. Mais, en Russie, tout rêve a un prix...

  
2009Casse-Noisette

(The Nutcracker in 3D). Avec : Elle Fanning (Mary), Nathan Lane (Oncle Albert), John Turturro (le Roi rat), Frances de la Tour (La Reine rat / Frau Eva), Richard E. Grant (le père). 1h50

La veille de Noël, Mary reçoit un soldat de bois qui prend vie et l'entraîne dans une voyage extraordinaire, où les jouets sont animés et une armée de rats s'apprête à attaquer les humains...

  
2014Les nuits blanches du facteur

(Belye nochi pochtalyona Alekseya Tryapitsyna). Avec : Aleksey Tryapitsyn (Lyokha), Irina Ermolova (Irina), Timur Bondarenko (Timur). 1h30

Dans un village russe, où la seule façon de rejoindre le continent est de traverser le lac en bateau, un facteur est devenu le seul lien avec le monde extérieur. Il n'y a ni services gouvernementaux ni services sociaux ni emplois. La femme qu'aime le facteur s'installe en ville et lorsque le hors-bord du facteur est voléle facteur prend la décision de partir pour la ville...

  
2014Battle for Ukraine

(Bitva za Ukrainu) Documentaire coréalisé avec Evgeniy Grigorev et Ekaterina Vesheva.

comment l’Ukraine, ancienne partie de l’empire soviétique lutte pour échapper à l'emprise de la Russie et pour ne pas devenir l'un des satellites américains. Cette étude approfondie convoque nombreux historiens, politiciens et journalistes ukrainiens, russes et américains, l'ancien président polonais, Aleksander Kwasniewski, l'ancien président slovaque, Rudolf Schuster, l'ancien président géorgien, Eduard Shevardnadze, Kofi Annan, secrétaire général des Nations Unies, l'ancien Premier ministre de Russie, Viktor Chernomyrdin, et l'homme d'affaires Boris Berezovsky.

  
2016Paradis

(Ray). Avec : Yuliya Vysotskaya (Olga), Christian Clauß (Helmut), Philippe Duquesne (Jules), Peter Kurth (Krause). 2h10.

Olga est une aristocrate russe qui a émigré en France. Quand la guerre éclate, elle rejoint la Résistance. Jules, bon père de famille français, est fonctionnaire de police. Lui choisit de collaborer avec le régime nazi. Helmut, fils de la noblesse allemande, exalté par l’idéal d’une société de « surhommes », devient officier SS dans un camp de concentration. Trois destins croisés, trois âmes qui devront répondre de leurs actes devant Dieu pour entrer ou non dans son Paradis...

  
2019Michel-Ange

(Il Peccato). Avec : Alberto Testone (Michel-Ange), Jakob Diehl (Peppe), Francesco Gaudiello (Pietro), Federico Vann (Sansovino), Glen Blackhall (Raphaël), Orso Maria Guerrini (Marquis Malaspina), Anita Pititto (Marquise Malaspina), Antonio Gargiulo (François-Marie della Rovere). 2h16.

Michel Ange à travers les moments d’angoisse et d’extase de son génie créatif, tandis que deux familles nobles rivales se disputent sa loyauté.

  
2020Chers camarades

(Dorogie tovarishchi). Avec : Yuliya Vysotskaya (Lyuda), Vladislav Komarov (Loginov), Andrey Gusev (Viktor), Yuliya Burova (Svetka), Sergei Erlish (Le père de Lyuda), Alexander Maskelyne (Professeur Ovodov). 1h56.

Le pouvoir de l'Union soviétique battu en brèche par une manifestation de travailleurs à Novotcherkassk en 1962.


Andreï Konchalovsky : conversations avec Michel Ciment (2019)

Alors que MICHEL-ANGE (Il Peccato, 2019) s’apprête à sortir sur les écrans français avec quelques mois de retard, crise sanitaire oblige, Andreï Kontchalovski annonce à ses admirateurs, via sa page Facebook, que son nouveau film, CHERS CAMARADES ! (Дорогие товарищи!), inspiré du massacre de Novotcherkassk en 1962, sortira à l’automne 2020 en Russie. À 82 ans, le cinéaste énigmatique ne semble pas prêt de prendre sa retraite. Profitant des clémences météorologiques de l’été, je me suis plongé dans sa riche carrière grâce à la passionnante lecture de Ni dissident, ni partisan, ni courtisan. Conversations avec Michel Ciment.

Un livre rare, qu’il ne faut pas cesser de recommander. Comme toujours, les éditions Institut Lumière / Actes Sud présentent un exceptionnel ouvrage d’entretiens, réalisés par l’un des grands noms de la cinéphilie française, Michel Ciment, infatigable missionnaire des beautés du 7ème art à travers le monde. Le critique de Positif est aussi l’un des rares français à connaître parfaitement la filmographie d’Andreï Kontchalovski, cinéaste d’envergure internationale mais relativement méconnu dans notre pays, à l’exception (peut-être) de ses films américains ou de ses premiers longs métrages, habiles critiques du régime soviétique. Ce livre couvre toute sa carrière, de ses débuts aux côtés d’Andreï Tarkovski (1960) jusqu’à son film consacré à Michel-Ange (2019), en passant par les origines artistiques de toute la famille Mikhalkov ou ses relations complexes avec un père et un frère très engagés politiquement. On appréciera d’emblée de se souvenir que le réalisateur parle couramment français (il fut marié à une française dans les années 1970) et que ces entretiens, réalisés en grande partie à Moscou, n’ont pas nécessité de traduction.

En introduction ou en complément du livre, il est encore possible d’écouter une émission de France Culture consacrée entièrement à la carrière du cinéaste, à l’occasion de la sortie du livre : « K comme Andreï Konchalovsky, l’inclassable » (Antoine Guillot, Plan Large, 2019) avec Michel Ciment, Eugénie Zvonkine et N. T. Binh en invités passionnés et érudits.

Réalisateur prolifique, Andreï Kontchalovski (orthographié Konchalovsky par les anglophones) est aussi un incorrigible rhéteur, au moins de papier, toujours prêt à digresser sur sa vision du monde, la musique, la poésie, ses échecs artistiques, les femmes de sa vie (les plus venimeux et/ou lucides lui trouveront les accents vantards de Jean-Pierre Mocky, par moments), la peinture et le cinéma. Il n’est pas rare qu’une question très courte obtienne deux pages complètes d’une réponse extrêmement détaillée, fourmillant d’anecdotes. Ainsi du récit de tournage de TANGO ET CASH (1989) par exemple, son dernier film américain, naufrage artistique, financier et humain dont il énumère, avec humour, presque jour par jour, toutes les mésaventures.

Michel Ciment a structuré son livre en 5 chapitres chronologiques : « Une affaire de famille », « Filmer en Union Soviétique (1965-1979) », « L’expérience hollywoodienne (1980-1990) », « Retour en Russie (1990-2012) » et « Un nouveau langage (2013-2018) ». À ces entretiens s’ajoutent également quelques textes de l’auteur, publiés dans Positif ou à d’autres occasions, une filmographie complète et une vingtaine de photographies rares, essentiellement des souvenirs de tournages.

Note : Toutes les citations sont extraites du livre.

  • Les inspirations, les maîtres

Inscrit au conservatoire de musique par sa mère, Andreï Kontchalovski raconte ses expériences aux côtés d’autres élèves aux noms devenus prestigieux, Vladimir Ashkenazy ou Edouard Artemiev – si prestigieux qu’il ne se sentait pas à la hauteur de leur talent. De divertissement hebdomadaire, le cinéma devient alors pour le jeune homme une ambition professionnelle : « Un jour, j’ai vu QUAND PASSENT LES CIGOGNES, c’était en 1957. Ça m’a bouleversé et a complètement changé mon itinéraire de vie. J’ai compris que je pouvais faire ça, et même mieux que Kalatozov » (p. 25).

Dans les années 1940, dans les salles de cinéma soviétiques, les rares films étrangers autorisés sortent tous en noir et blanc, y compris le BAMBI (1942) de Walt Disney. Grâce aux relations de son père, il fréquente avec assiduité la Maison du Cinéma, réservée aux professionnels, où l’on peut admirer des dizaines de films américains, asiatiques ou européens, normalement censurés. Entre LES FANTASTIQUES ANNÉES 20 (The Roaring Twenties, Raoul Walsh, 1939) et les films de Claude Lelouch, Andreï Kontchalovski s’abreuve du néo-réalisme italien (Visconti, Fellini, Antonioni) et se trouve des maîtres : Akira Kurosawa, Ingmar Bergman, Luis Buñuel et même le réalisateur français Albert Lamorisse, un peu oublié aujourd’hui : « Il était pour nous un génie : CRIN-BLANC (1953), et bien sûr LE BALLON ROUGE (1956). C’est sous cette influence que Tarkovski a fait son premier film, dont j’ai écrit le scénario. » (p. 29).

De tous les cinéastes qu’il peut citer dans les entretiens, Federico Fellini et Akira Kurosawa sont ceux qui reviennent le plus souvent. Pour les deux Andreï, Tarkovski et Kontchalovski, LES SEPT SAMOURAÏS (1954) est, au moment de leurs études cinématographiques au VGIK de Moscou, la référence ultime : « On regardait ce film tout le temps, on l’a vu au moins dix fois. » (p. 29). Le cinéaste répète à l’envi que son PREMIER MAÎTRE (1965) est entièrement écrit et tourné sous l’influence du réalisateur japonais – ce que Michel Ciment tempère avec une fine analyse des longues séquences contemplatives de ce premier film. Plus loin dans les interviews, Kontchalovski revient avec émotion sur sa rencontre avec le maître, au moment du tournage américain de RUNAWAY TRAIN (1985) : « Pour moi, c’était comme me rendre à La Mecque. […] On a bu de la « Stolichnaya ». Il ne faisait pas semblant et moi non plus. Tous deux, nous sommes devenus ivres. […] Il m’a dit alors qu’il adorait Lénine, que c’était un grand homme. Moi, ivre, qui avais décidé de ne pas retourner vivre en Russie, je lui répondis qu’il avait tort parce que Lénine était un monstre. […] Il y eut un grand silence et tout le monde pâlit. » (p. 102-103)

  • L’amitié, la collaboration et la rupture avec Tarkovski

Le cinéaste évoque tout au long du livre ses relations particulières avec Andreï Tarkovski, qu’il rencontra au VGIK et avec lequel il élabora plusieurs scénarios, et résume leur méthode de travail initiale : « Lui faisait du brouillard, moi de la logique, et je faisais quelque chose de logique à partir de son brouillard. Je le lui donnais et il en faisait à nouveau du brouillard, et ainsi de suite. C’est intéressant ! » (p. 30)

Amis de l’école de cinéma, les deux hommes travaillent ensemble au film de fin d’études de Tarkovski (LE ROULEAU COMPRESSEUR ET LE VIOLON, 1961), puis sur les scénarios de L’ENFANCE D’IVAN (1962) et ANDREI ROUBLEV (1969), conscients de l’importance de l’esthétique (inspirée des cinéastes européens) et de la mise en scène, premiers impacts visuels sur le spectateur. Élèves du vétéran Mikhaïl Romm, Tarkovski et Kontchalovski refusent pourtant de s’inscrire à la suite de la vieille génération : « Moi et Tarkovski, on refusait Eisenstein : on pensait que c’était très formaliste, que le montage n’allait pas. On n’aimait pas son style. » (p. 28). Éblouis par la Nouvelle Vague, les comiques du muet américain (Chaplin, Keaton) et le CITIZEN KANE (1941) d’Orson Welles, les apprentis cinéastes boudent le « traditionalisme » de Bondartchouk et le « réalisme socialiste » de Tchoukhraï.

Dans les pages suivantes, Kontchalovski raconte, avec beaucoup de drôlerie, comment il a déchiré au hasard des pages du scénario d’ANDREI ROUBLEV, pour éviter que le film ne dépasse les 40 heures : « On a retiré soixante-dix pages, peut-être, puis on a commencé à lire. C’était très intéressant, sans ces pages ! C’est ça, le secret du film, car en fait il n’y a pas vraiment de continuité. » (p. 34)

Les années, la distance géographique et de profondes divergences artistiques finissent par éloigner les deux amis. À la fin des années 1970, Andreï Kontchalovski est chargé de transmettre un message des autorités soviétiques à Tarkovski, le sommant de rentrer au pays. Paranoïaque, le réalisateur exilé en France croit que son ancien ami est devenu un agent des services secrets : « Je crois qu’il a vraiment cru – il était névrotique – que j’étais un agent du KGB. » (p. 93)

  • L’expérience américaine

Fort du succès cannois de SIBÉRIADE (1979), Andreï Kontchalovski réalise son rêve de travailler à l’étranger. En France, ses espoirs de réaliser un film en noir et blanc dans l’esprit de la Nouvelle Vague s’évaporent rapidement car Simone Signoret et Daniel Toscan du Plantier le voient, eux aussi, comme un agent du KGB : « Pour lui, il était impossible pour un Soviétique de ne pas être un dissident, ce que je n’étais pas. […] C’est pourquoi je suis parti en Amérique. » (p. 91)

Inconnu des producteurs, désarçonné par la façon de travailler des majors hollywoodiennes, le cinéaste soviétique raconte à Michel Ciment ses premiers mois à Los Angeles : « D’abord, j’ai fait du trafic de caviar. Le caviar à Moscou coûtait disons 100 dollars le kilo. En Amérique il coûtait 3000 dollars le kilo. Alors pour moi, avec une ou deux boîtes de deux kilos, je me faisais 6000 dollars, et avec cet argent je pouvais vivre quatre mois avec un train de vie sympathique en vivant très modestement. » (p. 95). Andreï Kontchalovski réalise par la suite six films à Hollywood, dont deux premiers qui lui offrent une nouvelle réputation et le succès auprès du public (MARIA’S LOVERS en 1984 et RUNAWAY TRAIN en 1985, adapté d’une histoire d’Akira Kurosawa). Trop épris de liberté créatrice, une pratique difficile à concilier avec les producteurs américains des années 1980, le cinéaste termine cette période sur un naufrage absolu, TANGO ET CASH (1989), dont il abandonne le tournage avant son terme.

  • Histoires de famille

La figure de Nikita Mikhalkov, le jeune frère d’Andreï Kontchalovski, revient régulièrement dans les entretiens : « La différence d’âge faisait qu’il était difficile de jouer ensemble. Quand il avait cinq ans, j’en avais treize, et comme c’est souvent le cas, le frère cadet était un peu l’esclave de son aîné. » (p. 81). Reconnaissant volontiers son attitude désinvolte envers un plus jeune frère, auquel il demandait d’aller chercher des cafés lorsqu’il écrivait avec Tarkovski, le cinéaste évoque ensuite ses relations tourmentées avec ce cadet devenu lui-même un acteur et réalisateur à succès.

« Nos rapports sont très émotionnels et ma trajectoire est différente de la sienne, davantage guidée par les mouvements historiques et politiques. […] À la fin des années 1980, lorsque Gorbatchev prit la tête du pouvoir, Nikita nourrissait déjà des ambitions politiques. Elles se firent plus aiguës en particulier lorsque dans les cercles d’oligarques naquit l’idée qu’il pouvait peut-être devenir le président qu’il fallait pour la Russie. […] Il a une perception du monde très sensible, ce en quoi c’est un homme authentiquement russe, chrétien, d’obédience orthodoxe. […] Ce qui m’est propre, c’est le doute, en un certain sens, le sens infini de la vie, ainsi que la recherche de Dieu. » (p. 83-84)

  • Morceaux choisis

– Sur son style : « Pour moi, l’art du cinéma et de la dramaturgie est d’essayer d’être le plus elliptique possible. L’ellipse est un art, mais un art difficile. […] Bien sûr, aujourd’hui, il y a deux tendances dans le cinéma mondial. La première est d’en faire une sorte de produit, comme McDonald’s, et qui n’a aucune tolérance pour les ellipses. […] La seconde tendance est celle qui tente de développer le langage. » (p. 73)

– Sur le cinéma contemporain : « La plupart des films américains d’aujourd’hui proposent des images sans imagination : tout ce qu’il y a à voir est montré. Chez Bresson ou Bergman, c’est plus brut. Dans leur cinéma, les personnages peuvent sortir du champ. Dans le cinéma américain, jamais ! » (p. 55)

– Sur la Russie : « Les Russes n’ont pas de bourgeoisie. Donc pas de classe moyenne, pas de société citoyenne. Nous sommes très proches de l’Afrique avec une énorme population, un petit pourcentage de citoyens et un fossé entre le reste de la population et le pouvoir, car il n’y a personne qui la contrôle. C’est pourquoi il n’y a pas de démocratie en Russie. La population ne se tourne ni à gauche ni à droite, mais vers le ciel. » (p. 109)

  • Un cinéaste inclassable

Ni dissident, car Kontchalovski ne renia jamais la société soviétique, malgré un regard critique et deux premiers films persifleurs. Ni partisan, car il ne fut jamais au service de la propagande d’Etat. Ni courtisan … trop occupé à ses recherches esthétiques, il foula aux pieds les avances parfois juteuses de gros producteurs américains, préférant réaliser des films d’auteur sans succès.

Kontchalovski est un amoureux de la France, de son cinéma, de sa langue, de ses femmes. Le caractère très éclectique de sa filmographie, partagée entre des films engagés, des fresques lyriques, des métaphores comiques déstabilisantes (RIABA MA POULE, 1994) et de nouveaux horizons sans comédiens professionnels, a peut-être découragé nombre de distributeurs. Un dernier paradoxe peut nous faire sourire : cinéaste occidental et ami de Tarkovski, Andreï Kontchalovski ne bénéficie d’aucun coffret sérieux retraçant sa carrière en DVD … à la différence de son frère, Nikita Mikhalkov, pourtant régulièrement étrillé par la presse française pour ses prises de position ou ses relations avec le Kremlin.

Le livre de Michel Ciment constitue, d’autant plus, un très précieux témoignage de cette longue carrière internationale. « Chaque film me fait comprendre davantage l’immensité et la diversité des possibilités qu’offrent ce métier et combien le monde du cinéma devient de plus en plus problématique. Et on comprend que la vie entière n’y suffira pas. » (p. 231)

https://perestroikino.fr/2020/07/28/andrei-konchalovsky-conversations-michel-ciment/

Fiche personnelle 

https://www.kinoglaz.fr/index.php?page=fiche_personne&num=146&lang=fr

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Andreï Konchalovsky : une biographie complète et inédite du réalisateur russe

Le réalisateur russe Andreï Konchalovsky est connu pour son travail avec Tarkovski et son frère Nikita Mikhalkov. Sa carrière à Hollywood est aussi marquante, alors que son pays était encore soviétique.

Andreï Konchalovsky a passé une partie de sa vie à Hollywood.

Enfance et jeunesse d’Andreï Konchalovsky

Le cercle familial des Mikhalkov

Andreï Sergueïevitch Mikhalkov est né le 20 août 1937 à Moscou. Son père est le célèbre écrivain et poète soviétique Sergueï Mikhalkov, qui a notamment écrit l’hymne national. Andreï prend rapidement le nom de famille de sa mère, la traductrice Natalia Konchalovsky. Officiellement, son nom est toujours Mikhalkov aux yeux des autorités jusqu’en 2009.

Andreï Konchalovsky passe la majeure partie de son enfance dans le manoir familial, à Nikolina Gora. Son frère est le très célèbre réalisateur russe Nikita Mikhalkov. Andreï suit des cours de piano à l’École centrale de musique de Moscou, avec un certain Tchernov. Son but est alors de devenir pianiste professionnel.

Les premiers amis : Kapoustine et Tarkovski

Il entre au Conservatoire de Moscou et suit les cours d’Aurelian Rubbach. Parmi ses camarades, il compte le talentueux Nikolaï Kapoustine. Une franche amitié nait avec celui-ci et Andreï Konchalovsky invite Kapoustine à venir écouter le jazz et Voice of America dans la demeure des Mikhalkov. Andreï obtient son diplôme en 1957. Son second enseignant est le pianiste Lev Oborin.

La vie d’Andreï Konchalovsky bascule lorsqu’il entre au VGIK, l’institut national de la cinématographie. Cet établissement, en pleine renaissance sous l’inspiration du grand Mikhaïl Romm, forme une flopée de jeunes pousses. C’est ici que Konchalovsky rencontre en 1960 Andreï Tarkovski, un artiste plein d’idées.

Les débuts de Konchalovsky au cinéma

Coscénariste avec Andreï Tarkovski

Andreï Konchalovsky et Andreï Tarkovski ont collaboré sur trois films.

Andreï Konchalovsky se lie rapidement d’amitié avec Tarkovski et les deux étudiants co-écrivent les scénarios de trois films : Le rouleur compresseur et le violonL’enfance d’Ivan et Andreï Roublev. Cela convainc le jeune homme de quitter le clavier du piano pour la caméra.

Il signe son premier long-métrage en 1964 : Le premier maître, un film où l’on ressent l’influence d’Akira Kurosawa sur le jeune artiste. Inspiré d’un roman de Tchinghiz Aïtmatov, le film met à l’honneur la ballerine Natalia Arinbassarova, qui deviendra la femme de Konchalovsky.

Entre succès et censure (1964-1967)

Le premier maître reçoit un bel accueil en Union soviétique et plusieurs festivals internationaux le projettent à l’écran. Une belle entrée en matière pour Konchalovsky, qui décide de travailler sur un deuxième projet, Le bonheur d’Assia en 1967. Entre temps, sa femme Natalia accouche de son premier fils, Yegor. Le couple divorce quelques mois plus tard.

Ce deuxième film est censuré par les autorités car il dépeint de manière trop réaliste l’extrême pauvreté de la paysannerie russe, loin de la vision idéalisée des kolkhozes. Lorsqu’il sort, vingt ans plus tard, Le bonheur d’Assia est considéré comme le chef d’œuvre d’Andreï Konchalovsky.

Nous n’avons pas de société civile, parce que nous n’avons pas d’opinion publique et parce que la majorité des citoyens n’ont aucune volonté d’influencer les actions des autorités.

Andreï Konchalovsky

Le premier âge d’or d’Andreï Konchalovsky

Les classiques russes revisités

Andreï Konchalovsky a souvent rendu hommage à Tchekhov dans sa carrière, tout comme son frère.

En 1969, Konchalovsky se tourne vers la littérature classique russe, et notamment Tourguéniev. Il signe en effet une adaptation de Nid de gentilhomme, un roman du grand écrivain russe. En 1970, il transpose sur le grand écran Oncle Vania de Tchekhov, ce qui lui vaut une Coquille d’or au festival international de Saint-Sébastien. Il s’agit de son premier succès véritable à l’étranger.

A lover’s romance (1974) et la fresque Sibériade (1979)

Marié à Viviane Gaudet, Andreï Konchalovsky a une fille en 1971 : Alexandra. Ce troisième mariage dure jusqu’en 1980. Andreï Konchalovsky revient en 1974 avec un film qui l’installe durablement dans le paysage cinématographique russe : A lover’s romance. Il est récompensé par le grand prix du festival de Karlovy Vary, en République tchèque. Ce film lui confère une reconnaissance dans de nombreux pays.

En 1979, le réalisateur produit une grande fresque historique pour plaire à son pays, Sibériade. Il s’agit d’une grande œuvre en quatre volets qui montre l’évolution sur plusieurs générations de deux familles, les Solomine et les Oustioujine. Sibériade reçoit le prix spécial du jury au festival de Cannes et attire la sympathie du public russe.

Andreï Konchalovsky aux États-Unis

Runaway Train et l’influence de Kurosawa

Fort de son dernier succès, Andreï Konchalovsky obtient l’autorisation de quitter le pays pour rejoindre les États-Unis. Il se rend à Hollywood en 1980, où il réalise plusieurs films. Son premier film américain, Runaway Train (1985), est basé sur un scénario d’Akira Kurosawa, une manière de rendre hommage à celui qui l’a tant influencé.

Le réalisateur russe ne demeure pas reclus en Amérique, il voyage aussi en Europe. En 1987, on le voit mettre en scène La Mouette de Tchekhov au théâtre de l’Odéon. Il est aussi aux commandes de deux opéras joués à la Scala de Milan : Eugène Onéguine et La dame de pique.

Tango et Cash avec Sylvester Stallone

Konchalovsky fait ensuite un second film, Tango et Cash, avec les stars Sylvester Stallone et Kurt Russell. Ce blockbuster est loin d’être du grand cinéma, mais il permet à Konchalovsky de s’implanter dans le paysage hollywoodien. Finalement, le Russe est trop désabusé par son séjour américain et retourne dans son pays natal en 1990.

La Russie a encore une culture générale très faible. Un Russe avec cette culture et beaucoup d’argent devient destructeur de lui-même et de son environnement.

Andreï Konchalovsky

Période de doutes pour Konchalovsky (1990)

Manque de créativité et Odyssée

Les années 1990 ne sont pas les meilleures pour Andreï Konchalovsky, qui ne réalise que deux films, qui ne rencontrent pas de succès : Le cercle des intimes et Riaba ma poule. Il s’est séparé de sa quatrième femme, Irina Ivanova. Sa créativité artistique semble atteinte.

Il reçoit une commande de la télévision américaine, une mini-série historique sur L’Odyssée, qui s’avère plutôt réussie. La série est très appréciée dans de nombreux pays, devenant le produit télévisé le plus cher du marché pendant un petit moment. Konchalovsky reçoit un Emmy pour cette série.

La renaissance de Konchalovsky avec Ioulia Vyssotskaïa

Cinq longues années vont passer entre 1997 et 2002 avant que Konchalovsky ne revienne à la manœuvre. Cette période de disette est sans doute due au passage à vide qui a suivi le voyage américain, ainsi que son quatrième divorce d’avec Irina Ivanova, avec qui le réalisateur avait eu deux filles.

Mais désormais Andreï Konchalovsky est marié avec la jeune actrice biélorusse Ioulia Vyssotskaïa, qu’il a rencontrée au festival du film de Sotchi. Celle-ci tient les premiers rôles dans les films qui vont suivre : La maison de fous (2002) et Gloss (2007). Le premier de ces deux films narre la vie dans un asile psychiatrique de Tchétchénie. Il a été récompensé par le grand prix du jury à la Mostra de Venise.

Un centre de production et deux Lions d’argent

C’est donc le début de la renaissance pour Andreï Konchalovsky. Il fonde le « centre de production Andreï Konchalovsky » en 2005 pour alimenter en films les grilles de programme de la télévision russe. La chaîne indépendante NTV, par exemple, travaille avec ce centre de production. Sa femme présente l’émission Mangez à la maison !, produite par Konchalovsky.

En 2010, il accepte une commande pour un film de Noël en 3D, Casse-Noisette, inspiré du conte d’Hoffmann et du ballet de Tchaïkovski. En 2014, il est de retour avec un véritable film d’auteur, Les nuits blanches du facteur. Ce long-métrage lui vaut un Lion d’argent, toujours à la Mostra de Venise. Ce prix lui revient deux ans plus tard pour un nouveau film, Paradis.

Je pense que les Oscars sont comme MacDonald’s à présent, c’est une multinationale. Et sa qualité est très discutable.

Andreï Konchalovsky

La nouvelle vie d’Andreï Konchalovsky

Homme de théâtre et homme de médailles

Andreï Konchalovsky avec son frère Nikita Mikhalkov et le président russe Vladimir Poutine.

Andreï Konchalovsky n’a jamais couru après les prix, mais il remarque un certain dédain américain pour le cinéma russe. Selon lui, les Oscars ne suivent qu’une logique purement commerciale. Comme il l’avait fait dans les années 1980, Andreï Konchalovsky reste très près du théâtre et des planches. Il met en scène de nombreux pièces en Russie et à l’étranger, à l’ombre des médias.

Dans les années 2000 et 2010, Konchalovsky reçoit de très nombreuses médailles et récompenses. Pour ne pas toutes les citer, notons qu’il est distingué de la Légion d’honneur française depuis 2010. Toujours plus éloigné des affaires politiques que son frère Nikita Mikhalkov, Andreï Konchalovsky ne veut pas dominer le cinéma russe et a des divergences avec sa famille.

L’homme russe n’a aucun sens de l’individualité, ce qui veut dire une sens des responsabilités. Puisqu’il n’a aucun sens des responsabilités, une seule discussion est possible avec lui : un coup de bâton sur la tête et il s’accroupit.

Andreï Konchalovsky

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Andrei Konchalovsky
Andrei Konchalovsky © ASC Distribution
Masterclass
  •  17 JUIN 2015 À 19:30

La Master class d'Andrei Konchalovsky

animée par Pascal Mérigeau, critique à L'Obs

  

S’il s’inscrit dans la grande tradition du cinéma russe, Andrei Sergueevitch Mikhalkov aurait tout aussi bien pu devenir musicien. Se destinant en effet à la carrière de pianiste, il suit pendant dix ans les cours du Conservatoire de Moscou, jusqu’à sa rencontre avec Andreï Tarkovski, pour lequel il écrit plusieurs scénarios, notamment L’Enfance d’Ivan et Andreï Roublev. Prenant le nom de son grand-père maternel, le peintre Piotr Konchalovski, le frère aîné de Nikita Mikhalkov, qui deviendra cinéaste lui aussi, réalise en 1965 Le Premier Maître, qui relate les débuts d’un jeune instituteur envoyé en 1923 dans un village de Kirghizie. Le film est célébré par les autorités soviétiques, ce qui permet sa découverte en Occident, mais ces mêmes autorités interdisent Le Bonheur d’Assia, magnifique tableau de la vie paysanne russe, qui demeurera inédit jusqu’en 1988.

Après notamment une adaptation de Tourgueniev (Nid de gentilshommes, 1969) et une autre de Tchekhov (Oncle Vania, 1970), Sibériade, vaste fresque évoquant la guerre que se livrent deux familles dans la Sibérie des premiers temps de la Révolution, obtient le Prix Spécial du Jury à Cannes en 1979. La distinction offre à Konchalovsky de partir pour les États-Unis, où il réalise plusieurs films, parmi lesquels Maria’s Lovers, avec Nastassja Kinski, et Runaway Train. Il retrouve l’histoire de l’Union soviétique avec Le Cercle des intimes (1991), portrait du projectionniste particulier de Staline, avec Tom Hulce (Mozart dans Amadeus) et Bob Hoskins dans le rôle de Beria.

De retour dans son pays, il revient à ses premières amours de cinéaste : Riaba, ma poule (1994) est la continuation du Bonheur d’Assia ; La Maison de fous (2002) se situe dans un hôpital psychiatrique près de la frontière avec la Tchétchénie, dont les malades sont livrés à eux-mêmes par les médecins lorsque la guerre de 1995 éclate ; Les Nuits blanches du facteur, dans les salles françaises le 15 juillet, associe fiction et documentaire avec une virtuosité constante.

La trajectoire d’Andrei Konchalovsky est celle d’un cinéaste surdoué, qui a su passer d’un registre à un autre, d’une super-production avec vedettes à un film bricolé en toute modestie, de la Sibérie à Hollywood et retour, sans jamais rien perdre de sa maîtrise et de sa singularité. Son œuvre est une des plus passionnantes et originales du cinéma des cinquante dernières années.
Pascal Mérigeau

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PARADISE

Kontchalovski, le cinéaste russe quelque peu oublié, n’est autre que le frère cadet d’un certain Nikita Mikhalkov - dont il abandonna le nom pour s’en différencier. Après avoir croisé la route d’Andrei Tarkovski, avec lequel il se lia à l’école de cinéma VGIK, Kontchalovski réalise d’abord de nombreuses adaptations de classiques russes, de Tourgueniev à Tchekhov - auxquels participa parfois Tarkovski à l’écriture. Mais grâce au Grand prix spécial du jury décroché au Festival de Cannes 1979 avec Siberiade, fresque retraçant la vie de villageois sibériens, le cinéaste débute une carrière aux États-Unis. C’est là qu’il passera du drame (Maria Lovers, 1984) au film d’action typé série B (Tango & Cash, 1989) en passant par le cinéma d’action (Runaway Train, 1985). Ce qui ne l’empêchera pas de tourner plus tard des films sur la Russie contemporaine, à l’instar de Le Cercle des intimes (1991) et autres La Maisons des fous (Grand prix du jury à Venise en 2002). Brouillant ainsi incessamment les pistes, Kontchalovski perpétue aujourd’hui son énigme.

Son film présenté en lice pour le Lion d’or cette année s’intitule Paradise, et achève de tourner la page de ses années américaines, que certains comparent injustement à une traversée du désert. Paradise raconte l’horreur de la guerre, retrace le destin de résistants russes face à la barbarie nazie à travers les histoires de trois personnages. Ou comment un jeune intellectuel spécialiste de Tchekhov se transforme inexorablement en monstre défenseur du "paradis" germanique. Exit les mécanismes de mise en scène et place à un noir et blanc sobre tout entier pensé pour poser des questions morales et philosophiques. À noter que le réalisateur avait déjà remporté le Lion d’argent du meilleur réalisateur en 2014 pour son film Les Nuits blanches du facteur.





Dragi tovarasi / 2020 / Andrei Koncealovski


Alexandr Soljenitin, AHIPELAGUL GULAG, Ed. Univers, 1998, vol III, cap. 3 Legea in zilele noastre, sectiunea Revolta din Novocerkassk, 1-2 iunie 1962. p. 397-406 


Chers camarades! (film)

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Chers camarades!
Chers camarades! .Jpg
Affiche de film
russeДорогие товарищи!
Réalisé parAndrei Konchalovsky
Produit parAndrei Konchalovsky
Olesya Gidrat
Alisher Usmanov
Scénario de
  • Andrei Konchalovsky
  • Elena Kiseleva
En vedette
CinématographieAndrey Naydenov
Édité par
  • Sergei Taraskin
  • Karolina Maciejewska
Société de
production
Studios Andrei Konchalovsky
Date de sortie
  • 7 septembre 2020 Venise )
Temps d'exécution
120 minutes
De campagneRussie
Languerusse

Chers camarades! ( Dorogie tovarishchi) est un film russe réalisé par Andreï Kontchalovski, sorti en 2020.Le film remporte le prix spécial du jury à la Mostra de Venise 2020.

Distribution

  • Julia Vysotskaya comme Lyudmila 'Lyuda' Syomina
  • Sergei Erlish comme père de Lyuda
  • Yuliya Burova comme Svetka, la fille de Lyuda
  • Vladislav Komarov comme Loginov
  • Andrey Gusev comme Viktor

Accueil 

L'agrégateur de critiques Rotten Tomatoes attribue au film un taux d'approbation de 96% basé sur 47 critiques, avec une note moyenne de 8,1 / 10. Le consensus des critiques du site web mène à la conclusion suivante: « Chers camarades jette un regard  perçant sur un chapitre sombre de l'histoire soviétique, rendu encore plus efficace par la fureur froide de son directeur.  Selon Metacritic, qui a échantillonné 14 critiques et calculé un score moyen pondéré de 82 sur 100, le film a reçu " une reconnaissance universelle". 

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SYNOPSIS ET DÉTAILS

Dans une ville de province au sud de l’URSS en 1962 et s’inspire des événements de Novotcherkassk où, suite à un mouvement social, 26 personnes ont été tuées et 87 blessées. Lyudmila, dévouée au Parti Communiste et vétéran idéaliste de la Seconde Guerre mondiale, est un fléau pour tout ce qu’elle perçoit comme sentiment antisoviétique. Avec d’autres officiels locaux du Parti, elle est surprise par une grève dans une usine locale, à laquelle sa propre fille prend part. Alors que la situation devient vite hors de contrôle, Lyudmila commence à chercher désespérément sa fille, face aux couvre-feu, arrestations de masse et tentatives brutales des autorités pour dissimuler la violence étatique. Sa foi envers le Parti est alors ébranlée.
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DEAR COMRADES! (DOROGIE TOVARISHCHI!)

Andrei Konchalovsky

Russie, 2020 / 121 min / / Drame, Histoire

En 1962, en URSS, une grève d’ouvriers tourne en massacre lors de l’intervention de l’armée rouge.

URSS, Novotcherkassk, 1962. Lyudmila est membre du Parti communiste local. Elle est une fervente défenseuse du régime et des idéaux communistes et méprise toute forme de dissidence. Lors d'une grève du travail dans l'usine locale de moteurs électriques, elle est témoin de la fusillade des manifestants par l'armée rouge envoyée par le gouvernement pour réprimer la grève. La manifestation paisible tourne au massacre. L’événement changera à jamais la vision du monde de Lyudmila. Parallèlement, sa fille disparaît.et Lyudmila commence alors une périlleuse recherche malgré le blocus de la ville, les arrestations et la tentative de camouflage par les autorités.

« J’ai voulu faire un film sur la génération de mes parents qui a combattu et survécu à la Seconde Guerre mondiale avec la conviction qu'il était honorable de mourir ‘pour la patrie, pour Staline’, guidée par une confiance inconditionnelle dans les objectifs du communisme. J’ai voulu reconstruire avec la plus grande précision les événements qui se sont réellement produits, ainsi qu’une époque dans laquelle l'histoire a révélé le fossé infranchissable entre les idéaux communistes et la tragique réalité des faits. Ce film est un hommage à la pureté de cette génération, à ses sacrifices et à la tragédie qu'elle a vécue en voyant ses mythes s'effondrer et ses idéaux trahis. » Note d’intention du réalisateur Andrei Konchalovsky

RÉCOMPENSES

Best Director, Golden Eagle Awards, 2021 (Russia)

Best Director, Chicago International Film Festival, 2020 (USA)

Special Jury Prize, Venice Film Festival, 2020 (Italy)

NBR Award – Best Foreign Language Film, National Board of Review, 2021 (USA)

BIOGRAPHIE DU RÉALISATEUR

Né en 1937 à Moscou, issu d'une famille d'artistes, Andrei Konchalovsky se destine d'abord à la musique avant d'intégrer la célèbre école cinématographique VGIK où il étudie la réalisation sous Mikhail Romm. Son premier long-métrage, Le Premier maître (1965), lui attire la bienveillance du pouvoir soviétique et est sélectionné en compétition à Venise. Mais son deuxième film, Le Bonheur d'Assia n'échappe pas à la censure en 1966 et ne sort qu’en 1988. Depuis lors, ses films, ses productions télévisées et ses spectacles de théâtre ont été primés aux festivals de Venise, de Cannes et de Saint-Sébastien. Dans les années 1980, Andrei Konchalovsky émigre aux Etats-Unis où il s'essaye à des genres variés et réalise, entre autres Tango & Cash (1989). Il revient dans son pays natal à la fin de la guerre froide avec des films sur la Russie contemporaine. En 2014, il remporte le Lion d’argent à Venise pour The Postman's White Nights. Dear Comrades! (2020) a été présenté à Venise où il a remporté le prix spécial du Jury.

                                                  Andreï Kontchalovski en 2018

FILMOGRAPHIE récente

2020 – Dorogie tovarishchi!

2020 – Homo Sperans (documentaire)

2019 – Sin

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duminică, 21 februarie 2021

Cinema sous le IIIe reich

  

Cinéma sous le Troisième Reich

Adolf Hitler et Joseph Goebbels visitent les studios de la UFA, en 1935.

La période du cinéma sous le Troisième Reich est l'histoire du cinéma allemand entre 1933 et 1945. Ce cinéma est marqué d'abord par une "aryanisation" radicale, c'est-à-dire l'éloignement des artistes juifs, ainsi que par l'étatisation progressive des structures artistiques et par des orientations politiques marquées. Il fait suite à la période plus diversifiée artistiquement parlant du cinéma sous la République de Weimar, que d'aucuns ont qualifiée d'« âge d'or du cinéma allemand ». Néanmoins, contrairement à une idée répandue, les films de propagande ne représentent qu'une infime partie des métrages réalisés sous le régime nazi. Joseph Goebbels, ministre de la Propagande et de l'Éducation du peuple, qui a sous sa tutelle l'industrie cinématographique allemande, la mène certes d'une main de fer, notamment en imposant ses choix dans diverses scénarios ou pour un acteur ou une actrice en particulier. Mais il a compris, dès 1933, que le public se désintéresse des films marqués idéologiquement. Ainsi, les films réalisés sous le Troisième Reich ne seront pas des odes au régime, mais la plupart du temps des divertissements ou des films historiques, parfois et discrètement marqués d'anglophobie et d'antisémitisme. Par ailleurs, la mise au pas du cinéma allemand a affaibli son potentiel de modernité « internationale ». L’histoire du cinéma n’a pas vraiment retenue les noms des réalisateurs des films tournés sous Goebbels en dehors de Leni RiefenstahlVeit Harlan ou Pabst qui restent aujourd'hui encore auréolés de prestige.

Les thèmes traités dans les films changent au gré de la situation géopolitique de l'Allemagne. Ainsi, Le Juif Süss, réalisé par Veit Harlan en 1940 obtient un grand succès et est considéré comme emblématique de l'incursion nazie et antisémite dans le cinéma allemand. Réalisé en 1944, Kolberg, en s'inspirant d'un évènement historique des guerres napoléoniennes, vise à redonner espoir et combativité au peuple alors que la Seconde Guerre mondiale est quasiment perdue pour l'Allemagne. Entre 1933 et 1945, le cinéma allemand est le deuxième cinéma du monde quant au nombre de films produits, qui sont diffusés progressivement dans toute l'Europe occupée. Il bénéficie de nombreuses avancées technologiques et artistiques, notamment par le travail de cadrage et d'ambiance de Leni Riefenstahl (usage du travelling, de caméras sur rails et de caméras sous-marines) ou l'invention du cinéma en couleur avec Agfacolor, dont le film La Belle Diplomate est le premier à utiliser la technique.

Cinema nazi+Leni Riefenstahl

  https://adevarul.ro/stil-de-viata/magazin/documentarul-care-face-lumina-despre-cum-a-reusit-2439067.html


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RÉSUMÉ
Danseuse, actrice fétiche des films de montagne, cinéaste révolutionnaire, photographe remarquable, plongeuse hors pair, Leni Riefenstahl (1902-2003) est, aux yeux du monde, la cinéaste qui s'est fourvoyée en se mettant au service du nazisme. En 1932, sa rencontre avec Adolf Hitler change son destin. C'est un coup de foudre réciproque. Dès son accession au pouvoir, elle accepte la direction artistique du film du Congrès du Parti nazi à Nuremberg en 1934, Le Triomphe de la volonté, l'archétype du film de propagande. Puis elle réalise en 1936 le film officiel des Jeux olympiques, Les Dieux du stade, qui devient un succès mondial. Après la guerre, échappant à la dénazification, Leni Riefenstahl est souvent détestée. Néanmoins, son héritage est immense et les plus grands cinéastes, de Steven Spielberg à George Lucas, reconnaissent aujourd'hui son influence. Seuls l'art et l'esthétique ont compté pour elle, et c'est bien ce reproche qui encombre sa mémoire et obscurcit sa postérité. Sans l'aduler ni la condamner, Jérôme Bimbenet perce le mystère de la « douce amie du Führer » qui n'a jamais connu la moindre once de remords, de compassion, de culpabilité ou de conscience politique. Jusqu'à la fin, quand on l'interrogera sur sa responsabilité, elle ne cessera de répondre : « Où est ma faute ? »

Jérôme BIMBENET

Historien du cinéma, Jérôme Bimbenet est l'auteur de Quand la cinéaste d'Hitler fascinait la France (2006) et Film et histoire(2007).

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Notes de lecture
Cinéma, théâtre, télévision

Jérôme Bimbenet, Quand la cinéaste d’Hitler fascinait la France, Leni Riefenstahl

Paris, Lavauzelle, coll. Histoire, mémoire et patrimoine, 2006, 312p.
Vincent Lowy
p. 362-365
Référence(s) :

Jérôme Bimbenet, Quand la cinéaste d’Hitler fascinait la France, Leni Riefenstahl. Paris, Lavauzelle, coll. Histoire, mémoire et patrimoine, 2006, 312 p.

Texte intégral

1À la fin du mois de mars 2007, l’actrice américaine Mia Farrow, ambassadrice de l’unicef, se disait scandalisée que le cinéaste Steven Spielberg soit rémunéré par la Chine en tant que consultant, en vue de préparer les Jeux Olympiques de 2008 (Éditorial du Wall Street journal 28/03/07). Faisant référence à la fois à l’implication de Pékin dans les crimes génocidaires perpétrés par le régime soudanais au Darfour et à l’activisme de Steven Spielberg en faveur de la mémoire de la déportation et de la destruction de Juifs d’Europe, l’actrice brandissait la comparaison la plus dégradante à ses yeux pour stigmatiser les compromissions du cinéaste : « Does Mr. Spielberg really want to go down in history as the Leni Riefenstahl of the Beijing Games ? » [M. Spielberg veut-il vraiment rester dans l’histoire comme le Leni Riefenstahl des jeux de Pékin ?]. Il n’a pas fallu attendre une semaine pour que le réalisateur incriminé envoie une lettre au sujet du Darfour au leader chinois Hu Jintao.

2Le constat est sans appel : le nom de Leni Riefenstahl reste indissolublement lié aux heures sombres de l’Allemagne et garde son odeur de soufre. Pourtant, alors que les années passent, son œuvre pourrait légitimement être redécouverte, réévaluée à la lumière de nouvelles contributions critiques ou de recherche. Mais c’est l’inverse qui se produit : après un semblant de réhabilitation dans les années 90, elle redevient abusivement l’icône du national-socialisme à l’heure de la médiatisation de masse, scénographe de la gloire nazie et par extension muse d’Adolf Hitler Un travail de dépoussiérage s’impose donc, dans une nécessaire remise en perspective des mécanismes du f Im documentaire et de la propagande d’État à l’âge des totalitarismes. Contribution d’importance à ce travail de redécouverte d’une œuvre complexe, la recherche de Jérôme Bimbenet sur Leni Riefenstahl passionnera d’abord ceux qui s’intéressent au cinéma produit sous le IIIe Reich. On y trouve une somme considérable d’informations nouvelles que le chercheur ne pouvait jusqu’ici découvrir ni dans les propres ouvrages de la cinéaste (ses mémoires controversés et ses albums de photographie, les plus fameux portant sur les Noubas), ni dans les quelques analyses esthétiques ou historiques que son travail avait jusque là suscitées.

3Pourtant, Jérôme Bimbenet ne parvient pas vraiment à situer le registre de son travail. Dès les premières lignes, l’auteur proteste : Quand la cinéaste d’Hitler fascinait la France n’est pas une biographie de Leni Riefenstahl, mais une étude de la réception de ses films en France. L’auteur y épouse malgré tout le déroulement chronologique d’une carrière pleine de péripéties, d’une vie rocambolesque. Sans doute ce qui distingue cet ouvrage est qu’il s’appuie sur des analyses de film approfondies, des études de la presse de l’époque, des éléments d’analyse d’image et de lecture de f Im. Il en résulte un travail un peu hétéroclite, mais qui donne une bonne occasion de revenirsur la trajectoire unique de la cinéaste à travers le filtre de l’accueil que ses f Ims ont reçu en France.

4Leni Riefenstahl naît en 1902 dans la bourgeoisie berlinoise. Après des débuts de danseuse, dans le sillage de Max Rheinardt notamment, elle se tourne vers le cinéma au milieu des années 20, à la suite d’une blessure. Ses premières réussites en tant qu’actrice sont à mettre à l’actif du spécialiste des films de montagne de l’époque, Arnold Franck Der heilige Berg (La montagne sacrée) est la grande œuvre de cette époque (1926) et conduit Leni Riefenstahl, désormais prototype de l’Allemande élancée et sportive, sur les plateaux du grand cinéaste Georg W. Pabst. En 1929, Die weisse Hölle vom Piz Palü (Prisonniers de la montagne) est le deuxième échelon de cette marche triomphante vers les hautes cimes du cinéma germanique. Alors qu’elle enchaîne Tempêtes sur le Mont Blanc et autres Ivresse blanche avec Arnold Franck, Georg W. Pabst pousse l’actrice à passer derrière la caméra. En 1932, son premier film Das blaue Licht (La lumière bleue) ne retient l’attention que de quelques cinéphiles, parmi lesquels on compte Adolf Hitler. Leni Riefenstahl découvre quant à elle son futur commanditaire dans un meeting du Sportpalast en 1932. C’est l’enthousiasme : « À l’instant où il prit la parole, je me trouvais submergée de façon ahurissante par une vision quasi-apocalyptique qui ne me quitterait plus : j’eus l’impression très physique que la terre s’entrouvrait devant moi comme une orange fendue par son milieu et jaillirait un jet d’eau immense, si puissant et si violent qu’il attendrait le sommet du ciel et que la terre en serait secouée dans ses fondements » (p. 26).

5Dès lors, son parcours est inséparable de celui qui, en 1933, devient Führer de l’Allemagne et la propulse pour longtemps au purgatoire des cinéastes maudits. Dès l’avènement du nouveau Reich, Leni Riefenstahl devient une figure de proue du régime, malgré l’inimitié persistante que lui voue le docteur Goebbels, Gauleiter de Berlin et chef de la propagande nationale-socialiste, inimitié que la cinéaste met sur le compte du dépit amoureux. Cinéaste officielle en chef la réalisatrice bénéficie également de l’épuration des studios impulsée par le nouveau pouvoir : le départ des cinéastes, des producteurs et des techniciens majeurs de Weimar pour la France ou les États-Unis laisse l’industrie du cinéma allemand en jachère : les « Unes » de la presse spécialisée sont disponibles pour de nouvelles têtes d’affiche.

6Finalement, Leni Riefenstahl signe peu de films à la gloire du national-socialisme : Der Sieg des Glaubens en 1933, Tag der Freiheit et Triumph des Willens en 1935, Festliches Nürnberg en 1937 et Olympia en 1938. Ce n’est pas grand-chose, comparé à la production documentaire de masse de la propagande nazie. Mais Leni Riefenstahl a d’emblée fait le choix de la qualité au détriment de la quantité. Les premiers films sont des esquisses, certes décisives, mais la grande œuvre reste celle de 1938, superproduction diffusée en France sous le titre resté fameux Les dieux du stade. Jérôme Bimbenet relate tout ce qu’il faut savoir sur la genèse de ces différents films, sur les pratiques techniques, professionnelles et relationnelles de la cinéaste, qui invente littéralement un nouveau vocabulaire filmique, dédié à la gloire du régime nazi. L’auteur montre avec clarté comment ces films constituent également une matrice pour l’ensemble des films de propagande à venir : le cinéma américain des années 1942-1946 s’est largement inspiré d’un corpus d’images fourni parles équipes de Leni Riefenstahl. Au-delà, des films plus récents de science-fiction ou d’anticipation s’en réclament également. La réalisatrice a indubitablement inventé une nouvelle forme de regard sur la société et marqué l’histoire des formes au XXe siècle. Jérôme Bimbenet offre une vue imprenable sur cette carrière, conduite au culot par une pionnière sans équivalent dans les cinématographies du monde libre (on chercherait en vain une femme réalisatrice de prestige en France, en Angleterre ou à Hollywood dans les années 30).

7La fin de carrière est également intéressante. Par sa longévité, d’abord : une rallonge d’une cinquantaine d’années, pendant laquelle la grande dame visite la planète caméra au poing, à la recherche du beau intégral, qu’elle trouve tantôt sous les océans, tantôt parmi les peuplades primitives. Intéressante également parce que dans cette interminable fin de parcours (elle décède en 2003, à l’âge de 101 ans), la cinéaste s’épargne toute forme d’autocritique ou besoin de justification, contrairement à un Veit Harlan, tourmenté jusqu’au bout par ses démons. Il faut dire que Leni Riefenstahl n’a jamais fait de film antisémite et a pris quelques distances avec les hiérarques nazis à partir de 1937 (même si sa relation privilégiée avec Albert Speer a duré jusqu’à la fin des années 60). Seul impair aux yeux des victimes des crimes nazis : l’emploi certainement forcé de figurants tziganes, « empruntés » au camp de concentration de Maxglan dans son film Tiefland (grand projet commencé en Espagne en 1934, tourné pendant les années de guerre avec l’aide de Georg Wilhelm Pabst et achevé au début des années 50 grâce à Henri Langlois). La cinéaste a longtemps nié avoir compris d’où venaient ces figurants et où ils allaient (ils ont vraisemblablement été gazés à Birkenau), jusqu’à ce que des témoignages tardifs l’incriminent directement. Cette polémique entamée au début des années 50 la poursuivra jusqu’en 2002 lorsqu’elle « s’engagea par écrit à ne plus jamais déclarer qu’il restait des survivants parmi les Tsiganes de Tiefland » (p. 287). Il semble tout de même que sa découverte de la nature profondément criminelle du national-socialisme date de septembre 1939, lorsqu’un massacre de civils polonais s’est déroulé sous ses yeux. Malgré cela, elle gardera une nostalgie pour la grandeur des premières années du IIIe Reich, comme s’il n’existait aucune relation entre ces différents moments de sa vie. Ne confiait-elle pas lors des Jeux de Munich en 1972, face au stade de la ville, plus imposant mais moins élégant que le Sportpalast de 1936 : « C’est grand, oui, mais ce n’est pas beau. La beauté est kaputt ! ». Nous touchons là aux limites d’un personnage faussement énigmatique, qui semble parfois dépourvu de toute forme de conscience, de besoin de comprendre, comme si l’argument esthétique valait tous les autres.

8Mais Jérôme Bimbenet analyse surtout, et c’est le sens de son travail, la réception des différents films de Leni Riefenstahl en France, postulant que les dirigeants du Front populaire sont allés puiser chez elle leur engouement pour la culture physique et la vie au grand air II le fait à grand renfort d’extraits d’articles de la presse de l’époque. C’est sans doute là que l’entreprise de Jérôme Bimbenet devient hasardeuse : il y a bien eu un effet Riefenstahl dans la presse spécialisée française mais, pour autant, peut-on réellement parler de fascination, comme l’indique le titre de l’ouvrage ? Cet aspect a visiblement suscité des remous lors de la soutenance de thèse de l’auteur Laissons-lui la parole : « Les membres du jury avaient du mal à envisager la vision d’un Front populaire cherchant un modèle (même simplement sportif) en Allemagne nazie. La remise en cause d’une période intouchable de l’histoire de France récente a été difficilement acceptée. Les sources pourtant existent mais l’auteur de la thèse a pu se rendre compte que l’on ne pouvait impunément aller contre l’idéologie dominante (p. 289). Plus convaincante est l’analyse des films eux-mêmes et surtout la relation de la deuxième partie de la carrière de Leni Riefenstahl. Toutefois, on peut regretter que dans cet ouvrage, aucun élément ne soit donné s’agissant l’attitude et les activités de Leni Riefenstahl pendant la guerre. En effet, il y a en effet très peu d’informations dans la continuité du récit sur les années entre 1939 et 1945. L’auteur, s’il n’a rien trouvé à relater à ce sujet, aurait dû expliquer cette ellipse et renvoyer le lecteur à des ouvrages plus biographiques. Dernier point : quel est le sens de cette accroche racoleuse, qui n’est pas vraiment confirmée par l’analyse des sources : Quand la cinéaste d’Hitler fascinait la France ? Dommage que ce mauvais titre, inutilement polémique, reflète si mal la richesse de l’ouvrage qu’il désigne.

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Pour citer cet article

Référence papier

Vincent Lowy, « Jérôme Bimbenet, Quand la cinéaste d’Hitler fascinait la France, Leni Riefenstahl », Questions de communication, 12 | 2007, 362-365.

Référence électronique

Vincent Lowy, « Jérôme Bimbenet, Quand la cinéaste d’Hitler fascinait la France, Leni Riefenstahl », Questions de communication [En ligne], 12 | 2007, mis en ligne le 12 avril 2012, consulté le 21 février 2021. URL : http://journals.openedition.org/questionsdecommunication/2475 ; DOI : https://doi.org/10.4000/questionsdecommunication.2475

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Auteur

Vincent Lowy

Université Marc Bloch-Strasbourg 2
CREM, université Paul Verlaine-Metz
vincentetmarion@yahoo.com