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duminică, 27 octombrie 2024

LA « LUBITSCH’S TOUCH » EN HUIT FILMS

 

Les Réalisateurs

LA « LUBITSCH’S TOUCH » EN HUIT FILMS

Le style Lubitsch se caractérisait surtout par l’élégance des idées, la manière très originale d’engager une scène, ou un dialogue. On pense que son secret consistait à piquer la curiosité du public par quelques sous-entendus afin qu’il se sente complice. En d’autres termes, Lubitsch ne déclarait pas catégoriquement 2 + 2 = 4, mais il posait l’opération 1 + 3, laissant aux spectateurs le soin de trouver la solution, et le charme agissait…


TO BE OR NOT TO BE – Ernst Lubitsch (1942)

Avant d’être une charge antinazie, ce chef-d’œuvre d’intelligence est une variation hilarante sur « Être ou ne pas être… ». Telle est la question dès le début, où Hitler se balade, seul, dans les rues de Varsovie en 1939, au milieu des passants ébahis. Hitler ? Non, un ­acteur de second plan qui teste la crédibilité de son personnage ! Dans ce Lubitsch, où une troupe de comédiens va aider un résistant à déjouer un plan des nazis, tout repose, plus que jamais, sur les apparences trompeuses. Voir la publication…


NINOTCHKA – Ernst Lubitsch (1939)

On en connaît le thème, repris en 1957 par Rouben Mamoulian dans la comédie musicale Silk Stockings (La Belle de Moscou) : la conversion d’une austère jeune femme soviétique aux charmes de l’amour et des sociétés capitalistes. Le rire de Garbo (Garbo laughs !), survenant après tant de rôles tragiques, joua un rôle considérable dans la promotion du film. Le séjour que fit Lubitsch à Moscou en 1936 est-il pour beaucoup dans l’ «acidité » de cette satire ? Le cinéaste demeura trop discret sur son voyage pour qu’on puisse l’affirmer, mais le film s’est certainement enrichi de cette expérience. Voir la publication…


HEAVEN CAN WAIT (Le Ciel peut attendre) – Ernst Lubitsch (1943)

Henry Van Cleve vient de mourir, une infirmière au visage d’ange à son chevet. Son existence fut dévolue au plaisir : il se présente donc spontanément devant le diable. Mais on n’obtient pas sa place en enfer aussi facilement. Pour que Lucifer puisse juger, Henry lui raconte sa vie, dont la plus grande qualité fut, sans conteste, sa merveilleuse épouse, Martha. A travers ce portrait d’un Casanova infantile et attachant, Lubitsch brode une apologie de la félicité conjugale. Il traite de l’amour, du deuil, de la trahison, du plaisir et de la mort avec la pudeur de ceux qui connaissent la fragilité du bonheur. Cette comédie où le cynisme côtoie la pureté et où la mélancolie flirte avec la légèreté gamine est riche en enseignements lubitschiens : il faut beaucoup de scarabées pour séduire les filles, ne jamais laisser passer une femme qui éternue, toujours avoir un grand-père indigne chez soi, et, surtout, faire confiance à l’amour et à la beauté en Technicolor de Gene TierneyHeaven can wait n’est pas du champagne : c’est un alcool doux et profond. Avec ce film testament, Lubitsch gagna à coup sûr son billet pour le paradis. [Guillemette Odicino – Télérama] Voir la publication…


THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous- Ernst Lubitsch (1940)

Lubitsch ne s’est pas plongé dans le petit peuple – d’où, d’ailleurs, il vient -, tout au plus dans la vision que Hollywood forge de ces gens simples, une vision idyllique, est-il besoin de le préciser. La « bulle », c’est la boutique de M. Matuschek, lieu central du décor (on ne s’en éloigne que rarement, et pour des endroits anonymes : café, chambre meublée, hôpital), à l’intérieur de laquelle la réalité est transformée par les us du commerce comme elle l’était dans Trouble in Paradise (Haute Pègre) par les règles du savoir-vivre. Il n’y a pas ici d’hommes et de femmes mais un patron, des vendeurs, une caissière, un coursier. Voir la publication…


ONE HOUR WITH YOU (une Heure près de toi) – Ernst Lubitsch (1932)

One hour with you est un parfait exemple de la manière dont Hollywood s’est longtemps amusé à représenter Paris : une cité où chacun consacre la majeure partie de son temps à l’amour, de préférence adultère. Avec son ironie habituelle, Lubitsch nous fait assister ici à un chassé-croisé amoureux que n’aurait pas renié Marivaux, et encore moins Labiche. Le cinéaste multiplie d’ailleurs les clins d’œil au théâtre : ses héros s’expriment parfois en vers, et il leur arrive de s’adresser directement au public. Mais bien sûr, ce qui l’intéresse surtout, c’est encore et toujours la tentation de la chair. One hour with you fourmille d’allusions à peine voilées aux désirs de chaque protagoniste (si l’on y regarde bien, même les soubrettes ont ici une vie amoureuse, et un domestique peut dire à son maître qu’il avait « tellement envie de le voir en collants »). Certains journaux déconseilleront donc de programmer un tel film dans les petites villes, en particulier le dimanche… Mais ces précautions ne seront bientôt plus nécessaires : le code Hays se verra en effet renforce en 1934, et les « audaces » d’un film comme One hour with you disparaitront pendant trente ans du cinéma hollywoodien. Voir la publication…


ANGEL (Ange) – Ernst Lubitsch (1937)

A voir le film, on le comprend aisément. Et l’on comprend d’autant moins, en revanche) qu’il ait été fort mal accueilli à sa sortie, et qu’il soit longtemps resté méconnu. « Passons sur Angel », dit négligemment Weinberg, comme s’il s’agissait d’un accident de parcours. On reprocha au film son intrigue banale, sa courtoisie excessive et glacée. Sans doute ne pardonnait-on pas à Lubitsch de vouloir traiter sur un ton grave le thème vaudevillesque du triangle qui lui avait inspiré tant de comédies conjugales joliment amorales. De quel droit, tout à coup. une aventure à peine ébauchée devient-elle une affaire d’État, lourde de sentiments aussi encombrants que la méfiance, le remords, la jalousie ? S’il n’y avait pas eu Desire auparavant, Angel serait celui par qui la morale arrive. Voir la publication…


CLUNY BROWN (La Folle ingénue) – Ernst Lubitsch (1946)

A la fin de l’année 1945, Lubitsch, qui avait rencontré de graves problèmes de santé, est autorisé par son médecin à reprendre son poste derrière la caméra. Cluny Brown (La Folle ingénue) est adapté d’un roman populaire à succès de Margery Sharp – source qui n’a rien de commun avec les pièces hongroises dont Lubitsch est friand. Ainsi, Heaven can wait (Le Ciel peut attendre, 1946) était trop testamentaire pour être vrai. Après la splendeur de Heaven, et ce qui y passait pour de touchants adieux, le plus modeste Cluny Brown prend une position d’outsider un peu gênante, et a rarement droit de cité parmi les « grands » Lubitsch. Apparemment déplacé, Cluny Brown a quelque chose d’un vilain petit canard qui attache et fascine d’autant plus le spectateur attentif. Voir la publication…


THAT LADY IN ERMINE (La Dame au manteau d’hermine) – Ernst Lubitsch (1948)

Dernier projet d’Ernst Lubitsch, ce film de 1948 réunit la star Betty Grable et le séducteur Douglas Fairbanks Jr dans une romance musicale où l’humour le dispute sans cesse au merveilleux. En matière de comédie, les années 1950 préparent la consécration d’acteurs au génie et à l’humour purement américains – tous ceux, entre autres, qu’emploiera cet autre grand disciple de LubitschBilly Wilder : Jack Lemmon, Marilyn MonroeWilliam Holden, Tony Curtis, Walter Matthau… Dans That lady in Ermine, Grable et Fairbanks Jr. sont pris au piège entre deux époques, celle que s’efforce nostalgiquement de ressusciter Lubitsch, et celle vers laquelle s’achemine inévitablement la comédie qu’il a lui-même si largement contribué à créer. Aussi That lady in Ermine nous laisse-t-elle l’image douce-amère d’un enchanteur fatigué, s’appliquant à faire jaillir de sa baguette quelques ultimes étincelles. Voir la publication…


Ernst Lubitsch est l’un des grands stylistes du cinéma américain. Sa renommée internationale, il la doit à ce que l’on a depuis baptisée la « Lubitsch’s touch », un style brillant où se mêlent l’allusion subtile, l’élégance et le brio des dialogues et de la mise en scène, la satire ironique. et légère des faiblesses de la société, plus spécialement dans les rapports entre hommes et femmes.


duminică, 12 iulie 2020

THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940)

LE FILM ÉTRANGER

THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940)

En 1939, Lubitsch parlait de la nécessité de faire des films en rapport avec  » le monde réel ». En 1940, il tourne sur quatre semaines et avec moins de 500 000 dollars The Shop around the corner, dont il dira : « Pour la comédie humaine, je n’ai rien produit d’aussi bon…  Je n’ai jamais fait non plus un film dans lequel l’atmosphère et les personnages étaient plus vrais que dans celui-ci » 
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THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940) – Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut
La « vérité » de l’entreprise vient d’abord, bien sûr, de son enracinement autobiographique. Quoique The Shop… soit inspiré à l’origine d’une pièce hongroise brillamment métamorphosée par Raphaelson, la maroquinerie de M. Matuschek à Budapest ne doit pas être sans rapport avec les magasins de confection de Berlin familiers au petit Lubitsch. Le cinéaste a gardé très présente à l’esprit l’atmosphère de ces modestes commerces où l’on vit en famille : « Le film a un thème universel et raconte une histoire simple. Les sentiments existant entre le patron et ses employés sont les mêmes à travers le monde entier, selon moi. Chacun a peur de perdre son emploi, et chacun sait à quel point les petits soucis humains peuvent mettre cet emploi en danger. Si le patron a un peu de dyspepsie, il vaut mieux ne pas lui marcher sur les pieds ; mais quand tout va bien pour lui, le personnel au complet reflète sa bonne humeur. »   [Lubitsch – Jacqueline Nacache – Ed. Edilig (1987)]
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THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940) – Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut
Ainsi, comme Ninotchka à son retour de Paris Lubitsch découvre la nostalgie. Ce vague regret qui planait déjà sur le Paris doux-amer d’Angel répand désormais sa langueur sur tout le petit peuple de « la boutique au coin de la rue » – soit au coin de ma rue, de votre rue, de toutes les rues du monde. Car nous y voilà : cette « shop around the corner », par son anonymat même, atteint rapidement les dimensions du mythe. Sous prétexte de parler des petites gens, de montrer des êtres vrais, loin des palaces et des casinos, Lubitsch crée autour d’eux, et pour eux, un univers encore plus idéal et exemplaire que les Paris, Vienne ou Monte-Carlo de ses films précédents. Maintenant les sans-grade ont aussi droit à leur paradis, à la bulle aux parois de cristal dans laquelle les enferme le cinéaste.  [Lubitsch – Jacqueline Nacache – Ed. Edilig (1987)]
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THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940) – Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut
Lubitsch ne s’est pas plongé dans le petit peuple – d’où, d’ailleurs, il vient -, tout au plus dans la vision que Hollywood forge de ces gens simples, une vision idyllique, est-il besoin de le préciser. La « bulle », c’est la boutique de M. Matuschek, lieu central du décor (on ne s’en éloigne que rarement, et pour des endroits anonymes : café, chambre meublée, hôpital), à l’intérieur de laquelle la réalité est transformée par les us du commerce comme elle l’était dans Trouble in Paradise (Haute Pègre) par les règles du savoir-vivre. Il n’y a pas ici d’hommes et de femmes mais un patron, des vendeurs, une caissière, un coursier. Dans un judicieux article, Yann Tobin compare tout le personnel à une troupe de théâtre et assimile le film à « la préparation d’un show ». Comment mieux dire que nous sommes ici aux antipodes de la réalité, dans ce monde protégé de Lubitsch où même les dissonances concordent à l’harmonie finale ? Or, conformément à la grande tradition lubitschienne, on peut difficilement accumuler plus de dissonances, d’erreurs et de fausses interprétations que dans  le scénario de The Shop… – sauf peut-être dans celui de To be or not to be.   [Lubitsch – Jacqueline Nacache – Ed. Edilig (1987)]
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THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940) – Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut
Si The Shop… marque le couronnement d’un grand cinéaste américain, c’est parce que Lubitsch, avec la complicité de Raphaelson, y confirme qu’il a complètement maîtrisé l’art de manier et s’approprier les stéréotypes – une règle fondamentale dans la grammaire de la comédie américaine. Il sait prendre des êtres monochromes et les habiller de mille nuances irisées : ainsi Klara, la petite vendeuse, qu’un sentiment irraisonné de supériorité fait parfois se comporter comme une princesse ; ou M. Matuschek, que sa profonde bonté n’empêche pas de s’aveugler au point de commettre la pire des erreurs…   [Lubitsch – Jacqueline Nacache – Ed. Edilig (1987)]
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THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940) – Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut
Répliquera-t-on que Lubitsch était déjà un stéréotype ? Pas plus que les lieutenants souriants, les escrocs de luxe et les comtesses ruinées aux mille expédients. De si parfaites alliances de qualités et de défauts font des personnages uniques et non des types. Nous en trouvons la preuve en rapprochant par-delà les années Schuhpalast Pinkus (Le Palais de la chaussure Pinkus 1919) et The Shop…, qui présentent de curieuses similitudes dans l’intrigue. On se souvient que Sally Pinkus, interprétait par Ernst Lubitsch, était à la fois lâche, séducteur, hypocrite et arriviste, et qu’aucun autre être autour de lui n’avait de consistance. Or tout se passe dans The Shop… comme si Pinkus s’était fragmenté en plusieurs personnages qui illustrent ses différentes facettes. L’un complètement positif – Kralik, la réussite par l’honnêteté -, l’autre complètement négatif – Vadas, l’arrivisme par la flagornerie – et, entre les deux, deux silhouettes ambivalentes : Pirovitch lâche et tendre, Pepi hâbleur et généreux. Pourquoi cet éclatement ? Parce que le spectateur américain de 1940 ne peut s’identifier à un Pinkus qui est à la fois tout le bien et tout le mal. Il a besoin de raccrocher à des êtres emblématiques, le bon Kralik, le mauvais Vadas, qui seuls peuvent permettre aux Pirovitch et aux Pepi d’exister. Pepi, c’est Pinkus au sommet de son triomphe, exhibant fièrement les atours qui sont le signe de sa réussite. Pirovitch, c’est un Pinkus vieilli, qui aurait raté toutes les occasions, à qui il ne reste qu’une douce lâcheté et une terrible lucidité sur lui-même : « L’autre jour M. Matuschek m’a traité d’imbécile. Que pouvais-je faire ? J’ai répondu « Oui, Monsieur Matuschek, je suis un imbécile » – je ne suis pas fou ! » Et c’est bien sûr Felix Bressart qui prête à ces répliques tout son génie de Groucho triste. Si l’on voulait mesurer la distance entre le Lubitsch berlinois et le cinéaste américain de 1940, elle serait sans doute égale à celle qui sépare Pinkus de Pirovitch. De la caricature juive à l’humour juif : il n’a pas fallu à Lubitsch moins de dix-huit ans d’exil pour atteindre ce stade ultime de la sagesse.   [Lubitsch – Jacqueline Nacache – Ed. Edilig (1987)]
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THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940) – Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut
La nostalgie de The Shop…, c’est aussi la conscience du temps, du vieillissement et de la mort, qu’on perçoit à travers le personnage de M. Matuschek, dont tout le film ne raconte guère que la défaite. Ce n’est pas un hasard si c’est Pepi, le personnage le plus ouvertement comique du film, qui sauve (hors champ) son patron du suicide. Ce sauvetage sonne faux, un pur artifice pour empêcher le film de basculer dans le tragique : de telles erreurs ne sont pas permises dans une comédie sentimentale de la MGM ! Mais ce n’est qu’un sursis : M. Matuschek mourra tout de même de solitude et d’inaction, comme le laisse prévoir cette déchirante scène de veille de Noël où Frank Morgan donne à son personnage toute sa pitoyable grandeur.   [Lubitsch – Jacqueline Nacache – Ed. Edilig (1987)]
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THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940) – Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut
Ces accès de lucide mélancolie, tellement nouveaux chez Lubitsch, ont souvent permis d’évoquer un film qu’il admirait, Make Way for Tomorrow (Place aux jeunes) de Leo McCarey. Mais si toute la leçon de The Shop… est aussi « Place aux jeunes », le ton reste plus sobre et retenu que dans le bouleversant film de McCarey. Après tout, nous sommes chez Lubitsch, et l’œuvre a d’autres enjeux que la tristesse d’un vieil homme. Et d’abord il s’agit de faire vivre sous nos yeux cette boutique de Budapest. Le pari est tenu dès l’ouverture, une sorte de lever de rideau où tous les employés, arrivant devant le magasin, suivent un rituel à travers lequel chacun se dévoile. Au bout de ces quelques minutes, nous les connaissons depuis toujours, nous avons mis à nu les rapports de pouvoir, d’amitié, de haine : c’est une scène d’exposition au sens le plus classique du terme (extrait n°1).  [Lubitsch – Jacqueline Nacache – Ed. Edilig (1987)]
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THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940) – Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut
L’intense activité que nous pressentons dans ce groupe ne va pas cesser de se préciser, de se ramifier tout au long du film – l’activité du commerce, elle, restant très modérée. En effet, à l’exception de la grande vente de Noël, on aperçoit bien peu de clients dans la boutique, ce qui semble moins imputable à la crise économique qu’à un manque d’intérêt général pour la clientèle… Et si tous les articles restent en stock avec la même constance que les fameux coffrets à cigarettes musicaux, lesquels se promènent d’un bout à l’autre de l’aventure, cristallisant tour à tour l’ambition, l’échec, l’amour et la colère, on comprend que M. Matuschek estime faire preuve de philanthropie en employant six personnes – « au lieu de quatre dans la boutique d’à côté » !   [Lubitsch – Jacqueline Nacache – Ed. Edilig (1987)]
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THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940) – Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut
L’éternel triangle vaudevillesque s’installe, à ceci près qu’il se compose de Kralik, de Klara, et d’un être imaginaire auquel Kralik va se faire un plaisir de donner vie, et dont il se sert même pour faire son propre éloge auprès de la jeune fille ! Ces petites gens-là ont en vérité autant de talent pour marivauder que ducs et comtes ! Kralik maîtrise d’autant mieux cet art lorsqu’il a perdu angoisse et naïveté, et tient en main les ficelles de la situation : il devient alors assez roué pour la mettre lui-même en scène, tandis que Lubitsch s’efface derrière ses personnages. Il réapparaît, cependant, in extremis, le temps que James Stewart soulève son pantalon pour prouver à une Margaret Sullavan incrédule l’impeccable rectitude de ses mollets. Un plan facétieux, digne du Lubitsch allemand, et qui ramène à leurs justes proportions toutes ces romantiques péripéties.    [Lubitsch – Jacqueline Nacache – Ed. Edilig (1987)]
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THE SHOP AROUND THE CORNER (Rendez-vous) – Ernst Lubitsch (1940) – Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut
LES EXTRAITS
        
FICHE TECHNIQUE DU FILM
Ernst Lubitsch est l’un des grands stylistes du cinéma américain. Sa renommée internationale, il la doit à ce que l’on a depuis baptisée la « Lubitsch’s touch », un style brillant où se mêlent l’allusion subtile, l’élégance et le brio des dialogues et de la mise en scène, la satire ironique. et légère des faiblesses de la société, plus spécialement dans les rapports entre hommes et femmes.
A la fin de l’année 1945, Lubitsch, qui avait rencontré de graves problèmes de santé, est autorisé par son médecin à reprendre son poste derrière la caméra. Cluny Brown (La Folle ingénue) est adapté d’un roman populaire à succès de Margery Sharp – source qui n’a rien de commun avec les pièces hongroises dont Lubitsch est friand.
Dernier projet d’Ernst Lubitsch, ce film de 1948 réunit la star Betty Grable et le séducteur Douglas Fairbanks Jr dans une romance musicale où l’humour le dispute sans cesse au merveilleux.
Dans une maison de rendez-vous parisienne, Anthony Halton rencontre une très belle et mystérieuse jeune femme, qui s’enfuit à la fin de la soirée. Plus tard, à Londres, il retrouve l’inconnue sous les traits de la respectable lady Maria Barker, épouse de lord Barker, homme politique très occupé. Maria est sur le point de suivre Anthony pour toujours ; mais lord Barker apprend la vérité et survient à temps pour persuader sa femme de revenir près de lui…
Sortie aux États-Unis en mars 1932, la quatrième comédie musicale de Lubitsch confirme l’attrait exercé sur le public par Jeanette MacDonald et le titi parisien Maurice Chevalier. 

ONE HOUR WITH YOU (Une Heure près de toi) – Ernst Lubitsch (1932)






LA COMÉDIE MUSICALE

ONE HOUR WITH YOU (Une Heure près de toi) – Ernst Lubitsch (1932)



ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
One hour with you fourmille d’allusions à peine voilées aux désirs de chaque protagoniste (si l’on y regarde bien, même les soubrettes ont ici une vie amoureuse, et un domestique peut dire à son maître qu’il avait « tellement envie de le voir en collants »). Certains journaux déconseilleront donc de programmer un tel film dans les petites villes, en particulier le dimanche… Mais ces précautions ne seront bientôt plus nécessaires : le code Hays se verra en effet renforce en 1934, et les « audaces » d’un film comme One hour with you disparaitront pendant trente ans du cinéma hollywoodien. 


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
Au commencement était une pièce allemande, Nur ein Traum, écrite en 1909 par Lothar Schmidt. Après s’en être inspiré pour livrer en 1924 son deuxième film américain, ComédiennesLubitsch décide de repartir du même matériau pour One hour with you, dont la préparation est lancée par la Paramount à la fin de l’année 1931.


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
Le cinéaste confie l’écriture du scénario à celui qui est en passe de devenir son collaborateur attitré, le dramaturge Samson Raphaelson : ce dernier vient en effet de livrer coup sur coup le script des films The Smiling Lieutenant (Le Lieutenant souriant) et Broken Lullaby (L’Homme que j’ai tué), et il enchaînera directement avec celui de Trouble in Paradise (Haute pègre). Mécontent de la première version proposée par Raphaelson, Lubitsch lui demande de la retravailler selon ses suggestions – s’il se voit rarement crédité comme scénariste, ce maître de la comédie n’en participe pas moins à l’écriture de tous ses films, ce qui leur donne leur style immédiatement reconnaissable.


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
Le projet de One hour with you permet à Lubitsch de réunir le couple vedette de sa toute première comédie musicale, The Love Parade (Parade d’amour), tournée en 1929 : Maurice Chevalier et Jeanette MacDonald. Le cinéaste a eu l’occasion de diriger entre-temps le premier dans The Smiling Lieutenant et Paramount on parade, et la seconde dans Monte-Carlo, et il souhaitait en faire à nouveau les héros d’un même film – contre l’avis de l’acteur qui, dit-on, aurait préféré avoir pour partenaire Kay Francis, pour des raisons jugées un peu trop « personnelles » par Lubitsch


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
Le film étant tourné en double version, américaine et française (une pratique courante au début du parlant, quand la technique du doublage ne s’était pas encore imposée), Maurice Chevalier et Jeanette MacDonald jouent alternativement dans les deux langues. En revanche, le reste du casting diffère d’une version à l’autre : Genevieve Tobin et Charles Ruggles incarnent Mitzi et Adolph dans la version destinée au public américain, tandis que Lili Damita et Pierre Etchepare tiennent ces rôles en français. Il ne subsiste malheureusement aujourd’hui aucune copie de la version française de One hour with you, mais les historiens du cinéma espèrent qu’elle resurgira un jour… 


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
Un autre mystère entourant le film est la part réellement prise par George Cukor dans sa réalisation. Il semble que, retenu sur le tournage difficile de Broken LullabyLubitsch ait d’abord souhaité lui confier la mise en scène de One hour with youi, lui-même se contentant de superviser le projet. Agé de 31 ans et déjà auteur de deux longs métrages, Cukor entame donc les prises de vues, mais doit bientôt laisser son aîné reprendre les rênes. Pour quelle raison ? Certains invoquent de mauvaises relations entre Cukor et Maurice Chevalier, mais à en croire Samson Raphaelson, les premières scènes dirigées par le jeune réalisateur ne correspondaient pas du tout au style léger du scénario, et Lubitsch a décidé de rectifier le tir.


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
Quoi qu’il en soit, la paternité du film va donner lieu de part et d’autre à des menaces de procès, et la Paramount finit par régler l’affaire en créditant Cukor comme « dialogue director », et en le libérant de son contrat afin qu’il puisse aller tourner pour la RKO le bien nommé What Price Hollywood ?.. Peu intéressés par ces conflits, les spectateurs de 1932 se contenteront quant à eux d’apprécier le charme de ce marivaudage musical, qui se verra nommé à l’Oscar du meilleur film… 


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
On l’aura compris, One hour with you est un film difficile à apprécier. Seul, parmi les cinq opérettes, à se dérouler dans un contexte moderne, il se situe dans une zone confuse, quelque part entre le music-hall et la comédie de mœurs. En costume de ville, s’adressant au public et chantant « Oh, that Mitzi ! », Chevalier est plus proche qu’il ne l’a jamais été d’un numéro de cabaret ; Chevalier encore, ainsi que Roland Young, dressent de temps à autre des bilans de l’action qui mettent à nu implacablement les ressorts du vaudeville. Les couplets rimés qu’échangent Mitzi et Colette hésitent entre répliques et chansons…


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
Tout cela sur un fond d’intrigue très fidèle à The Marriage Circle (Comédiennes) – fidèle pour la lettre, s’entend, car l’esprit, lui, est très différent. Le parlant réduit l’ambiguïté possible seulement dans le silence ; conscients de cela, Lubitsch et Raphaelson placent tout le charme du film dans des dialogues travaillés à la perfection, du point de vue tant du sens que des sonorités, ce qui provoque une confusion de plus entre partie chantée et parlée. Qu’on se rappelle les « Mitzi, Kitzi, Bitzi » et autres « I can tie a tie and how ! »  – le fait de nouer et dénouer une cravate étant donné comme une métaphore de l’acte sexuel. [Jacqueline Nacache – Lubitsch – Ed. Edilig (1987]


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
Et puis, il y a des bizarreries hilarantes, mais inexplicables, qui font encore de One hour with you un mouton à cinq pattes. Ainsi le commentaire loufoque que fait Chevalier de trois photos censées « prouver » qu’il est marié ; le personnage de Charlie Ruggles, amoureux transi et non moins mufle, et ses étranges rapports avec son valet. « Pourquoi m’avez-vous dit que la soirée était costumée ? », lui demande Ruggles, vêtu d’une inutile défroque de Roméo. « Monsieur, répond le valet, j’avais tant envie de vous voir en collants ! » Grâce à Young et Ruggles surtout, on frôle les précipices de l’absurde ; et l’on retombe sur ses pieds, le temps d’une limpide et superbe séquence comme celle de la lampe éteinte et rallumée, ou la danse sur la chanson « One Hour with you ». [Jacqueline Nacache – Lubitsch – Ed. Edilig (1987]


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
Cet objet non identifié qu’est One hour with you n’a pas démesurément intrigué les commentateurs. Il faut admettre que le film fonctionne très bien si l’on n’y prend que la comédie conjugale, ou les dialogues désopilants, ou le cabotinage d’un Chevalier dont la tâche est facilitée par une Jeanette MacDonald singulièrement éteinte. Il n’en reste pas moins une œuvre hybride, où le genre de l’opérette est sans cesse convoqué et sans cesse rejeté, dans un double mouvement qui ne peut marquer qu’une large aspiration à la nouveauté. [Jacqueline Nacache – Lubitsch – Ed. Edilig (1987]


ONE HOUR WITH YOU – Ernst Lubitsch (1932)
L’HISTOIRE
Le Dr André Bertier (Maurice Chevalier) vit en couple heureux avec Colette (Jeanette MacDonald). Mais leur mariage va être mis à mal par l’arrivée de la meilleure amie de Colette, Mitzi Olivier (Genevieve Tobin) qui s’efforcera d’être aimée d’André, tout en faisant croire à Colette que celui-ci est amoureux d’une certaine Martel (Josephine Dunn). Colette, lors d’un bal voit à plusieurs reprises son mari en compagnie de cette Martel et soupçonne qu’il la trompe. André la trompe, en effet, mais avec Mitzi. Le mari de celle-ci, le professeur Olivier (Roland Young) apprend l’histoire via ses détectives et décide de divorcer appelant le docteur Berthier comme témoin, ce qui le forcerait d’avouer son infidélité publiquement. De son côté, Colette essaie de se consoler en acceptant la déclaration d’amour d’un de ses amis, Adolph (Charles Ruggles). Finalement, l’élément perturbateur Mitzi repartant à Lausanne, André et Colette reprennent leur vie tranquille et amoureuse.


LES EXTRAITS




Ernst Lubitsch est l’un des grands stylistes du cinéma américain. Sa renommée internationale, il la doit à ce que l’on a depuis baptisée la « Lubitsch’s touch », un style brillant où se mêlent l’allusion subtile, l’élégance et le brio des dialogues et de la mise en scène, la satire ironique. et légère des faiblesses de la société, plus spécialement dans les rapports entre hommes et femmes.



En 1939, Lubitsch parlait de la nécessité de faire des films en rapport avec  » le monde réel ». En 1940, il tourne sur quatre semaines et avec moins de 500 000 dollars The Shop around the corner, dont il dira : « Pour la comédie humaine, je n’ai rien produit d’aussi bon…  Je n’ai jamais fait non plus un film dans lequel l’atmosphère et les personnages étaient plus vrais que dans celui-ci » 



A la fin de l’année 1945, Lubitsch, qui avait rencontré de graves problèmes de santé, est autorisé par son médecin à reprendre son poste derrière la caméra. Cluny Brown (La Folle ingénue) est adapté d’un roman populaire à succès de Margery Sharp – source qui n’a rien de commun avec les pièces hongroises dont Lubitsch est friand.



Dans une maison de rendez-vous parisienne, Anthony Halton rencontre une très belle et mystérieuse jeune femme, qui s’enfuit à la fin de la soirée. Plus tard, à Londres, il retrouve l’inconnue sous les traits de la respectable lady Maria Barker, épouse de lord Barker, homme politique très occupé. Maria est sur le point de suivre Anthony pour toujours ; mais lord Barker apprend la vérité et survient à temps pour persuader sa femme de revenir près de lui…



Dernier projet d’Ernst Lubitsch, ce film de 1948 réunit la star Betty Grable et le séducteur Douglas Fairbanks Jr dans une romance musicale où l’humour le dispute sans cesse au merveilleux.