marți, 2 iunie 2020

ANDRE DELVAUX (1926-2002) jeux de miroirs

DELVAUX (André)

cinéaste et musicien belge (Héverlé 1926).
Il étudie la philologie germanique et le droit à l'université de Bruxelles tout en poursuivant au Conservatoire royal des études de piano et de composition. Professeur de langues, il se passionne pour le cinéma et anime, à partir de 1956, la réalisation par ses élèves de plusieurs courts métrages en 16 mm. Il réalise parallèlement ses propres premiers courts métrages, écrit en 1958 la musique de deux courts films de son ami Jean Brismée, dirige plusieurs émissions télévisées, dont des séries sur Fellini (1960) et Rouch (1962), et anime un séminaire sur le langage cinématographique à l'université de Bruxelles. En 1963, il est chargé de cours de langage et de réalisation cinématographiques à l'Institut national supérieur des arts du spectacle de Bruxelles. Depuis, son activité se partage entre l'enseignement théorique du cinéma, la réalisation de ses films et celle de séries télévisées. Aussi s'est-il penché sur le cinéma polonais (1964) et les métiers du cinéma (Derrière l'écran, 1966, réalisé en marge du tournage des Demoiselles de Rochefort). L'Homme au crâne rasé (1966), produit avec l'aide de la télévision flamande, est une histoire d'amour fou où le rêve se confond avec la réalité sans que nous sachions jamais avec certitude si ce qui nous est donné sur l'écran participe de l'objectif ou du subjectif. Un soir un train (1968) élargit son audience tout en précisant ses thèses et son esthétique : dans le voyage hors des lieux et du temps qui mène Mathias (Yves Montand) à la rencontre de la femme qu'il a côtoyée sans la connaître jamais (Anouk Aimée) et de sa propre vérité, le réel bascule dans l'imaginaire. Plus encore que son film précédent, Delvaux construit celui-ci comme une œuvre musicale, non seulement dans son emploi raffiné du dialogue et des bruits mais aussi dans sa structure même. De nouveau, c'est dans les paysages d'une Flandre embrumée par l'automne qu'il trouve la correspondance secrète avec la conscience confuse qu'a Mathias de son identité morale et culturelle. Rendez-vous à Bray (1971), produit en France comme le précédent, adapte à l'écran une nouvelle de Julien Gracq et l'annexe à l'univers propre de Delvaux. Le thème, une fois encore, est celui de la frontière impossible à situer entre deux univers, le passé et le présent, et le réalisateur joue de la temporalité pour mieux en brouiller les repères. La musique est projetée au premier plan (le personnage principal est pianiste et accompagnateur de films muets, ainsi que le faisait Delvaux à la Cinémathèque royale). Avec Belle (1973), qui est une sorte de quintessence de toute son œuvre (un écrivain tombe follement amoureux d'une créature de rêve qu'il rencontre dans les landes d'Ardenne et qui n'existe peut-être pas), Delvaux renoue avec bonheur avec le sens du mystère de ses premiers films. Femme entre chien et loup (1979), en revanche, s'éloigne de ses thèmes de prédilection pour traiter la prise de conscience d'une femme dans la Flandre des années 40. Ce n'est plus l'imaginaire qu'il invoque, mais les souvenirs d'une période de l'histoire flamande que les mémoires ont occultée, et le réalisme minutieux avec lequel sont décrits les gestes quotidiens réaffirme l'ordre ailleurs contesté. Mais l'intimisme psychologique sied moins au cinéaste que les vertiges de l'imaginaire. Dans Benvenuta (1983), il tente de revenir aux jeux de miroir qui l'ont toujours fasciné en décrivant un itinéraire passionnel placé sous le double signe de la réalité et des fantasmes. En 1988 il signe une adaptation ambitieuse et consciencieuse de l'Œuvre au noir de Marguerite Yourcenar.

Films :

Forges (CM, 1956) ; le Temps des écoliers (HaagschoolCM, 1962) ; l'Homme au crâne rasé (De man die zijn haar kort liet knippen, 1966) ; les Interprètes (TolkenCM, 1968) ; Un soir un train (id.) ; Rendez-vous à Bray(1971) ; Belle (1973) ; Avec Dierick Bouts (CM, 1975) ; Femme entre chien et loup (Een vrouw tussen hond en wolf, 1979) ; To Woody Allen, From Europe With Love(1980) ; Benvenuta (1983) ; Babel Opera (1985) ; l'Œuvre au noir (1988).
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Où l'on s'intéresse à Un soir, un train, un film du cinéaste belge André Delvaux, qui transporte (en train naturellement) un professeur de linguistique dans une contrée dont il ne comprend pas la langue…

 Un soir, un train

Un soir, un train, André Delvaux (1968). Couleurs, 91 minutes.
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Mathias Bremen (Yves Montand) est professeur de linguistique dans une université belge, situé en Flandres. Lorsque débute le film, Mathias voit son cours abrégé : les étudiants flamands manifestent contre la présence de francophones dans leur université. Se sentant peu concerné par ces événements, le professeur en profite pour rentrer plus tôt chez lui, et passe chercher sa compagne, Anne (Anouk Aimé), au théâtre, où elle travaille comme décoratrice. Mathias a une conférence prévue en soirée : en attendant de prendre le train, il se promène avec Anne. Celle-ci veut l’accompagner, Mathias tente de l’en décourager, mais n’y parvient pas.
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Jusqu’ici, tout va bien.
Bercé par le train qui traverse un paysage enneigé, Mathias s’assoupit bientôt. C’est le ralentissement du convoi qui le tire de sa torpeur. Constatant qu’Anne n’est plus dans le compartiment, il part à sa recherche, et croise dans le couloir le professeur Hernhutter, une vieille connaissance. Lorsque le train s’arrête totalement en pleine cambrousse, les deux enseignants descendent et rejoignent sur le bas-côté Val, un ancien étudiant de Mathias. Tous trois ont l’intention de gagner la locomotive, mais le train part soudain. Voilà les trois hommes abandonnés dans ce coin de campagne, loin de tout… La nuit tombe…
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Plus tard, ils atteindront un village, peuplé de gens fuyants et parlant une langue incompréhensible… Comment procéder pour se faire comprendre ? Pour rentrer chez soi ?
vol1-u-roman-vo.jpgUn soir, un train est l’adaptation du roman éponyme de l’écrivain belge Johan Daisne (1912-1978), représentant du réalisme magique wallon. Deux de ses romans ont portés à l’écran : d’abord L’Homme au crâne rasé (1948) puis Un soir, un train (1948), tous deux précisément par André Delvaux, en 1965 pour le premier roman, 1968 pour le second.
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Sous ses atours de film fantastique, Un soir, un train traite de l’incommunicabilité entre les êtres – y compris et surtout au sein d’un couple. Les scènes figurant Mathias et Anne ensemble sont significatives : l’un et l’autre monologuent, chacun de son côté, et lorsqu’ils dialoguent enfin, ils peinent à se comprendre. Le lieu de l’action n’est pas non plus anodin : la Belgique, divisée en deux par une frontière linguistique, où (pour autant que je sache) Wallons et Flamands ne font pas forcément l’effort d’apprendre la langue de l’autre. Quant au dernier quart du film, se déroulant dans cette ville étrange où les gens ont un comportement aussi incompréhensible que leur langue, il préfigure très fortement Épépé (1970), roman de Ferenc Karinthy racontant les déboires d’un linguiste dans une ville inconnue peuplée de gens dont la langue défie toutes ses tentatives de compréhension (au demeurant, le roman est excellent et a récemment bénéficié d’une réédition chez Zulma : lisez-le !).
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Dès le générique et sa chanson hantée, un sentiment de tristesse va imprégner le film. Une ambiance accrue par le visage mélancolique d’Anouk Aimé et l’air de chien battu d’Yves Montand, ainsi que par les paysages hivernaux traversés par le train. On pourrait se trouver aussi bien en Belgique qu’aux confins des steppes asiatiques, comme le commente le professeur Hernhutter à ce sujet.
Baignant dans une atmosphère de réalisme magique, Un soir, un train retombe cependant sur ses pieds dans ses dernières scènes. Les événements étranges vécus par Mathias depuis sa descente du train trouvent un sens. De fait, un indice sur le dénouement est donné en cours de film, mais peut passer inaperçu aux yeux du spectateur inattentif (que j’étais lors de ma première vision). Un dénouement qui ne surprendra pas les amateurs de littérature fantastique et de nouvelles à chute, mais l’intérêt ne se situe pas là : ce n’est pas un film de M. Night Shyamalan… Par ailleurs, la scène se déroulant au théâtre d’Anne, où Mathias fait une remarque sur la nature du texte joué (Elckerlijc, pièce en vieux néerlandais datant de la Renaissance, où la Mort, sur ordre divin, fait voyager un monsieur tout-le-monde) s’avère elle aussi porteuse d’un sens métaphorique. L'ensemble acquiert une dimension tragique qui achève de rendre le film inoubliable.
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Une remarque annexe : la copie du film que je me suis procurée est un fichier .avi très probablement créé à partir du repiquage d’un enregistrement VHS, lors d’une diffusion du film à la télévision, du temps où les magnétoscopes existaient. Est-ce dû à la diffusion ou à la cassette ? L’image vidéo y prend des airs de palimpseste, avec d’autres images apparaissant en transparence : des pages de livre, une publicité pour Panzani… Ces images rémanentes intervenaient de manière judicieuse par moment (souvent non), et laissaient l’impression d’une autre réalité, sous-jacente et inaccessible, effet non dénué d’à-propos quant au twist final d’Un soir, un train.
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https://books.google.ro/books?id=H-uSh3a_HdsC&pg=PA49&lpg=PA49&dq=delvaux+film+un+soir+un+train+blog+en+francais&source=bl&ots=_GBVyK-He0&sig=ACfU3U2nbHSGvrbXO_vTQusrkOBgaOrXQQ&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwiNxJ6vjeTpAhVvyaYKHRL_BHUQ6AEwA3oECCgQAQ#v=onepage&q=delvaux%20film%20un%20soir%20un%20train%20blog%20en%20francais&f=false
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Un soir, un train par Daisne

Marcel Brion (Préfacier, etc.)Maddy Buysse (Traducteur)Jacques De Decker (Auteur de la postface, du colophon, etc.)
EAN : 9782870279601
108 pages
Éditeur : COMPLEXE (16/02/2003)

Le sommeil gagne un compartiment, un wagon, un train entier. Que signifie cet étrange phénomène ? Le narrateur se trouvera deux compagnons, un aîné et un cadet, pour vivre une aventure dont la dimension prendra, au-delà d'un symbolisme évident, un sens métaphysique. L'univers de Daisne est à double fond. En surface, la réalité quotidienne, banale, qu'il perçoit avec une fidélité scrupuleuse. Daisne a le regard sans faille du vrai romancier. Rien ne lui échappe, tout est consigné de ce que le monde offre en spectacle. Mais, justement, cette réalité immédiate n'est, pour Daisne, qu'un spectacle. Il y a, derrière tout cela, les coulisses, une réalité seconde, une machinerie dérobée au témoin distrait, une magie. Proche des romantiques allemands et des romanciers d'aventure anglais, admirateur sans réserve de Pierre Benoît, autour duquel il a construit un roman se déroulant pour une grande part dans le Pays basque, Johan Daisne, qui s'éteignit à Gand en 1978, appartenait à la lignée des conteurs purs, des princes de l'imaginaire.
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Mercredi, 9 Octobre, 2002

LA MORT D'ANDRÉ DELVAUX

Le réalisateur belge André Delvaux est mort vendredi soir d'une crise cardiaque, alors qu'il participait à une rencontre mondiale sur l'art à Valence (Espagne). Né en 1926 à Héverlé, près de Louvain, cet homme, dont la culture n'avait d'égale que la modestie, avait étudié la philologie germanique et le droit à l'Université de Bruxelles tout en pratiquant le piano et la composition au Conservatoire royal. La musique restera une de ses passions, ses films en témoignent, mais se verra vite rejointe par une autre quand, professeur de langues, il fait tourner des films en 16 millimètres à ses élèves, dès 1956. Se prenant au jeu, il anime, là encore avec dix à quinze ans d'avance, un séminaire sur le langage cinématographique à l'Université de Bruxelles, tout en réalisant divers courts métrages dont, pour la télévision, des séries consacrées à Fellini (1960), Jean Rouch (1962), au cinéma polonais (1964) et aux métiers du cinéma (Derrière l'écran est une sorte de " making off " des Demoiselles de Rochefort).
La consécration vient dès son premier long métrage, tourné en flamand, l'Homme au crâne rasé, en 1966. Le cinéma belge est alors terra incognita, bien des spectateurs ayant oublié que Jacques Feyder était belge et que, avant Delvaux, Paul Meyer et Henri Storck avaient déjà donné des ouvres majeures. Cette histoire d'amour fou, à la rencontre du surréalisme et de descriptions précises mais hypothétiques comme en produit alors le nouveau roman, marque à elle seule l'entrée d'un cinéma authentiquement belge sur la scène internationale. Un soir un train, film francophone réalisé deux ans plus tard, confirme l'importance de Delvaux. Sa petite musique intérieure s'affirme dans une grande attention à la composition plastique, aux sons, aux bruits, dans un voyage hors des lieux et du temps qui voit se rencontrer comme dans un brouillard Yves Montand et Anouk Aimée. C'est toujours entre rêve et réalité, entre passé et présent, dans une Flandre automnale prégnante plus que présente, que se déroule Rendez-vous à Bray (1971), tiré d'une nouvelle de Julien Gracq, où le héros devient pianiste et accompagnateur de films muets, ce que fut Delvaux à la Cinémathèque royale. Après Belle (1973), qui porte à sa quintessence la manière de l'auteur, l'ouvre devient plus rare, se résumant à trois titres importants, Femme entre chien et loup, en 1979, Benvenuta, en 1983, et l'Ouvre au noir, d'après Marguerite Yourcenar, en 1988. Cela n'a en rien diminué une activité par ailleurs foisonnante. André Delvaux était ce discret voisin de palier à la voix douce et au costume passé, dont vous mettez vingt ans à découvrir qu'il est célèbre, mais il était partout (le lieu de son décès en témoigne), ambassadeur de la culture belge dans ce qu'elle a connu de meilleur. N'aurait-il réalisé que les films qu'on ne cite jamais (son magnifique court métrage consacré au grand peintre Dierick Bouts, en 1975, ou To Woody Allen from Europe with Love, en 1980) que son nom mériterait d'être retenu.
Jean Roy

luni, 1 iunie 2020

TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)

LE FILM NOIR

TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)

La limousine d’un riche promoteur explose à Los Robles, une petite ville située à la frontière du Texas et du Mexique. Vargas (Charlton Heston), un enquêteur mexicain qui passe sa lune de miel à cet endroit, est témoin de l’attentat. Il propose son aide au shérif américain Hank Quinlan (Orson Welles), mais prend rapidement la mesure de ses préjugés racistes et de ses méthodes de travail plutôt douteuses. Constatant que Quinlan a forgé de toutes pièces des preuves pour accabler un suspect, il décide de s’emparer de l’affaire. Pour Grandi (Akim Tamiroff), le patron d’une filière de drogue, c’est là une occasion rêvée pour proposer un marché à Quinlan. Vagas est en effet devenu leur ennemi commun – et une cible idéale que son union à une jeune Américaine, Susan (Janet Leigh), rend particulièrement vulnérable. [Film Noir 100 All-Time Favorite – Paul Duncan, Jürgen Müller – Edition Taschen – (2013)]
TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Dix années séparent Touch of evil de Macbeth, le précédent film hollywoodien d’Orson Welles. Celui-ci n’a au cours de cette décennie tourné que deux films, Othello (1952) et Mr. Arkadin (1955), réalisés dans des conditions techniques et financières souvent très difficiles, C’est pourtant avec un certain enthousiasme que les dirigeants de l’Universal vont accepter que Welles réalise le film. À ce propos les hypothèses demeurent nombreuses. L’hypothèse habituellement retenue veut que ce soit Charlton Heston qui ait conseillé Welles comme metteur en scène lorsqu’on lui proposa le rôle de Vargas en lui indiquant que Welles serait son partenaire. Il est également possible que le producteur Albert Zugsmith ait engagé de lui-même Welles qui venait de jouer dans Man in the Shadow/Pay the Devil (Le Salaire du diable) de Jack Arnold dont il était déjà, quelques mois plus tôt, le producteur. Autre éventualité : Heston n’aurait accepté le rôle que si Welles réalisait le film, le cinéaste ayant de son côté déjà repoussé l’offre de jouer Quinlan… [Le film noir – Patrick Brion – Editions de la La Martinière (2004)]
TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Si Albert Zugsmith a visiblement été heureux que Welles réalise le film, les financiers de l’Universal sont, en revanche, moins rassurés, craignant que l’auteur de Citizen Kane embarque la compagnie dans une aventure dispendieuse. Le tournage commence le 18 février 1957 en studio, et Welles, plus habile que jamais, tourne en quelques heures plusieurs pages de scénario, réalisant en un jour ce qui était prévu en quatre. Le fait que Welles ait fait des répétitions très précises, l’utilisation de plans séquences superbement maîtrisés – il s’agit de la scène de l’arrestation de Manolo Sanchez, une scène où s’affrontent déjà Vargas et Quinlan – et l’efficacité du chef opérateur Russell Merry ont permis cette véritable prouesse. Techniquement, la scène est d’ailleurs admirable, les différents personnages évoluant autour de la caméra se rapprochant, s’éloignant, revenant, circulant autour de cette caméra plus présente que jamais. Les rapports des espions envoyés par la direction de la compagnie rassurent les inquiets, comme si Welles avait changé… Le cinéaste a désormais la paix. Il va pouvoir tourner son film comme il le veut. Il choisit alors de quitter le studio, où on peut trop facilement le surveiller, et de transporter son équipe à Venice – c’est Aldous Huxley qui lui avait conseillé cette petite ville – et de tourner de nuit, ce qui élimine encore plus les interférences entre la direction et lui. Comme le constatait Janet Leigh : « Ils ne surent jamais exactement ce qui se passait. » À la fin du tournage de nuit, dans la journée, Welles, au lieu de se reposer, réécrit le scénario apportant à la fin de l’après-midi aux acteurs et aux techniciens les nouvelles pages de celui-ci. « Il avait pris, déclarait son assistant Terry Nelson, la maîtrise absolue de la création en réécrivant si constamment que personne d’autre que lui ne savait au juste ce dont on aurait besoin.» [Le film noir – Patrick Brion – Editions de la La Martinière (2004)]
TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Metteur en scène et scénariste du film, Welles sait également que le fait qu’il joue l’un des rôles principaux empêche, en cas de problème, l’Universal de le remplacer à moins de retourner toutes les scènes déjà réalisées… L’interprétation est elle-même un curieux mélange. Welles a insisté pour avoir son vieil ami Akim Tamiroff, Joseph Cotten apparaît dans un petit rôle, MarIene Dietrich elle-même accepte un troublant rôle de composition en souvenir de celui qui fut son partenaire et Dennis Weaver crée un stupéfiant personnage de veilleur de nuit halluciné que le cinéaste développe, en fonction des qualités du comédien. Janet Leigh, choisie par le studio, se casse le bras gauche peu de temps avant le début du tournage alors qu’elle interprétait à la télévision avec Jesse White une scène de Carnage from Britain. Cet accident excite l’imagination de Welles qui refuse avec raison de se séparer de l’actrice et hésite à la faire jouer le bras en écharpe alors qu’elle interprète dans le film une jeune mariée en voyage de noces. Le bras de Janet Leigh est finalement plâtré, et l’on s’arrange pour qu’il soit invisible pour la caméra ou caché sous l’imperméable que l’actrice porte sur son bras gauche. Le plâtre ne sera enlevé au cours du tournage que très brièvement, lors de la réalisation de la scène du motel, où Susan est attaquée par le gang d' »Oncle Joe » Grandi. [Le film noir – Patrick Brion – Editions de la La Martinière (2004)]
ON SET – TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Le 14 mars, Welles tourne ce qui va être le premier plan du film, un admirable plan séquence de plus de trois minutes qui cadre successivement la bombe – des bâtons de dynamite -, l’assassin en train de la mettre dans la voiture, Vargas et sa femme, Linnekar et sa compagne Zita, la caméra semblant se jouer des immeubles, passant d’une rue à une autre, cadrant des figurants en un ballet virtuose, en un fascinant exercice de style. Le tournage se déroule sans problèmes, mais le prémontage déplaît aux dirigeants de l’Universal qui décident alors de faire remonter le film sous la direction d’Ernest Nims, l’un des responsables de la production, et de faire tourner des séquences supplémentaires par Harry Keller, l’un des cinéastes habituels de la firme. Charlton Heston et Janet Leigh, prêts à refuser de participer à ces nouvelles scènes, découvrent que leurs contrats ne leur laissent aucun choix. Ils constatent d’ailleurs que Keller – réalisateur de films intéressants comme The Unguarded MomentQuantez et The Female animal – est, sans posséder le génie de Welles, un excellent technicien. Welles a compris que, de toute façon, l’Universal ne lui permettrait pas de réaliser lui-même ces nouvelles scènes. Il part au Mexique poursuivre l’aventure de son Don Quichotte, en Louisiane interpréter, sous la direction de Martin Ritt, The Long hot summer (Les Feux de l’été) puis, en décembre 1957, pour l’Italie. [Le film noir – Patrick Brion – Editions de la La Martinière (2004)]
TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Le film est distribué dans une première version de 93 minutes. Par la suite, une version plus complète, de 108 minutes, est retrouvée. Elle a l’avantage de posséder des scènes nouvelles et des morceaux de scènes qui ne figuraient pas initialement, mais qui ne sont pas nécessairement de Welles mais également de Harry Keller. Parmi ces nouvelles scènes, une conversation entre Quinlan et Vargas sur le rôle et la nature de la police, une autre entre Vargas et sa femme – cette séquence-là est de Keller -, l’explication donnée par Menzies à Susan de la blessure à la jambe de Quinlan, une brève scène entre le veilleur de nuit et Vargas, et le moment où Menzies est « branché » avec l’aide de Vargas, à la fin. Interrogé sur les rapports qui existent entre le roman originel et son scénario, Welles déclarait : « Mon Dieu ! Je n’ai jamais lu ce roman ; je n’ai lu que le scénario de l’Universal. Le roman a peut-être un sens, mais le scénario était ridicule. Tout se passait à San Diego et non sur la frontière mexicaine, ce qui change tout à fait la situation. La raison qui m’a poussé à faire de Vargas un Mexicain est d’ordre politique, je voulais montrer comment Tijuana et les villes frontières sont corrompues par toutes sortes de micmacs plus ou moins publicitaires sur les relations américaines ; c’est là la seule raison. » [Le film noir – Patrick Brion – Editions de la La Martinière (2004)]
ON SET – TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
La vérité est un peu plus complexe car le résultat final bénéficie tout à la fois du roman de Whit Masterson, du scénario original de Paul Monash, trop souvent oublié, et évidemment de celui de Welles. Sans vouloir exagérément rentrer dans les détails, on peut noter que, dans le roman, l’assassinat du début, la machination du policier pour faire accuser le fiancé de la fille de la victime et les rapports entre les différents policiers sont déjà parties intégrantes de l’action. Le scénario de Monash diffère du roman en rendant responsable du meurtre de Linnekar le jeune garçon soupçonné par Quinlan – auquel il donne déjà raison, avant même que Welles ne s’intéresse au film – et en développant le rôle de la famille Grandi. Le scénario se termine – déjà, aussi — par une « épitaphe » laudatrice de Quinlan. [Le film noir – Patrick Brion – Editions de la La Martinière (2004)]
TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Totalement revu par Welles, le nouveau scénario développe d’une manière assez curieuse les relations entre Vargas et Quinlan, les posant avant tout sur le thème de l’antagonisme racial. Les deux policiers finissent d’ailleurs par se ressembler en plusieurs points. L’un et l’autre sont des fanatiques de la loi et de l’ordre, prêts à tout sacrifier pour les faire régner. Quinlan n’hésite pas à fabriquer des preuves lorsqu’il n’en possède pas pour légitimer ses « intimes convictions », le paradoxe voulant ici que ce soit lui qui ait raison et que Je jeune Mexicain qu’il a fait inculper avec de fausses preuves soit réellement l’assassin. De son côté, Vargas sacrifie son voyage de noces et la sécurité de sa propre femme, Susan, à la haine qu’il porte à la famille Grandi qu’il est prêt à rendre responsable de tous les maux. L’égoïsme de Vargas et le fait que Quinlan soit, à la fin, trahi par Menzies, son propre ami, manipulé par Vargas, contribuent à rendre plus ambiguës les relations entre Quinlan et Vargas. [Le film noir – Patrick Brion – Editions de la La Martinière (2004)]
ON SET – TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Orson Welles s’est toujours défendu d’avoir voulu rendre sympathique Quinlan. « Moi, disait-il, je crois en tout ce que dit le personnage joué par Heston. Ce que dit Vargas, je pourrais le dire moi-même. Il parle en homme élevé selon la tradition libérale classique, qui est absolument mienne, Donc, l’angle sous lequel il faut prendre le film est que, quoi que dise Vargas, il est mon porte-parole. Aussi, vaut-il mieux voir un meurtrier libre que la police autorisée à abuser de son pouvoir. Pour moi, Quinlan est l’incarnation de tout ce contre quoi je lutte, politiquement et moralement parlant. Je suis contre Quinlan parce qu’il veut s’arroger le droit de juger.»
À la fin du film, pourtant, Tanya (Marlene Dietrich), parlant au policier Schwartz, lui dit à propos de Quinlan : « C’était un homme. Mais quelle importance peut avoir ce qu’on dit de quelqu’un ? »  Marlène Dietrich a elle-même reconnu : « Je pense que je n’ai jamais dit une ligne aussi bien que la dernière du film. » La manière dont Welles – âgé de quarante-deux ans au moment du tournage, en 1957 – interprète Quinlan demeure à l’origine de cette ambiguïté. Comme Charles Foster Kane, comme Macbeth, comme Arkadin, comme Falstaff, Hank Quinlan est quelqu’un à qui l’on peut beaucoup pardonner car c’est un homme hors du commun, un de ces héros shakespeariens dont la démesure les fait échapper aux normes classiques et les rend – malgré tout – fascinants. [Le film noir – Patrick Brion – Editions de la La Martinière (2004)]
TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
De tous les films de Welles, Touch of evil est sans aucun doute le plus noir, le plus cauchemardesque, encore plus kafkaïen que ne le sera Le Procès. La petite ville de Los Robles, une de ces bourgades frontières à mi-chemin entre les États-Unis et le Mexique, symbolise la corruption et la pourriture, physique et morale. On y assassine à la dynamite une puissance locale et sa compagne, on cherche à y vitrioler un policier et, à quelques kilomètres, le motel où se réfugie Susan est le lieu d’un véritable ballet diabolique où se mêlent la xénophobie, le sexe et la drogue. L’apparition de Mercedes McCambridge et de ses deux compagnes établit d’un coup qu’elle est lesbienne, une « butch » qui avoue à propos de ce qui menace la blonde Janet Leigh : « Le plaisir ne fait que commencer » puis « Laissez-moi rester ! Je veux regarder ! ». Quelques mois après Touch of evil, Janet Leigh s’arrêtera pour son malheur au Bates Motel dans Psychose, d’Alfred Hitchcock, la présence de la même actrice établissant soudain de curieux liens entre ces deux films, renforcés par le fait que le veilleur de nuit halluciné campé par Dennis Weaver peut avoir influencé Hitchcock dans sa manière de diriger Anthony Perkins. [Le film noir – Patrick Brion – Editions de la La Martinière (2004)]
ON SET – TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
En dépit de la violence oppressive, de l’atmosphère malsaine des scènes du motel et de la véritable inquiétude engendrée par la présence de ce gang de blousons noirs criminels, Touch of evil ne sembla pas avoir particulièrement choqué ni les censeurs de l’époque ni les dirigeants de l’Universal, plus enclins à reprocher au film de Welles son style que sa violence… [Le film noir – Patrick Brion – Editions de la La Martinière (2004)]
Avec Touch of evil, Welles clôture avec logique la période du film noir classique. Il pousse également à son paroxysme le thème central de ces films, à savoir le doute sur la capacité de l’homme à appréhender la réalité au monde moderne. Les perspectives extrêmes et le recours à un objectif déformant à grand angle renforcent l’impression d’excentricité qui se dégage de personnages parfois parodiques. Les travellings au rythme effréné et la profondeur de champ exceptionnelle rendent difficile l’orientation visuelle et révèlent l’absurdité de toute quête de vérité. Los Robles, ville frontalière miteuse, devient le symbole d’un monde chaotique où les frontières entre le bien et le mal sont depuis longtemps estompées. À la fin du film, lorsque Quinlan, allongé dans les marécages souillés par les ordures, meurt d’une balle tirée par son seul ami, il échappe à une condamnation morale manifeste. Comme le fait remarquer judicieusement son ancienne maîtresse Tanya (Marlene Dietrich) : « C’était un homme bien particulier. » [Film Noir 100 All-Time Favorite – Paul Duncan, Jürgen Müller – Edition Taschen – (2013)]
ON SET – TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Dans le rôle de Hank Quinlan, Welles fait une de ses performances les plus convaincantes. Son énorme ventre, sa claudication, ses yeux mi-clos et son goût pour les cigares et les sucreries, tout contribue à construire un personnage à la fois effrayant et minable mais qui peut pourtant émouvoir lorsqu’il exprime sa nostalgie pour la femme qu’il a perdue quelques années auparavant. Tanya, la diseuse de bonne aventure et Menzies, son adjoint, témoignent qu’il peut aussi inspirer de l’affection et du dévouement. Les personnages secondaires sont également essentiels pour étayer l’atmosphère sombre du film ; l’obscène et vulgaire Grandi avec ses cheveux plaqués et huileux ; sa bande de jeunes sadiques dont une lesbienne ; le gardien de nuit débile du motel à l’élocution confuse et au discours incohérent. Welles fait de Quinlan une figure imposante et énergique dont le visage reflète l’ancienne mais intense angoisse provoquée par le mystérieux meurtre de sa femme ainsi que la corruption fatale qui va le détruire. L’image de Quinlan titubant dans la rivière boueuse et pleine de détritus pour y mourir est lin moment à la fois grotesque et tragique, souligné par l’épitaphe de Tanya : « Ca c’était un homme »[Film Noir 100 All-Time Favorite – Paul Duncan, Jürgen Müller – Edition Taschen – (2013)]
TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Welles s’est surpassé pour démontrer qu’il demeurait un artiste crédible, capable d ‘attirer le public. Après des années de fumisteries autodestructrices et quelques bégaiements créatifs, ce modeste thriller de série B permit au génie de faire son retour dans le cinéma. Voilà un homme dont le premier film, Citizen Kane, changea pour toujours la grammaire cinématographique, et qui offre au film noir sa syntaxe : la ténébreuse quête de vérité sur des terres où l’ambiguïté morale fait loi, l’acceptation cynique de la corruption par le pouvoir, le style visuel anti-conventionnel et avant-gardiste. Avec Touch of evil, le plus influent des réalisateurs contemporains se retrouvait à travailler pour le producteur Albert Zugsmith, qui allait enchaîner sur des chefs-d’œuvre tels que Sex kittens go to college et The Incredible sex Revolution[Dark City, Le monde perdu du film noir – Eddie Muller – Rivages Ecrits / Noirs (2015)]
ON SET – TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Après avoir passé la plus grande partie des années 1950 en exil en Europe, Welles retourna en Amérique, paranoïaque, alcoolique et avec le fisc aux fesses : il était donc obligé de faire l’acteur pour des raisons alimentaires. Zugsmith lui proposa le rôle de Quinlan, et Welles, qui manœuvrait pour faire son come-back chez les majors, répondit qu’il reprendrait le script, mettrait en scène et jouerait juste pour son seul cachet d’acteur. Il transforma un film supposé mettre en valeur Charlton Heston (qui venait de terminer The Ten commandments en une espèce d’auto-flagellation assez ubuesque. [Dark City, Le monde perdu du film noir – Eddie Muller – Rivages Ecrits / Noirs (2015)]
ON SET – TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
En effet, la corruption de Quinlan fait écho à la propre disgrâce de Welles. Comme Quinlan, Welles mena une carrière faite de concessions, dans laquelle son flair fantastique, et une ostentation flagrante furent perçus comme du travail d’orfèvre très élaboré. Comme Quinlan, il s’entoura de béni-oui-oui qui adulaient son brio, aussi artificiel soit-il. Comme Quinlan, il mentait scandaleusement sur quiconque osait critiquer ses méthodes de travail ou ses habitudes personnelles. [Dark City, Le monde perdu du film noir – Eddie Muller – Rivages Ecrits / Noirs (2015)]
TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
Regarder Touch of evil revient à boire du vin millésimé juste avant qu’il ne tourne au vinaigre. C’est entêtant, fort en goût et plein de personnalité, tout en laissant un arrière-goût un peu nauséeux. La réalisation est enivrante, parfois magnifique, mais quand on sait que ce film conclut la carrière hollywoodienne d’Orson Welles, on reste sur une douloureuse gueule de bois. Alors qu’il aurait pu être l’artiste le plus original du siècle, Welles gâcha son talent, à cause de son ego et de ses ambitions incontrôlables, en productions intéressantes mais décevantes. C’était un sacré bonhomme, mais finalement à quoi bon dire ça ? [Dark City, Le monde perdu du film noir – Eddie Muller – Rivages Ecrits / Noirs (2015)]
TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)
LES EXTRAITS
FICHE TECHNIQUE DU FILM
ON SET – TOUCH OF EVIL (La Soif du mal) – Orson Welles (1958)

THE LADY FROM SHANGHAI – Orson Welles (1947)
« Si j’avais pu prévoir où tout cela me mènerait, je ne me serais jamais lancé dans cette aventure… si j’avais gardé ma lucidité je veux dire. Mais dès que je l’ai vue, dès la première minute, mon esprit chavira, et il me fallut pas mal de temps pour retrouver la raison. »

LE POLAR NOIR
Dans le film noir, le rôle du policier est généralement de traquer le tueur ou d’empêcher le journaliste ou le détective privé de mener sa propre enquête. Cependant, certains films révèlent également la face obscure de la police, comme On Dangerous ground (La Maison dans l’ombre, 1952), dans lequel Robert Ryan incarne un flic ,brutal qui trouve la rédemption lorsqu’une jeune aveugle (Ida Lupino) lui ouvre les yeux. D’autres montrent des policiers si obsédés par leur travail qu’ils vont plus loin que leurs supérieurs ou la loi ne le permettent, comme Nocturne (1946), The Hunted (1948), Naked alibi (Alibi meurtrier, 1954) ou le fameux The Big combo (Association criminelle, 1955). Même un bon flic cherchera vengeance si on le pousse trop loin, comme on le voit dans The Big heat (Règlement de comptes, 1953) et Rogue cop (Sur la trace du crime, 1954), tous deux tirés de romans de William P. McGivern, dans lesquels un policier venge la mort d’un membre de sa famille. Il advient même que, corrompu par le pouvoir qu’ils détiennent, les dépositaires de la loi deviennent eux aussi des hors-la-loi. Dans I Wake up screaming (Qui a tué Vicky Lynn ?, 1941), le héros (Victor Mature) s’évade de prison pour prouver son innocence, mais est poursuivi par un inspecteur peu scrupuleux (Laird Cregar). Dans The Prowler (Le Rôdeur, 1951}, un policier (Van Heflin) séduit une femme au foyer (Evelyn Keyes), puis décide de tuer son mari. Dans Shield for murder (Le Bouclier du crime, 1954), le lieutenant Barney (Edmond O’Brien) abat un bookmaker et fait passer le meurtre pour de la légitime défense. Mais le flic ripou par excellence est Hank Quinlan (Orson Welles) dans Touch of evil (La Soif du mal, 1958). D’autant plus intéressant que Welles le rend plus humain, Quinlan fascine par son ambiguïté morale, thème exploré plus avant dans Coup de torchon (1981) et Bad Lieutenant (1992).