Un cinéaste dépressif fuit le monde du cinéma et se réfugie dans un univers peuplé de souvenirs et de fantasmes. Surgissent des images de son passé, son enfance et l'école religieuse de sa jeunesse, la Saraghina qui dansait sur la plage pour les écoliers, ses rêves fous de « harem », ses parents décédés. Dans la station thermale où il s'est isolé, son épouse Luisa, sa maîtresse Carla, ses amis, ses acteurs, ses collaborateurs et son producteur viennent lui tourner autour, pour qu'enfin soit réalisé le film sur lequel il est censé travailler. (w.fr.)
Trama
Una scena del film
Guido Anselmi, un affermato regista di quarantatré anni, sta elaborando il suo prossimo film. Egli si trova a trascorrere un periodo di riposo in una stazione di cure termali (il set reale fu ambientato nel Lazio, e principalmente a Roma[2]). Guido cerca in quella località di coniugare i propri problemi fisici (stanchezza cardiaca) con quelli della produzione del film, ancora allo stato di preparazione.
La quiete che vorrebbe è continuamente minata dalla presenza delle maestranze del film (produttore, tecnici, attori) che soggiornano nel suo stesso albergo e che vedono in lui l'unico appoggio sicuro. Ma il suo spirito creativo si è inaridito e non riesce a dare una direzione chiara al suo progetto cinematografico. Oltretutto, ai suoi problemi professionali si aggiungono grattacapi sentimentali.
L'amante lo raggiunge alle terme e poco dopo arriva anche sua moglie. Sollecitato dal produttore, interrogato dai suoi assistenti e dagli attori che vogliono capire quale storia stia per raccontare, quali intenzioni vorrebbe esprimere, cerca di imbastire alla meglio una trama: un bilancio fatto di rapporti con personaggi reali e di fantasticherie, ricordi, sogni, che si inseriscono all'improvviso negli avvenimenti concreti delle sue giornate e delle sue notti. Dei suoi sogni fanno parte i ricordi del padre e della madre, morti, con i quali egli discorre teneramente, come con persone vicine.
Continui dubbi e incertezze si palesano attraverso una crisi esistenziale senza via d'uscita, in cui non riesce a dare un senso al suo rapporto con gli altri e al suo passato. E tutto questo non fa che rendere consapevole quello smarrimento che egli si porta dentro da anni e che le cure della esistenza quotidiana e del lavoro avevano in parte mascherato. In un onirico, fatato affresco di immagini si alterna un centinaio di personaggi di contorno tra cui spiccano: un intellettuale, che gli è stato messo alle calcagna dal produttore, la moglie, l'amante e la protagonista femminile del film in produzione.
Marcello Mastroianni in una scena del film
I giorni trascorrono mentre i fatti reali, i ricordi e le fantasie del regista si accavallano sempre più fino a diventare indistinguibili. Il produttore fa visionare a Guido i provini già girati, e presso la scenografia di un'enorme piattaforma di lancio per un'astronave indice una conferenza stampa in cui finalmente il regista dovrà raccontare a tutti quelle che sono le sue intenzioni riguardo al film, ma in realtà il regista è sempre più confuso, non ha idea di cosa vuole raccontare, né di come farlo.
La sua confusione professionale rispecchia la sua confusione esistenziale: è la fine della sua carriera e della sua stessa vita: egli decide di abbandonare la regia del film durante la conferenza stampa. Ma proprio quando tutto sembra essere finito, quando i giornalisti si sono allontanati e le maestranze iniziano a smontare il set di un film che non si farà più, Guido ha la percezione che tutto quello che gli accade intorno, tutte le persone che ha conosciuto e che con lui hanno percorso la strada della vita, nel bene e nel male, sono parte di lui.
Tutti insieme in un girotondo circense roteano intorno a lui, che li dirige, ma che da loro riceve, un dare-avere indistinguibile. Nel carosello finale con tutti i personaggi del film, il regista, che ha ora riconquistato l'innocenza e la gioia di vivere, si rivede bambino.(w.it)
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8½ - The First Three Minutes / clip video
https://www.youtube.com/watch?v=6TsElhgMeXE
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Analyse du scénario de 8 1/2
http://frames.free.fr/1/huitetdemi.htm
Le film 8 1/2 est présenté sur les écrans en 1963. Il s'inscrit en pleine période de modernité* pour le cinéma. Il se situe après le néoréalisme* en Italie, qui a dominé dans les années 40. Tout en étant moderne sous divers aspects, notamment en rendant actif le spectateur, le film semble être un précurseur de la vague post-moderne* des années 90. Le scénario, rédigé par Federico FELLINI lui-même, présente la même particularité et apparaît de plus comme une matrice du film dont, au fur et à mesure de l'avancée dans le récit, le long métrage s'éloigne (ce que nous analyserons en détail par la suite).
A l'aide de la retranscription d'un entretien avec Luc MOULLET dans les Cahiers du Cinéma n°216 d'octobre 1969, je me propose d'abord d'étudier les caractéristiques qui relèvent de la modernité dans le scénario de 8 1/2.
Selon Luc MOULLET, la redéfinition de la place du scénario et de sa construction dans la modernité au cinéma est indissociable d'une nouvelle conception du temps, qui doit être repensé dans ses multiples entrées : le temps de la narration, mais aussi ceux du tournage ou du personnage par exemple. La chronologie du récit et le temps de la succession lié aux contraintes de la projection sont également remis en cause. Par ailleurs, la notion de durée prédomine celle d'un récit organisé autour de péripéties, et filmer l'attente est caractéristique de la modernité. Les films ne sont ainsi pas bouclés sur eux-mêmes, mais subissent des transformations, ont un devenir. Il y a jeu sur la répétition. Comme l'indique Luc MOULLET "il peut être bon quelquefois de faire des films sur la stagnation des personnages. C'est là qu'on vérifie si le réalisateur, privé de l'alibi de l'évolution anecdotique des personnages, est capable ou non d'évoluer lui-même". Or, dans 8 1/2, précisément, l'intrigue n'avance guère. Guido, cinéaste perdu dans son imaginaire et angoissant devant les doutes qu'il exprime envers ses propres idées, évolue dans un environnement qui lui est hétérogène, et dans lequel ni sa femme Luisa, ni sa maîtresse Carla, ni même quiconque ne peut soit l'aider soit simplement le comprendre. A la manière du Signe du Lion d'Eric ROHMER, le spectateur accompagne un personnage opaque et qui est en rapport conflictuel avec son environnement. La production du film incite en effet Guido à produire une œuvre quand il est perdu et ne sait quoi réaliser tandis que les deux femmes qu'il aime le ramènent à sa condition d'éternel insatisfait. Tout le long du récit, la situation de Guido reste identique, et de nombreuses attentes sont données à voir à l'instance spectatorielle. Seul l'imaginaire de Guido grandit et l'envahit à mesure que l'histoire avance.
Ainsi, le scénario de 8 1/2 ne représente pas le trajet d'une situation initiale à une situation finale à "consommer" par le spectateur qui doit agir pour "remonter" le film après la projection. Les errances de Guido dans son univers onirique apparaissent aléatoirement à l'écran, car le spectateur suit le trajet du protagoniste qui s'avère être un rêveur. "Le film ne constitue donc qu'une première ébauche de l'opération, et la réussite de cette opération est constituée par le film plus le spectateur"*. L'holocauste décrit par Luc MOULLET est donc présent dans le scénario de 8 1/2.
Par ailleurs, l'ablation, autre caractéristique de la modernité au cinéma selon Luc MOULLET, existe également dans le scénario de Federico FELLINI. De fait, il n'y a pas d'accumulation dans le récit, mais le scénario est réduit à sa plus simple expression. Dans le film, l'imaginaire du spectateur est également développé. De plus, la caméra scrute les transformations de la "plaque sensible" que devient le corps du personnage, la priorité est clairement donnée au regard sur le monde de Guido.
Enfin, le film travaille la "mémoire du spectateur" et met en relation les images, les sons et les situations par-delà l'ordre de consécution. Le "voyage" dans l'espace-temps du film est indépendant de la construction imposée par ce dernier.
En plus des aspects modernes de l'œuvre (scénario et film), il existe à l'intérieur de celle-ci des éléments post-modernes. En effet, si la modernité au cinéma remet en cause la période préparatoire du scénario, et invoque la nécessité d'un retour au réel pour provoquer ce dernier et le questionner, 8 1/2 se présente différemment.
D'abord, le scénario n'a pas pour but de questionner le réel, puisque le film se penche sur un personnage pour en suivre les pensées, personnage qui plus est régulièrement plongé dans son imaginaire. Au contraire, le scénario met donc en place un univers inventé, avec des personnages aux caractères forts, et l'ambition est plus vaste qu'une appréhension particulière du réel. En effet, il s'agit pour Federico FELLINI de s'interroger sur le cinéma lui-même et sur sa propre carrière, le titre désignant le numéro véritable de son film -8 1/2 est bien le huitième film du réalisateur, plus le demi tourné avec Lattuada au début de sa carrière : les Feux du music-hall en 1950. Dès lors, le parcours du personnage principal, réalisateur perdu dans son propre imaginaire qui ne cesse de le renvoyer à son vécu, se révèle être le prétexte d'une réflexion sur le septième Art, avec son cortège de pressions de la part de la production ou encore avec les incertitudes du réalisateur, créateur confronté comme tel aux affres de la page blanche. Ce vide, d'ailleurs recherché par les cinéastes de la modernité avec le refus de l'accumulation au profit d'une épuration visuelle dans la mise en scène, fait écho à la simplicité du scénario de 8 1/2.
Ensuite, la période préparatoire du scénario n'est pas réellement remise en cause, mais au contraire est une base forte de laquelle le réalisateur s'éloigne au fur et à mesure du tournage. Aussi le récit décrit dans les premières pages du scénario de 8 1/2 ressemble-t-il à s'y méprendre à celui du film, tandis que plus le lecteur avance dans les pages du scénario et dans le film, plus ces deux matières s'éloignent l'une de l'autre. La fin, dans le scénario, ne correspond pas du tout à celle visible dans le film, du moins en terme de lieux et de dialogues. Il reste toutefois la logique inhérente à l'histoire elle-même, avec le film de Guido qui ne se concrétise finalement pas et le couple Guido / Luisa qui rompt, mais les scènes sont totalement différentes. Le personnage de Guido tel qu'il est décrit dans le scénario s'écarte également progressivement de son double cinématographique. Ce dernier semble beaucoup plus détaché par rapport à sa vie et le film qu'il doit réaliser, et apparaît globalement plus las que son homonyme.
ANALYSE DU SCÉNARIO
A présent que le contexte du scénario a été mis en place, il s'agit de décrire la forme que revêt ce scénario pour mieux l'approcher.
Dans le scénario de 8 1/2, les changements de lieux déterminent la segmentation du récit. Chaque nouveau lieu est écrit en gras, et est précédé d'un espace vide important. A chaque fois, sont ajoutés au lieu le moment de la journée (jour, nuit,…), ainsi que les termes "intérieur" ou "extérieur", en fonction de la position des personnages.
Les segments comprennent une description générale de ce qui se passe et éventuellement des dialogues. Les notations référant aux personnages sont inclues dans les descriptions générales de chaque segment.
De cette manière, la construction dramatique s'effectue quasiment comme dans un livre. Mis à part les changements de lieux qui découpent l'histoire et la présence systématique des noms des personnages devant chacune de leur réplique, le scénario ressemble à un roman dans son architecture. Cependant, la description pure des événements n'est jamais commentée par un quelconque narrateur, et le lecteur doit découvrir et ressentir lui-même les enjeux.
La focalisation est réalisée sur Guido, mais de façon nuancée. En effet, seules de petites touches permettent de la saisir. Les émotions des différents personnages étant brièvement retranscrites, mais d'une manière extérieure -"Carla répond avec le ton d'une petite fille qui pleure", ce sont certaines phrases qui permettent de s'apercevoir que le point de vue tend vers Guido : "ce grand corps blanc de femme, doux et abandonné, qui se distingue presque nu dans la pénombre, fascine aussi bien [les] yeux [de Guido] que son esprit".
Le spectateur, dans le scénario, doit deviner les évolutions du protagoniste au fil des événements. Il est obligé de réfléchir et de se remettre en tête les différents éléments régulièrement. Rien n'est donné à comprendre immédiatement. Les souvenirs de Guido s'entremêlent cycliquement avec la réalité dans laquelle le personnage voit son couple se désagréger et son projet de film autobiographique disparaître car jugé vain par Guido lui-même. Aussi la place du spectateur est-elle celle d'une personne active.
Aucune notation sonore particulière n'apparaît dans le scénario de 81/2, excepté une musique qui se trouve notée dans la description générale du segment situant l'action dans le jardin des thermes, mais une musique diégétique* provenant d'un orchestre -à noter de plus que cela a lieu au début du scénario, lorsque ce dernier et le film restent proches.
CONFRONTATION D'UN FRAGMENT DU SCÉNARIO
AUX SÉQUENCES CORRESPONDANTES
Je vais maintenant confronter la conclusion de l'histoire dans le scénario avec celle du film. Cela permettra de mieux cerner le rôle et la place du scénario de 8 1/2 par rapport au film. Etant donné que les structures du scénario et du film s'éloignent progressivement l'une de l'autre, il apparaît intéressant de réfléchir sur les différences de traitement entre les deux constructions narratives au niveau de la fin du récit.
Je me penche d'abord sur la structure du film. La présentation de l'extrait de film choisi, comme le film dans sa globalité, diffère de celle du scénario.
Dans le scénario, la segmentation est déterminée par les changements de lieux. Dans le film, cette contrainte est inexistante, les segments correspondent plus à des séquences de film, délimitées tantôt par les changements de lieux, tantôt par des ellipses temporelles*, ou encore par des modifications d'ordre plus abstrait comme des variations d'ambiance.
La construction dramatique s'effectue autour du personnage de Guido, dont le spectateur suit le parcours, toujours dominé par l'imaginaire du protagoniste. La focalisation se tourne donc vers le point de vue de Guido, que nous suivons pas à pas. Les liens de causalité sont pratiquement inexistants, l'histoire comme les personnages stagnent du début à la fin. Le spectateur ne se souvient ainsi que d'une impression après la première projection, tout le film n'est pas "enregistré définitivement dans la conscience", pour reprendre les mots de Luc MOULLET, et "le spectateur peut retenir une impression précise [du tout que forme le film] mais il ne peut absolument pas retenir les parties".
Le spectateur est ainsi un individu actif lors de la réception du film 8 1/2, puisqu'il lui faut revoir le film pour mieux le cerner. Chaque visionnage permet d'ailleurs d'appréhender de nouveaux éléments, et rien n'est jamais tout à fait donné au spectateur, qui peut interpréter différemment certains fragments du film, comme la fin.
La bande-son joue un rôle crucial. La musique intervient presque exclusivement lorsque l'imaginaire de Guido se réveille. Elle permet parfois d'anticiper, lorsqu'elle débute sur des images retranscrivant le monde réel de la diégèse, le départ vers l'imaginaire de Guido dans un effet proleptique*. Lorsque des dialogues sont entendus tandis qu'à l'image ne correspond pas le personnage qui parle, cela peut également introduire l'univers onirique de Guido.
A présent je vais comparer les deux traitements du récit dans le scénario et le film, au niveau de la conclusion de l'histoire. Ces deux traitements s'avèrent complètement différents pour les deux supports.
En effet, dans le scénario, Guido, dans un délire imaginaire, aperçoit des journalistes présents à la conférence inaugurée autour du tournage de son film, sur le lieu où une structure gigantesque doit servir au décor d'une fusée. Les journalistes finissent par lyncher le réalisateur, après lui avoir posé des questions d'un ton agressif. Ils tuent Guido, qui, délivré, embarque seul dans un fourgon funéraire, satisfait de n'être accompagné de personne, pas même sa femme. Puis, Guido traverse avec le fourgon les lieux, les personnes et les choses de sa vie, de façon incessante, rapide et répétitive jusqu'à le faire hurler et se réveiller dans la chambre de son hôtel. Carini, sensé aider Guido au scénario, explique que le réalisateur a pris la bonne décision d'abandonner le projet de film. Guido part de l'hôtel, en passant par la salle de production de son film, où il salue les employés. Il prend un bus avec sa femme Luisa et entretient avec elle une discussion amère dans laquelle Luisa parle de séparation. Ils embarquent ensuite tous deux dans un train. La nuit, dans le wagon-restaurant, Guido se perd à nouveau dans son imaginaire. Le wagon change d'apparence, une foule y apparaît, ordonnée et silencieuse : il s'agit de tous les personnages de la vie de Guido, unis dans le même voyage et la même destination. Guido, rempli d'émotion, tente de prononcer des mots, en vain. Luisa et le serveur du wagon-restaurant le regardent, perplexes. Guido remercie la foule qu'il croit voir, sans réussir à exprimer correctement les raisons de ces remerciements. Puis il s'interrompt, lorsqu'il retourne au monde réel, avec le wagon vide. Il se rassoit, confus, mais heureux. S'il lui reste une émotion intense de son imaginaire, il est incapable de la ressaisir. Il regarde vers la foule disparue, et sert la main de Luisa.
En ce qui concerne le film, les choses ne se passent pas du tout de la sorte. Guido, dans le même délire imaginaire que celui du scénario, n'a le temps de recevoir aucune question des journalistes, car, devant la pression de la foule qui l'entoure, il met lui-même fin à ses jours. Avant de passer à l'acte en se tirant une balle dans la tête, Guido reçoit une vision de sa mère, qui tente de le rattraper sur une plage où il court ("Guido ! Où cours-tu, malheureux !"). Dans la séquence suivante, qui se situe, comme dans l'imaginaire précédent, sur le lieu de tournage où une grande structure doit accueillir une fusée factice, le producteur explique aux techniciens qu'il faut démonter la structure de fusée prévue pour le film de Guido. Ce dernier part, salue les techniciens et la production. Carini lui explique qu'il a eu raison d'abandonner son projet de film alors qu'ils montent en voiture tous deux, et que le décor tombe déjà. Carini semble faire un monologue, et Guido ne l'écoute pas du tout, tandis que dans le scénario "il n'entend peut-être (…) pas bien". Pendant le discours de Carini se met en place l'imaginaire de Guido. Le magicien rencontré à l'hôtel apparaît, puis Claudia, la femme qu'il a imaginée de toute pièce. Ensuite, il se voit enfant, aperçoit Saraghina, et ses parents. A nouveau refait surface Claudia, puis Carla et des membres de l'Eglise. La foule s'agrandit, et les personnes de l'existence de Guido se regroupent, à l'image de la foule dans le train pour le scénario. "Mais d'où me vient cette joie de vivre ?" pense Guido à cet instant. Il se sent libéré et comprend comme il est simple d'aimer. Guido trouve tout confus mais comprend que cette confusion le représente. Il perd ses angoisses. S'engage une discussion virtuelle entre Guido et Luisa dans laquelle il s'excuse et demande que sa femme l'accepte tel qu'il est. Luisa répond qu'elle veut essayer. Une musique commence en fond sonore à ce moment-là, puis apparaît le songe total de Guido dans lequel il chorégraphie un spectacle avec un orchestre et toutes les personnes ayant croisé sa vie sur le décor devant servir à la fusée. Enfin, Guido et Luisa rejoignent une danse comprenant tout le monde, se tenant par la main. Puis l'orchestre, de nuit, joue seul au milieu d'une arène, laissant ensuite Guido enfant sous les projecteurs, avant que celui-ci ne quitte à son tour l'arène.
Le traitement du film, à la différence de celui du scénario, privilégie donc un seul lieu dans une condensation de l'espace. Il donne également plus d'importance à l'univers imaginaire de Guido, laissant la réalité arriver par bribes, mais clôturant l'histoire sur le monde onirique du protagoniste, là où le scénario remettait ce dernier sur les "rails" de la réalité concrète. Le couple apparaît aussi important, mais le traitement, moins redondant quant à leur relation, est plus efficace. Globalement, le film est plus intéressant que son scénario dans sa façon de traiter l'histoire. Si en comparant scénario et long métrage correspondant, le lecteur / spectateur peut appréhender l'histoire dans un ressenti proche, le spectateur qui n'a pas lu le scénario peut interpréter les images audiovisuelles de diverses manières, là où le scénario n'offre qu'une explication.
CONCLUSION
Le scénario de 8 1/2 représente donc un fil conducteur duquel le réalisateur s'éloigne au fur et à mesure de ses envies pendant le tournage. Comme le dit Federico FELLINI lui-même : "Ce scénario, qui souhaite rendre, même approximativement, le sens du film, n'a de valeur pour moi qu'en tant que série provisoire de notes initiales pour la préparation et l'organisation de celui-ci". La place du scénario est donc bien définie, et il n'a pas de valeur en soi pour son propre créateur.
La mise en scène du film, par contre, par l'accompagnement subtil du protagoniste qu'elle permet, par le mélange visuel entre deux univers diégétiques, et par les jeux entre le son et l'image, permet une pleine exploitation du potentiel complexe du scénario, qui mélange adroitement modernité et prémices de post-modernité.
Guillaume Briquet
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* Modernité : différents facteurs déterminent l'apparition d'une modernité au cinéma au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale. D'abord, il y a la nécessité de retourner au réel après-guerre. Ensuite, les nouveaux équipements disponibles pour filmer posent la question du direct pour la bande sonore. Il y a également une mise en place de la question d'auteur qui relativise la place des scénarii et des scénaristes.
* Néoréalisme : il ne s'agit ni d'un mouvement, ni d'une école, mais d'un moment de concordance des thèmes, des regards portés sur l'Italie défaite et misérable. Il représente la pratique, également, de procédés de production nouveaux. Le tournage en extérieurs est privilégié, dans la rue, en éclairage naturel, avec des acteurs pas nécessairement professionnels, faute pour une part de décors et de moyens. S'il ne domine que dans les années 40 avec DE SICA, ANTONIONI ou ROSSELLINI, l'importance du néo-réalisme a été considérable. Voir article de Frames à ce sujet.
* Post-modernité : caractérise une période de cinéma dans laquelle certains films, en gardant des particularités de la modernité, y ajoutent une volonté non plus de se tourner vers le réel, mais vers le cinéma lui-même. Quentin TARANTINO, dans d'incessantes références aux films noirs et à de vieilles séries télévisées, est un représentant de cette tendance.
* Cf. Entretien avec Luc MOULLET dans les Cahiers du Cinéma n°216 d'octobre 1969.
* Diégèse : le monde imaginaire dans lequel évoluent les personnages d'un film. Une musique diégétique est une musique dont la source provient de la diégèse, et qui est donc perçue par les personnages et le spectateur. Ici, la source de la musique est un orchestre présent dans le cadre.
* Ellipse temporelle : permet de passer d'une séquence à une autre en ne montrant volontairement pas les événements qui se passent entre temps, dans un souci d'aller à l'essentiel et de ne faire voir que ce qui est utile à l'action, ou dans une volonté de censure.
* Effet proleptique : vise justement à faire anticiper par le spectateur des événements qui vont survenir par la suite dans le récit filmique. Il apparaît à l'aide d'éléments dans la mise en scène.
Fiche technique
- Titre original : Otto e mezzo.
- Origine : Italie - Noir & Blanc - 1 h 54 mn.
- Date de sortie France : mai 1963.
- Production : Angelo RIZZOLI.
- Réalisateur : Federico FELLINI.
- Scénario : Federico FELLINI,Tullio PINELLI et Ennio FLAIANO.
- Casting : Marcello MASTROIANNI (Guido Anselmi), Anouk AIMÉE (Luiza), Sandra MILO (Carla), Claudia CARDINALE (Claudia), Rossella FALK (Rossella), Madeleine LEBEAU (l'actrice), Caterina BORATTO (la belle inconnue), Barbara STEEL (Gloria), Mario PISU (Mezzabotta)...
- Musique : Nino ROTA.
- Box-Office France : 739.613 entrées.
- Sortie DVD : annoncée...
- Lien Internet : http://www.federico-fellini.net/filmo/filmo311.htm
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Materiale despre filmul lui Fellini in vrac.
http://cinemachoc.canalblog.com/archives/2018/08/11/36603069.html
https://www.cineclubdecaen.com/realisat/fellini/huitetdemi.htm
http://dvdtator.canalblog.com/archives/2015/09/24/32668609.html
https://newstrum.wordpress.com/2018/08/11/huit-et-demi-de-federico-fellini-la-ronde-de-la-vie/
http://chroniquesitaliennes.univ-paris3.fr/PDF/13-14/spizzo.pdf
https://www.senscritique.com/film/Huit_et_demi/critique/22698072
https://films.oeil-ecran.com/2016/05/27/huit-et-demi/
https://www.academia.edu/29550274/Federico_Fellini_th%C3%A9oricien_protagoniste_et_personnage_dans_8_1_2_et_intervista?auto=download
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8½ - The First Three Minutes / clip video
https://www.youtube.com/watch?v=6TsElhgMeXE
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Analyse du scénario de 8 1/2
http://frames.free.fr/1/huitetdemi.htm
Le film 8 1/2 est présenté sur les écrans en 1963. Il s'inscrit en pleine période de modernité* pour le cinéma. Il se situe après le néoréalisme* en Italie, qui a dominé dans les années 40. Tout en étant moderne sous divers aspects, notamment en rendant actif le spectateur, le film semble être un précurseur de la vague post-moderne* des années 90. Le scénario, rédigé par Federico FELLINI lui-même, présente la même particularité et apparaît de plus comme une matrice du film dont, au fur et à mesure de l'avancée dans le récit, le long métrage s'éloigne (ce que nous analyserons en détail par la suite).
A l'aide de la retranscription d'un entretien avec Luc MOULLET dans les Cahiers du Cinéma n°216 d'octobre 1969, je me propose d'abord d'étudier les caractéristiques qui relèvent de la modernité dans le scénario de 8 1/2.
Selon Luc MOULLET, la redéfinition de la place du scénario et de sa construction dans la modernité au cinéma est indissociable d'une nouvelle conception du temps, qui doit être repensé dans ses multiples entrées : le temps de la narration, mais aussi ceux du tournage ou du personnage par exemple. La chronologie du récit et le temps de la succession lié aux contraintes de la projection sont également remis en cause. Par ailleurs, la notion de durée prédomine celle d'un récit organisé autour de péripéties, et filmer l'attente est caractéristique de la modernité. Les films ne sont ainsi pas bouclés sur eux-mêmes, mais subissent des transformations, ont un devenir. Il y a jeu sur la répétition. Comme l'indique Luc MOULLET "il peut être bon quelquefois de faire des films sur la stagnation des personnages. C'est là qu'on vérifie si le réalisateur, privé de l'alibi de l'évolution anecdotique des personnages, est capable ou non d'évoluer lui-même". Or, dans 8 1/2, précisément, l'intrigue n'avance guère. Guido, cinéaste perdu dans son imaginaire et angoissant devant les doutes qu'il exprime envers ses propres idées, évolue dans un environnement qui lui est hétérogène, et dans lequel ni sa femme Luisa, ni sa maîtresse Carla, ni même quiconque ne peut soit l'aider soit simplement le comprendre. A la manière du Signe du Lion d'Eric ROHMER, le spectateur accompagne un personnage opaque et qui est en rapport conflictuel avec son environnement. La production du film incite en effet Guido à produire une œuvre quand il est perdu et ne sait quoi réaliser tandis que les deux femmes qu'il aime le ramènent à sa condition d'éternel insatisfait. Tout le long du récit, la situation de Guido reste identique, et de nombreuses attentes sont données à voir à l'instance spectatorielle. Seul l'imaginaire de Guido grandit et l'envahit à mesure que l'histoire avance.
Ainsi, le scénario de 8 1/2 ne représente pas le trajet d'une situation initiale à une situation finale à "consommer" par le spectateur qui doit agir pour "remonter" le film après la projection. Les errances de Guido dans son univers onirique apparaissent aléatoirement à l'écran, car le spectateur suit le trajet du protagoniste qui s'avère être un rêveur. "Le film ne constitue donc qu'une première ébauche de l'opération, et la réussite de cette opération est constituée par le film plus le spectateur"*. L'holocauste décrit par Luc MOULLET est donc présent dans le scénario de 8 1/2.
Par ailleurs, l'ablation, autre caractéristique de la modernité au cinéma selon Luc MOULLET, existe également dans le scénario de Federico FELLINI. De fait, il n'y a pas d'accumulation dans le récit, mais le scénario est réduit à sa plus simple expression. Dans le film, l'imaginaire du spectateur est également développé. De plus, la caméra scrute les transformations de la "plaque sensible" que devient le corps du personnage, la priorité est clairement donnée au regard sur le monde de Guido.
Enfin, le film travaille la "mémoire du spectateur" et met en relation les images, les sons et les situations par-delà l'ordre de consécution. Le "voyage" dans l'espace-temps du film est indépendant de la construction imposée par ce dernier.
En plus des aspects modernes de l'œuvre (scénario et film), il existe à l'intérieur de celle-ci des éléments post-modernes. En effet, si la modernité au cinéma remet en cause la période préparatoire du scénario, et invoque la nécessité d'un retour au réel pour provoquer ce dernier et le questionner, 8 1/2 se présente différemment.
D'abord, le scénario n'a pas pour but de questionner le réel, puisque le film se penche sur un personnage pour en suivre les pensées, personnage qui plus est régulièrement plongé dans son imaginaire. Au contraire, le scénario met donc en place un univers inventé, avec des personnages aux caractères forts, et l'ambition est plus vaste qu'une appréhension particulière du réel. En effet, il s'agit pour Federico FELLINI de s'interroger sur le cinéma lui-même et sur sa propre carrière, le titre désignant le numéro véritable de son film -8 1/2 est bien le huitième film du réalisateur, plus le demi tourné avec Lattuada au début de sa carrière : les Feux du music-hall en 1950. Dès lors, le parcours du personnage principal, réalisateur perdu dans son propre imaginaire qui ne cesse de le renvoyer à son vécu, se révèle être le prétexte d'une réflexion sur le septième Art, avec son cortège de pressions de la part de la production ou encore avec les incertitudes du réalisateur, créateur confronté comme tel aux affres de la page blanche. Ce vide, d'ailleurs recherché par les cinéastes de la modernité avec le refus de l'accumulation au profit d'une épuration visuelle dans la mise en scène, fait écho à la simplicité du scénario de 8 1/2.
Ensuite, la période préparatoire du scénario n'est pas réellement remise en cause, mais au contraire est une base forte de laquelle le réalisateur s'éloigne au fur et à mesure du tournage. Aussi le récit décrit dans les premières pages du scénario de 8 1/2 ressemble-t-il à s'y méprendre à celui du film, tandis que plus le lecteur avance dans les pages du scénario et dans le film, plus ces deux matières s'éloignent l'une de l'autre. La fin, dans le scénario, ne correspond pas du tout à celle visible dans le film, du moins en terme de lieux et de dialogues. Il reste toutefois la logique inhérente à l'histoire elle-même, avec le film de Guido qui ne se concrétise finalement pas et le couple Guido / Luisa qui rompt, mais les scènes sont totalement différentes. Le personnage de Guido tel qu'il est décrit dans le scénario s'écarte également progressivement de son double cinématographique. Ce dernier semble beaucoup plus détaché par rapport à sa vie et le film qu'il doit réaliser, et apparaît globalement plus las que son homonyme.
ANALYSE DU SCÉNARIO
A présent que le contexte du scénario a été mis en place, il s'agit de décrire la forme que revêt ce scénario pour mieux l'approcher.
Dans le scénario de 8 1/2, les changements de lieux déterminent la segmentation du récit. Chaque nouveau lieu est écrit en gras, et est précédé d'un espace vide important. A chaque fois, sont ajoutés au lieu le moment de la journée (jour, nuit,…), ainsi que les termes "intérieur" ou "extérieur", en fonction de la position des personnages.
Les segments comprennent une description générale de ce qui se passe et éventuellement des dialogues. Les notations référant aux personnages sont inclues dans les descriptions générales de chaque segment.
De cette manière, la construction dramatique s'effectue quasiment comme dans un livre. Mis à part les changements de lieux qui découpent l'histoire et la présence systématique des noms des personnages devant chacune de leur réplique, le scénario ressemble à un roman dans son architecture. Cependant, la description pure des événements n'est jamais commentée par un quelconque narrateur, et le lecteur doit découvrir et ressentir lui-même les enjeux.
La focalisation est réalisée sur Guido, mais de façon nuancée. En effet, seules de petites touches permettent de la saisir. Les émotions des différents personnages étant brièvement retranscrites, mais d'une manière extérieure -"Carla répond avec le ton d'une petite fille qui pleure", ce sont certaines phrases qui permettent de s'apercevoir que le point de vue tend vers Guido : "ce grand corps blanc de femme, doux et abandonné, qui se distingue presque nu dans la pénombre, fascine aussi bien [les] yeux [de Guido] que son esprit".
Le spectateur, dans le scénario, doit deviner les évolutions du protagoniste au fil des événements. Il est obligé de réfléchir et de se remettre en tête les différents éléments régulièrement. Rien n'est donné à comprendre immédiatement. Les souvenirs de Guido s'entremêlent cycliquement avec la réalité dans laquelle le personnage voit son couple se désagréger et son projet de film autobiographique disparaître car jugé vain par Guido lui-même. Aussi la place du spectateur est-elle celle d'une personne active.
Aucune notation sonore particulière n'apparaît dans le scénario de 81/2, excepté une musique qui se trouve notée dans la description générale du segment situant l'action dans le jardin des thermes, mais une musique diégétique* provenant d'un orchestre -à noter de plus que cela a lieu au début du scénario, lorsque ce dernier et le film restent proches.
CONFRONTATION D'UN FRAGMENT DU SCÉNARIO
AUX SÉQUENCES CORRESPONDANTES
Je vais maintenant confronter la conclusion de l'histoire dans le scénario avec celle du film. Cela permettra de mieux cerner le rôle et la place du scénario de 8 1/2 par rapport au film. Etant donné que les structures du scénario et du film s'éloignent progressivement l'une de l'autre, il apparaît intéressant de réfléchir sur les différences de traitement entre les deux constructions narratives au niveau de la fin du récit.
Je me penche d'abord sur la structure du film. La présentation de l'extrait de film choisi, comme le film dans sa globalité, diffère de celle du scénario.
Dans le scénario, la segmentation est déterminée par les changements de lieux. Dans le film, cette contrainte est inexistante, les segments correspondent plus à des séquences de film, délimitées tantôt par les changements de lieux, tantôt par des ellipses temporelles*, ou encore par des modifications d'ordre plus abstrait comme des variations d'ambiance.
La construction dramatique s'effectue autour du personnage de Guido, dont le spectateur suit le parcours, toujours dominé par l'imaginaire du protagoniste. La focalisation se tourne donc vers le point de vue de Guido, que nous suivons pas à pas. Les liens de causalité sont pratiquement inexistants, l'histoire comme les personnages stagnent du début à la fin. Le spectateur ne se souvient ainsi que d'une impression après la première projection, tout le film n'est pas "enregistré définitivement dans la conscience", pour reprendre les mots de Luc MOULLET, et "le spectateur peut retenir une impression précise [du tout que forme le film] mais il ne peut absolument pas retenir les parties".
Le spectateur est ainsi un individu actif lors de la réception du film 8 1/2, puisqu'il lui faut revoir le film pour mieux le cerner. Chaque visionnage permet d'ailleurs d'appréhender de nouveaux éléments, et rien n'est jamais tout à fait donné au spectateur, qui peut interpréter différemment certains fragments du film, comme la fin.
La bande-son joue un rôle crucial. La musique intervient presque exclusivement lorsque l'imaginaire de Guido se réveille. Elle permet parfois d'anticiper, lorsqu'elle débute sur des images retranscrivant le monde réel de la diégèse, le départ vers l'imaginaire de Guido dans un effet proleptique*. Lorsque des dialogues sont entendus tandis qu'à l'image ne correspond pas le personnage qui parle, cela peut également introduire l'univers onirique de Guido.
A présent je vais comparer les deux traitements du récit dans le scénario et le film, au niveau de la conclusion de l'histoire. Ces deux traitements s'avèrent complètement différents pour les deux supports.
En effet, dans le scénario, Guido, dans un délire imaginaire, aperçoit des journalistes présents à la conférence inaugurée autour du tournage de son film, sur le lieu où une structure gigantesque doit servir au décor d'une fusée. Les journalistes finissent par lyncher le réalisateur, après lui avoir posé des questions d'un ton agressif. Ils tuent Guido, qui, délivré, embarque seul dans un fourgon funéraire, satisfait de n'être accompagné de personne, pas même sa femme. Puis, Guido traverse avec le fourgon les lieux, les personnes et les choses de sa vie, de façon incessante, rapide et répétitive jusqu'à le faire hurler et se réveiller dans la chambre de son hôtel. Carini, sensé aider Guido au scénario, explique que le réalisateur a pris la bonne décision d'abandonner le projet de film. Guido part de l'hôtel, en passant par la salle de production de son film, où il salue les employés. Il prend un bus avec sa femme Luisa et entretient avec elle une discussion amère dans laquelle Luisa parle de séparation. Ils embarquent ensuite tous deux dans un train. La nuit, dans le wagon-restaurant, Guido se perd à nouveau dans son imaginaire. Le wagon change d'apparence, une foule y apparaît, ordonnée et silencieuse : il s'agit de tous les personnages de la vie de Guido, unis dans le même voyage et la même destination. Guido, rempli d'émotion, tente de prononcer des mots, en vain. Luisa et le serveur du wagon-restaurant le regardent, perplexes. Guido remercie la foule qu'il croit voir, sans réussir à exprimer correctement les raisons de ces remerciements. Puis il s'interrompt, lorsqu'il retourne au monde réel, avec le wagon vide. Il se rassoit, confus, mais heureux. S'il lui reste une émotion intense de son imaginaire, il est incapable de la ressaisir. Il regarde vers la foule disparue, et sert la main de Luisa.
En ce qui concerne le film, les choses ne se passent pas du tout de la sorte. Guido, dans le même délire imaginaire que celui du scénario, n'a le temps de recevoir aucune question des journalistes, car, devant la pression de la foule qui l'entoure, il met lui-même fin à ses jours. Avant de passer à l'acte en se tirant une balle dans la tête, Guido reçoit une vision de sa mère, qui tente de le rattraper sur une plage où il court ("Guido ! Où cours-tu, malheureux !"). Dans la séquence suivante, qui se situe, comme dans l'imaginaire précédent, sur le lieu de tournage où une grande structure doit accueillir une fusée factice, le producteur explique aux techniciens qu'il faut démonter la structure de fusée prévue pour le film de Guido. Ce dernier part, salue les techniciens et la production. Carini lui explique qu'il a eu raison d'abandonner son projet de film alors qu'ils montent en voiture tous deux, et que le décor tombe déjà. Carini semble faire un monologue, et Guido ne l'écoute pas du tout, tandis que dans le scénario "il n'entend peut-être (…) pas bien". Pendant le discours de Carini se met en place l'imaginaire de Guido. Le magicien rencontré à l'hôtel apparaît, puis Claudia, la femme qu'il a imaginée de toute pièce. Ensuite, il se voit enfant, aperçoit Saraghina, et ses parents. A nouveau refait surface Claudia, puis Carla et des membres de l'Eglise. La foule s'agrandit, et les personnes de l'existence de Guido se regroupent, à l'image de la foule dans le train pour le scénario. "Mais d'où me vient cette joie de vivre ?" pense Guido à cet instant. Il se sent libéré et comprend comme il est simple d'aimer. Guido trouve tout confus mais comprend que cette confusion le représente. Il perd ses angoisses. S'engage une discussion virtuelle entre Guido et Luisa dans laquelle il s'excuse et demande que sa femme l'accepte tel qu'il est. Luisa répond qu'elle veut essayer. Une musique commence en fond sonore à ce moment-là, puis apparaît le songe total de Guido dans lequel il chorégraphie un spectacle avec un orchestre et toutes les personnes ayant croisé sa vie sur le décor devant servir à la fusée. Enfin, Guido et Luisa rejoignent une danse comprenant tout le monde, se tenant par la main. Puis l'orchestre, de nuit, joue seul au milieu d'une arène, laissant ensuite Guido enfant sous les projecteurs, avant que celui-ci ne quitte à son tour l'arène.
Le traitement du film, à la différence de celui du scénario, privilégie donc un seul lieu dans une condensation de l'espace. Il donne également plus d'importance à l'univers imaginaire de Guido, laissant la réalité arriver par bribes, mais clôturant l'histoire sur le monde onirique du protagoniste, là où le scénario remettait ce dernier sur les "rails" de la réalité concrète. Le couple apparaît aussi important, mais le traitement, moins redondant quant à leur relation, est plus efficace. Globalement, le film est plus intéressant que son scénario dans sa façon de traiter l'histoire. Si en comparant scénario et long métrage correspondant, le lecteur / spectateur peut appréhender l'histoire dans un ressenti proche, le spectateur qui n'a pas lu le scénario peut interpréter les images audiovisuelles de diverses manières, là où le scénario n'offre qu'une explication.
CONCLUSION
Le scénario de 8 1/2 représente donc un fil conducteur duquel le réalisateur s'éloigne au fur et à mesure de ses envies pendant le tournage. Comme le dit Federico FELLINI lui-même : "Ce scénario, qui souhaite rendre, même approximativement, le sens du film, n'a de valeur pour moi qu'en tant que série provisoire de notes initiales pour la préparation et l'organisation de celui-ci". La place du scénario est donc bien définie, et il n'a pas de valeur en soi pour son propre créateur.
La mise en scène du film, par contre, par l'accompagnement subtil du protagoniste qu'elle permet, par le mélange visuel entre deux univers diégétiques, et par les jeux entre le son et l'image, permet une pleine exploitation du potentiel complexe du scénario, qui mélange adroitement modernité et prémices de post-modernité.
Guillaume Briquet
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* Modernité : différents facteurs déterminent l'apparition d'une modernité au cinéma au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale. D'abord, il y a la nécessité de retourner au réel après-guerre. Ensuite, les nouveaux équipements disponibles pour filmer posent la question du direct pour la bande sonore. Il y a également une mise en place de la question d'auteur qui relativise la place des scénarii et des scénaristes.
* Néoréalisme : il ne s'agit ni d'un mouvement, ni d'une école, mais d'un moment de concordance des thèmes, des regards portés sur l'Italie défaite et misérable. Il représente la pratique, également, de procédés de production nouveaux. Le tournage en extérieurs est privilégié, dans la rue, en éclairage naturel, avec des acteurs pas nécessairement professionnels, faute pour une part de décors et de moyens. S'il ne domine que dans les années 40 avec DE SICA, ANTONIONI ou ROSSELLINI, l'importance du néo-réalisme a été considérable. Voir article de Frames à ce sujet.
* Post-modernité : caractérise une période de cinéma dans laquelle certains films, en gardant des particularités de la modernité, y ajoutent une volonté non plus de se tourner vers le réel, mais vers le cinéma lui-même. Quentin TARANTINO, dans d'incessantes références aux films noirs et à de vieilles séries télévisées, est un représentant de cette tendance.
* Cf. Entretien avec Luc MOULLET dans les Cahiers du Cinéma n°216 d'octobre 1969.
* Diégèse : le monde imaginaire dans lequel évoluent les personnages d'un film. Une musique diégétique est une musique dont la source provient de la diégèse, et qui est donc perçue par les personnages et le spectateur. Ici, la source de la musique est un orchestre présent dans le cadre.
* Ellipse temporelle : permet de passer d'une séquence à une autre en ne montrant volontairement pas les événements qui se passent entre temps, dans un souci d'aller à l'essentiel et de ne faire voir que ce qui est utile à l'action, ou dans une volonté de censure.
* Effet proleptique : vise justement à faire anticiper par le spectateur des événements qui vont survenir par la suite dans le récit filmique. Il apparaît à l'aide d'éléments dans la mise en scène.
Fiche technique
- Titre original : Otto e mezzo.
- Origine : Italie - Noir & Blanc - 1 h 54 mn.
- Date de sortie France : mai 1963.
- Production : Angelo RIZZOLI.
- Réalisateur : Federico FELLINI.
- Scénario : Federico FELLINI,Tullio PINELLI et Ennio FLAIANO.
- Casting : Marcello MASTROIANNI (Guido Anselmi), Anouk AIMÉE (Luiza), Sandra MILO (Carla), Claudia CARDINALE (Claudia), Rossella FALK (Rossella), Madeleine LEBEAU (l'actrice), Caterina BORATTO (la belle inconnue), Barbara STEEL (Gloria), Mario PISU (Mezzabotta)...
- Musique : Nino ROTA.
- Box-Office France : 739.613 entrées.
- Sortie DVD : annoncée...
- Lien Internet : http://www.federico-fellini.net/filmo/filmo311.htm
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Materiale despre filmul lui Fellini in vrac.
http://cinemachoc.canalblog.com/archives/2018/08/11/36603069.html
https://www.cineclubdecaen.com/realisat/fellini/huitetdemi.htm
http://dvdtator.canalblog.com/archives/2015/09/24/32668609.html
https://newstrum.wordpress.com/2018/08/11/huit-et-demi-de-federico-fellini-la-ronde-de-la-vie/
http://chroniquesitaliennes.univ-paris3.fr/PDF/13-14/spizzo.pdf
https://www.senscritique.com/film/Huit_et_demi/critique/22698072
https://films.oeil-ecran.com/2016/05/27/huit-et-demi/
https://www.academia.edu/29550274/Federico_Fellini_th%C3%A9oricien_protagoniste_et_personnage_dans_8_1_2_et_intervista?auto=download
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