Si tout le monde s’accorde à considérer The Maltese Falcon (Le Faucon maltais) comme le point de départ de la période classique du film noir, cela signifie que le privé est depuis le départ la figure emblématique du genre. Qu’on l’appelle privé, limier ou fouineur, le prototype du héros du film noir est issu des polars hard-boiled, de la littérature à deux sous qui remplissait les pages de magazines bon marché comme Dime Detective ou Black Mask au début de années 1920.'
« L’agent de la Continentale » ou le Continental Op, le premier héros des enquêtes policières de Dashiel Hammett, était petit, rondelet avec des dents de lapin. Mais l’auteur, lui-même ex-détective privé alcoolique, est plus connu pour avoir créé Sam Spade. Pour The Maltese Falcon, Hammett s’inspira librement de ses propres expériences (qui furent plus tard romancées par Joe Gores dans Hammett, adapté à l’écran par Wim Wenders en 1982. La version de 1941, considérée par beaucoup comme le coup d’envoi de la période classique du film noir, était en réalité la troisième adaptation par Warner Bros. Du roman d’Hammett, celui-ci ayant précédemment été tourné sous ce même titre en 1931, puis sous le titre Satan Met a Lady (Satan rencontra une dame), en 1936. Fort heureusement, la version de John Huston s’est rapidement imposée comme la version de référence, ce qu’elle est encore aujourd’hui, et le Sam Spade tout en nuances d’Humphrey Bogart est devenu un modèle pour tous les privés qui ont suivi.
Dans son essai The Simple Art of Murder, Raymond Chandler, un autre auteur ayant fait ses classes dans les magazines de fiction à deux sous, a écrit ce qui est resté comme la description définitive du privé en littérature. Après une étrange métamorphose au cours de laquelle son héros Philip Marlowe devint le « Faucon » dans une première version d’Adieu ma jolie (The Falcon Takes Over) en 1942 puis Mike Shayne dans La Grande Fenêtre (Time to Kill) l’année suivante, les quatre premiers romans de Chandler et leur héros « ni pourri ni peureux » établirent la norme des détectives des années 1940. RKO confia à Dick Powell le rôle de Philip Marlowe dans la version de 1944 intitulée Murder My Sweet (Adieu, ma belle). Avec ses décors et sa lumière diffuse typiques de la maison, qui avait financé aussi bien Citizen Kane que les envoûtants films d’épouvante de Val Lewton, Murder My Sweetd’Edward Dmytryk est un tour de force stylistique, pratiquement toutes les scènes se déroulant la nuit ou dans des pièces à l’éclairage tamisé : bureaux poussiéreux, bars miteux, pavillons résidentiels, riches villas de Bel-Air. L’épisode le plus célèbre reste la scène hallucinée avec des vues et des sons exagérés traduisant l’état mental de Marlowe drogué.
Bogart déposa le costume de Spade pour enfiler à son tour celui de Marlowe dans The Big Sleep (Le Grand sommeil (1946), tournant pour la deuxième fois avec Howard Hawks et Lauren Bacall. Les scénaristes, William Faulkner et la jeune Leigh Brackett (avant leur première rencontre Hawks croyait que c’était un homme ; Bogart la surnommait « Butch » – l’hommasse – et ne laissait personne toucher à ses dialogues) remanièrent l’intrigue violente et alambiquée du roman de Chandler, avec ses cadavres qui s’entassaient de Malibu à San Bernandino, pour en faire la toile de fond des échanges acerbes et érotiques entre le pragmatique Marlowe et l’héritière enfant gâtée Vivian Sternwood. En 1947, Robert Montgomery réalisa et incarna à l’écran Marlowe dans The Lady in the Lake (La Dame du lac) même si, le spectateur ne pouvait vraiment voir le privé que quand il se regardait dans un miroir, Montgomery ayant retranscrit très littéralement le récit de Chandler à la première personne : tout le film est tourné en caméra subjective. Être enfermé dans le corps de Marlowe créait des scènes très particulières, comme lorsqu’il est assommé puis aspergé d’alcool, ce qui oblige la caméra à ramper sur une route, à vaciller jusqu’à une cabine téléphonique puis à chercher désespérément une pièce de monnaie pour appeler à l’aide.
Le cycle du film noir peut donner l’impression que la plupart de ses héros sont des détectives privés. En fait, à l’exception de ceux adaptés de romans de Chandler et de Hammett, ils sont peu nombreux. Naturellement, il y a d’autres limiers amateurs, comme les journalistes de The Big Clock (La Grande Horloge, 1948) ou de Call Northside 777 (Appelez Nord 777, 1948) ou encore les enquêteurs de compagnies d’assurance, comme dans The Killers(Les Tueurs, 1946) ou Pitfall (1948). Il y a aussi des amnésiques à la recherche de leur passé, comme dans Street of Chance (1942) et Somewhere in the Night(Quelque part dans la nuit, 1946), des secrétaires pleines de ressources, comme dans Phantom Lady (Les Mains qui tuent, 1944), et même des enfants paranoïaques, comme dans Talk About a Stranger (1952). Toutefois, la plupart des enquêteurs dans les films noirs sont des fonctionnaires attachés soit à la police locale soit à une agence fédérale.
Le film noir des années 1940 compte néanmoins quelques privés qui échappent à la sphère d’Hammett et de Chandler. Jeff Bailey, dans Out of the Past (La Griffe du passé) et Bradford Galt dans The Dark Corner (L’Impasse tragique) en font partie. Entre les ténèbres du monde souterrain de Galt et les recoins obscurs du Los Angeles deKiss Me Deadly (En quatrième vitesse) de Robert Aldrich, il s’écoula certes près d’une décennie, mais cela ne représente qu’un saut de puce dans l’univers du film noir. La vitesse et la violence sont au cœur de ce dernier film. Cette adaptation du roman de Mickey Spillane transpose le New-Yorkais Mike Hammer à Los Angeles, le plongeant dans un paysage de rues sombres et de maisons délabrées encore moins accueillantes que celles fréquentées par Spade et Marlowe. Comme les voitures de sport de Hammer, le film prend des virages sur les chapeaux de roue, fonçant à travers une série de scènes décousues et cataclysmiques. Illustrant le Los Angeles frénétique des années 1950, en pleine hystérie atomique, parcouru de courants sous-jacents sournois, il enregistre également la demi-vie dégénérative d’un univers noir instable s’acheminant vers sa masse critique. Une fois le film parvenu au point de fission, la menace visuelle des balles de mitraillette déchiquetant la porte d’un cottage de Laurel Canyon dans The Big Sleepest ici multipliée à la puissance X : une maison sur la plage de Malibu est carrément pulvérisée.
Dès le début, Kiss Me Deadly est une explosion sensorielle. Dans le prologue qui précède le générique, une femme chancelle hors des ténèbres, son souffle emplissant la bande-son en halètements amplifiés. Des formes métalliques floues défilent trop vite pour être identifiées. Elle court au milieu d’une route, jusqu’à ce que les phares d’une voiture arrivant en face l’aveuglent. On entend un crissement de freins et de pneus sur l’asphalte et une Jaguar sort de la route dans un nuage de poussière. Un gros plan nous révèle Hammer derrière le volant. Par-dessus les halètements, on perçoit un air de jazz au piano à la radio. L’allumage grince péniblement tandis qu’il tente de remettre le contact. Enfin, il grogne à la femme : « Vous avez failli bousiller ma bagnole ! Alors vous montez ou quoi ? »
Dès le dialogue d’ouverture entre Hammer et Christina, Kiss Me Deadly établit un nouveau type de héros : méprisant, sarcastique, en fait, tout sauf un héros. Hammer se fiche de savoir qui est cette femme, pourquoi elle est apparemment nue sous son imperméable et pourquoi rien de ce qu’elle dit ne semble cohérent. Pour lui ce n’est « qu’une fugitive d’un asile de dingues ». Pourtant, quelques instants plus tard, elle le remet à sa place. « Vous m’en voulez, n’est-ce pas ? » demande-t-elle pour la forme. « Désolée d’avoir failli abîmer votre jolie petite toto. Je me disais justement… c’est fou tout ce qu’on peut apprendre sur quelqu’un à partir de détails de rien du tout Votre voiture, par exemple. » « Ah oui, et qu’est-ce qu’elle vous dit ma voiture ? » demande-t-il du coin des lèvres. « Vous n’avez qu’un seul vrai amour : vous-même, Vous êtes de ceux qui ne donnent jamais dans une relation, vous ne savez que prendre. » Puis de songeuse elle devient sardonique, sans cesser de se moquer de lui : « Ah, la femme, le sexe incomplet… Mais que lui faut-il pour être enfin entière ? Un homme, un homme merveilleux ! »
KISS ME DEADLY (Robert Aldrich, 1955)
Le dialogue d’ouverture décrit Mike Hammer en quelques traits. En l’accusant de narcissisme, Christina ne fait que confirmer ce que l’image suggère par « des détails de lien du tout » : la voiture de course, le trench-coat, la moue dédaigneuse, le jazz à la radio. Aldrich et son scénariste A. L. Bezzerides se servent de Christina pour appuyer le fait que cet homme n’est ni modeste ni admirable. Le dialogue révèle également que Hammer sait parfaitement qui il est et l’image qu’il reflète. « Qu’est-ce qu’elle vous dit ma voiture ? » Elle ne transmet que ce qu’il veut transmettre, un message que même une fugitive d’une « maison de dingues » peut déchiffrer au quart de tour.
KISS ME DEADLY (Robert Aldrich, 1955)
La route sombre de l’ouverture forme une sorte de limbes narratives : les éléments de l’intrigue n’ont pas encore été révélés, ni même abordés. Le paysage nocturne et la station-service perdue au milieu de nulle part constituent des décors impossibles à situer. Ils sont ouverts, troubles et, hors du halo des néons de la pompe à essence, même menaçants. À l’époque de la sortie du film, en 1955, il est vrai que les spectateurs avaient intégré les conventions du film noir et avaient déjà une idée préconçue des personnages et de l’histoire qu’ils allaient voir. Le roman original de Mickey Spillane donne lui aussi le ton : « J’eus juste le temps de voir la poule se dressant dans la lumière de mes phares, agitant les bras comme une marionnette géante. Je crachai un juron qui remplit la voiture et fit bourdonner mes oreilles. Je donnai un coup de volant, sentis l’arrière de la voiture partir de biais, redressai d’un coup dans l’autre sens en écrasant l’accélérateur. Les roues dérapèrent et la voiture grimpa sur le bord de la falaise. Je freinai pile, creusant un sillon sur le bas-côté, puis rebondis sur la chaussée et m’arrêtai enfin. Sans trop savoir comment, j’étais parvenu à décrire un demi-cercle autour de cette poupée. »
KISS ME DEADLY (Robert Aldrich, 1955)
Le romancier Spillane devait sa grande popularité à sa manière de transformer les femmes en objets, qu’il conjuguait à un sadomasochisme cru et à un anticommunisme fanatique proche du maccarthysme. Dans Kiss Me Deadly, Hammer, son héros récurrent, constitue le point de vue prédéterminé, s’exprimant surtout au travers de vannes tarabiscotées et d’une narration à la première personne qui en fait le Marlowe du pauvre. Aldrich et Bezzerides n’ont gardé que quelques éléments de la trame originale et encore, selon Aldrich, pour les mettre « sens dessus dessous ». Dans le dialogue d’ouverture, une seule réplique vient de l’original. Mais il n’y pas que les mots qui ont changé. Une grande partie de l’intrigue complexe – au cours de laquelle Hammer utilise des indices allant d’une clef de casier de vestiaire à un poème de Christina Rossetti pour retrouver un mystérieux récipient que sa petite amie a surnommé « le grand machinchouette » – a été inventée par les scénaristes.
KISS ME DEADLY (Robert Aldrich, 1955)
Pour ce qui est du comportement général, le Hammer de Spillane tient davantage du prédateur ricanant, li est l’antithèse du chevalier urbain de Chandler, avec un instinct de survie encore plus affûté que celui de Sam Spade lui-même. Même le personnage de Spillane ressent un soupçon de compassion pour « cette poupée blonde timbrée et pas claire avec des trous dans la tête » et s’il suit les traces de ceux qui ont voulu le tuer, c’est simplement parce qu’il est choqué par leurs méfaits : « Pas besoin de regarder leurs tronches pour être sûr que je descendais ceux qu’il fallait. Ces salauds, ces saletés de pourris de salauds ! » Le Hammer du film est intégré dans un système plus sophistiqué qui associe les sous-entendus du film noir au déterminisme moral d’Aldrich et de Bezzarides. Alors qu’il se demande sans cesse « Qu’est-ce que j’y gagne, moi, là-dedans ? », tout autour de lui, la criminalité engendre une contre-criminalité et assassins et voleurs façonnent les outils de leur propre destruction. Pour Spillane, tout est dans le nom du héros, Hammer « le marteau », un objet lourd, contondant, implacable qui martèle sans états d’âme les parias comme des clous bon marché. Aldrich et Bezzarides ont légèrement raffiné cet archétype : il arrive aussi à Hammer de réfléchir, surtout à son portefeuille. De l’ensemble des personnages du film, Christina est sans doute la plus sensible dans le sens conventionnel du terme. Il est donc assez ironique qu’elle soit folle, enfermée dans une institution par la société, alors qu’elle est celle qui perce le plus vite le jeu de « dur à cuire » de Hammer, L’interprétation de Ralph Meeker propulse Hammer au-delà de la suffisance et de l’autosatisfaction du roman, lui apportant une vision méprisante, plus noire et sardonique, du monde en général et faisant de lui le porte-parole de tous les habitants peu fréquentables des enfers du film noir.
KISS ME DEADLY (En quatrième vitesse, 1955) de Robert Aldrich. Adaptant un livre de Mickey Spillane, le film est considéré comme un classique du film noir et une des meilleures réussites de son auteur.
La première question qu’Hammer pose à son ami l’inspecteur Pat Murphy est « Qu’est-ce que ça va me rapporter ? ». Cela complète le portrait du personnage : sa recherche d’un « gros coup », le Graal du détective privé, n’a rien de la démarche altruiste d’un Galahad, mais ce n’en est pas moins une quête. Hammer est parfaitement chez lui dans le monde du Noir. Les rues sombres et les immeubles délabrés sont le terrain de sa recherche, ostensiblement détaché du monde ordinaire. La clef de son univers est la duperie et la tromperie est son fonds de commerce. Il gagne sa vie en piégeant les époux infidèles et en menant des enquêtes peu ragoûtantes. C’est leur incapacité à tromper leur monde qui tue Christina et les autres victimes.
KISS ME DEADLY (Robert Aldrich, 1955)
Comme dans la plupart des films noirs, la tromperie et l’incertitude constituent la toile de fond de la tension dramatique de Kiss Me Deadly. Le fil de l’intrigue est aussi stable qu’une des expressions du garagiste Nick : « Va-va-vroum. Padaboum ! » Pour tous ceux qui sont en quête de quelque chose dans le film noir, l’instabilité est un facteur prépondérant et la disjonction la règle, principes auxquels adhèrent les éléments sensationnels du film : la descente puis le sifflement du cric hydraulique tandis que Nick hurle, broyé par la voiture ; la colonne de feu qui consume Lily Carver ; les cris de l’employé de la morgue auquel Hammer soutire des informations par la torture. Ces événements quasi aléatoires ne répondent à aucun principe organisateur. Ils transcendent le contexte pour fournir une émotion purement sensorielle .
KISS ME DEADLY (Robert Aldrich, 1955)
« Un lyrisme sauvage nous précipite dans un monde en décomposition régi par la perversité et la brutalité », c’est ainsi que Raymond Borde et Etienne Chaumeton décrivent Kiss Me Deadly dans leur ouvrage pionnier Panorama du film noir américain, après quoi « Aldrich nous oriente vers la solution la plus radicale de toutes : l’apocalypse nucléaire », La quête de Hammer reflète en parallèle le déchiffrage des vers énigmatiques du poème de Rossetti : « Mais quand l’obscurité et la corruption laissent un vestige des pensées que nous avons eues autrefois. » Le mythe devient la valeur de surface du « grand machinchouette » et rien ne peut plus empêcher l’ouverture de la boîte de Pandore. L’enquête devient la quête de l’élément détersif, du combustible, de l’étincelle du feu purificateur qui réduira les enfers de Kiss Me Deadly en cendres radioactives. Selon Borde et Chaumeton, cela offre au genre lui-même « une conclusion fascinante et sombre… l’opposé désespéré du film qui, 14 ans plus tôt, inaugura le cycle noir, The Maltese Falcon ». En tant qu’épilogue au film noir, Kiss Me Deadly propose une vision assonante des forces puissantes et malveillantes tapies sous la surface qui explosent soudain, formant un champignon atomique au-dessus de Malibu. [Film Noir – Alain Silver & James Ursini, Paul Duncan (Ed.) – Ed. Taschen (2012)]
Une caméra plane au-dessus de San Francisco sur un air de swing endiablé, puis le nom de l’agence des détectives privés, « Sam Spade and Miles Archer », s’affiche en grandes lettres. L’objectif s’attarde sur le héros : quelques secondes suffisent à nous entraîner dans un tourbillon de mensonge, de trahison et de meurtre. Nous y sommes en bonne compagnie puisque le héros est le détective privé le plus célèbre d’Hollywood, Sam Spade, interprété par l’idole du film de gangsters et de détectives Humphrey Bogart.
Le vieux général Sternwood (Charles Waldron) charge le détective privé Marlowe (Humphrey Bogart) de résoudre une affaire de chantage dans laquelle est impliquée sa fille Carmen (Martha Vickers), une jeune femme aux mœurs très libres. L’enquête conduit le détective sur la piste d’un complot meurtrier dans lequel la jolie Vivian (Lauren Bacall), la seconde fille du général, semble jouer elle aussi un rôle obscur. En s’éprenant de cette dernière, Marlowe va devenir la cible de bandes rivales.
Le titre même du film évoque pleinement le cycle noir : le protagoniste Jeff, incarné par Robert Mitchum, marqué par le destin, porte sur son visage cette fatalité qui se lit dans son regard sombre et sans joie ; Jane Greer fait une très belle prestation dans le rôle de Kathie, la femme érotique, et destructrice ; le scénario de Mainwaring réussit, quant à lui, à , déterminisme implacable qui resserre le présent et le futur de Jeff, grâce au procédé du flash-back, enfin, les éclairages sombres du chef opérateur, Nicholas Musuraca, un familier des films noirs, soulignent parfaitement la sensibilité tragique de Tourneur.
Les films noirs qui mettent en scène un personnage de détective privé ne sont pas si nombreux qu’on le croit. Il n’en existe qu’une douzaine environ et près de la moitié d’entre eux sont tirés de romans du célèbre écrivain Raymond Chandler, dans lesquels figure le personnage emblématique de Philip Marlowe. Bien que « Farewell, my Lovely » et « The High Window » aient déjà été portés à l’écran, ces adaptations avaient été remaniées pour d’autres détectives privés. C’est donc dans la version de Dmytryk et sous les traits de Dick Powell qu’apparaît pour la première fois au cinéma le personnage de Marlowe.
Lady in the lake est l’un des films expérimentaux d’Hollywood les plus exceptionnels car il est uniquement tourné d’un point de vue subjectif, la caméra valant pour le regard du détective. Le seul moment de rupture avec ce parti-pris survient quand Marlowe, assis à son bureau, donne au public plusieurs éléments embrouillés de l’intrigue, l’encourageant à démêler lui-même le mystère ; il doit « s’attendre, le prévient-il, à l’inattendu ». Ce procédé accentue la tension et l’efficacité de toutes les violences qu’a à subir le détective assommé par Lavery, aspergé d’alcool, obligé de se traîner pour traverser la rue ou menacé par l’arme de Mildred…
Comme souvent, le cinéaste réalise deux films en un. Il accorde autant d’importance à l’intrigue qu’au contexte, à l’arrière-plan sociologique. Le film grouille de personnages secondaires hauts en couleur, de répliques hilarantes et de gestes inquiétants. Génialement filmé, avec une utilisation inventive de l’écran large, une photographie magnifique et un accompagnement musical inoubliable, The Long goodbye est à ranger, avec certains titres de Peckinpah, Fleischer ou Huston de la même époque, parmi les meilleurs films américains des années 1970.
Pour de nombreux critiques, Chinatown n’est pas seulement l’un des meilleurs films des années 1970. Sa réalisation fait partie de ces heureux hasards dont l’histoire d’Hollywood regorge et qui favorisent la production de chefs-d’œuvre à l’intérieur des mécanismes standardisés de l’usine à rêves hollywoodienne : l’heureuse rencontre de talents extraordinaires. C’est ainsi que sur les instances de Jack Nicholson, qui n’est pas encore la star qu’il va devenir, Robert Towne accepte d’écrire le scénario alors qu’il a jusqu’ici travaillé essentiellement comme script doctor.
Tout, vous saurez tout sur les actrices de l’âge d’or d’Hollywood. De Marilyn à Deanna Durbin, une soprano passée star de cinéma dans les années 40 et qui comptait parmi ses fans Anne Frank et Mussolini. «Hollywood, la cité des femmes» n’est pas l’œuvre d’un historien ni d’un critique mais celle d’un passionné: fils de feu Gérard Sire (scénariste de Jean Yanne), Antoine Sire a plaqué son poste de directeur de la com’ à la BNP pour pondre cette somme encyclopédique de 1248 pages.
Point de littérature dans sa prose, le prix de son ouvrage est dans l’ampleur du regard et le puits d’informations qu’il offre, prompts à lever bon nombre d’a priori sur les vedettes féminines des années 30 à 50 si souvent résumées à leurs atours glamour. Pour nous, Antoine Sire revient sur certains traits caractéristiques du système des studios, sur la façon dont on y payait les actrices, sur le genre de rôles qu'on leur confiait, et donc sur les représentations des femmes qu'ils ont contribué à forger dans nos imaginaires.
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N.S.
Les studios : un système tout-puissant
« Le début du système des studios coïncide avec l’arrivée du parlant. C’est un système qui date d’avant mais il acquiert, avec le parlant, une plus forte dimension industrielle. De spectacle agréable, le cinéma devient un médium qui raconte la vie avec une grande précision. On peut dater la fin du système au milieu des années 1950, quand la télévision fait sortir les spectateurs des salles.
Au même moment, des décisions de justice empêchent les studios de détenir des salles, les cinéastes découvrent le néo-réalisme, l’Actors Studio éclot… Les ferments du Nouvel Hollywood poussent. Pendant la période des studios, les actrices qui arrivent à s’imposer au sein du système sont d’une intelligence et d’une volonté extraordinaires. Jane Russell n’est pas seulement une pin-up, elle est aussi productrice. Lucille Ball rachète les ex-studios de la RKO et devient la productrice de séries comme “Star Trek” ou “les Incorruptibles”. Bette Davis lutte en permanence pour essayer d’obtenir certains rôles.»
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Les salaires de la peur
« Il y a toujours eu une inégalité de salaires. Quand les femmes arrivaient à s’imposer artistiquement, c’était, en revanche, au prix d’une exploitation de toute façon permanente à Hollywood et d’une vraie souffrance. Ginger Rogers a fait un énorme esclandre à la RKO quand elle a découvert que, pour ses films avec Fred Astaire, elle était non seulement payée trois fois moins que lui mais qu’elle était également moins bien payée que le deuxième rôle masculin.
La seule actrice qui ait fait une réussite financière extraordinaire, c’est Garbo. Elle savait très bien négocier ses salaires: durant cinq ans, elle a gagné 5000 dollars par semaine ! Dans sa chanson “You’re The Top”, Cole Porter compare la personne qu’il aime à tous les musts de son époque et il dit à un moment: “you’re Garbo’s salary”. Parmi les stars les mieux payées, il y avait aussi Barbara Stanwyck, Bette Davis et Deanna Durbin.
Dans les années 1930, une grande mode des sopranos a touché Hollywood et a permis à des femmes comme Deanna Durbin et Jeanette McDonald d’y faire carrière. Quand, en 1941, Mussolini écrit dans le journal fasciste “ll Popolo d’Italia”, une lettre pour appeler les Etats-Unis à ne pas entrer en guerre, il l’adresse à Deanna Durbin à qui il demande d’intercéder auprès de Roosevelt !»
Garbo, négociatrice impitoyable
« Dans la carrière de Greta Garbo aux Etats-Unis, il y a un jeu permanent entre ce qu’elle veut et ce que la MGM veut. S’il n’y a pas la rencontre entre ces deux volontés, il ne se passe rien. Cela invalide l’idée selon laquelle les actrices ne sont que des femmes-objets, des créatures de studio.
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“La Reine Christine”, par exemple, Garbo en est largement l’instigatrice. Elle s’est exilée en Europe pendant quelques temps, les patrons de la MGM veulent la faire revenir et Garbo leur répond: “d’accord mais on va faire deux films : un que vous choisissez et un que je choisis.”
Et elle choisit “la Reine Christine”, l’histoire d’une reine qui quitte le pouvoir par amour pour un homme, qui a une petite amie femme qu’on la voit embrasser, qui se travestit et se retrouve au lit avec un homme qui la prend pour un autre homme… Le censeur n’a pas vu les audaces de “la Reine Christine”. Les Américains non plus.»
La plus grande commère d'Hollywood
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Le procès qui a changé la vie des acteurs
« Le procès qui a opposé Olivia de Havilland a changé la vie des acteurs à Hollywood. Quand l’actrice débute sa carrière au sein du studio, on lui fait jouer, selon le scénario, la copine, la femme ou la dulcinée d’Errol Flynn. Mais pour elle, l’Anglaise aux rêves shakespeariens, formée au théâtre avec Max Reinhardt, faire la plante verte aux côtés d’Errol Flynn, ça ne peut pas durer.
Lorsque la MGM lance la plus grande chasse de têtes de toute l’histoire d’Hollywood pour le rôle de Scarlett O’Hara dans “Autant en emporte le vent”, de Havilland postule mais, signe de son intelligence, pour interpréter Mélanie, second rôle fort et moins convoité. Et David O. Selznick la choisit. Après l’extraordinaire “la Porte d’or” de Mitchell Leisen, tourné pour la Paramount, Olivia de Havilland comprend qu’elle trouve ses plus beaux rôles hors du giron de la Warner, elle attend donc avec impatience que son contrat se termine. Or quand elle va voir Jack Warner pour lui dire au revoir, celui-ci lui rétorque: “Non non, votre contrat n’est pas terminé. Vous avez refusé plusieurs films, à chaque fois, je vous ai mise à pied. Selon l’usage hollywoodien, le temps de mise à pied s’ajoute à la date calendaire d’échéance du contrat.”
Olivia de Havilland rentre chez elle dégoûtée. Lors d’une soirée, elle tombe sur l’avocat Martin Gang qui lui dit “y’en a marre de céder aux studios avec leurs armées d’avocats”. Il exhume une loi californienne conçue à l’origine pour les travailleurs agricoles selon laquelle tout CDD de plus de 7 ans est assimilé à du servage. Le juge est un vieux juge californien qui n’en peut plus de voir défiler les combines des studios et qui donne raison à l’actrice. Du coup, la Guilde des Acteurs se rallie à elle. Jack Warner est dans tous ses états, il écrit des lettres au tout Hollywood, même à des types qui n’ont pas réalisé de films depuis quinze ans, pour leur dire de boycotter de Havilland.
Pendant ce temps, elle a l’intelligence de ne pas chercher à faire des films. On est en pleine guerre, elle va donc voir l’USO qui gère le théâtre aux armées et donne des spectacles pour les soldats. Quand Jack Warner, qui porte un uniforme de colonel mais n’a jamais tenu un fusil, téléphone à l’Etat-major pour casser du sucre sur son dos, les gars l’accueillent très fraîchement. De Havilland gagne en appel puis en cassation. Ce qui va totalement faire basculer le sort des acteurs à Hollywood. Parce que, dans le même temps, les acteurs partis au front comme Clark Gable ou James Stewart avaient dû signer leur mise à pied des studios qui s’apprêtaient à leur faire le même coup.
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L’arrêt “De Havilland vs. Warner” est considéré comme un arrêt historique. Dès lors, de Havilland, qui a prouvé qu’elle était patriote et vertueuse, n’a plus eu de problème pour être free-lance. Elle est l’une des premières actrices à s’affranchir du système des studios et à choisir ses films. Par la suite, elle recevra l’Oscar, en 1946, pour un film pas très bon de Mitchell Leisen, “A chacun son destin”, et tournera, excusez-du peu, dans “l’Héritière” de William Wyler...»
Censure et sans reproche
« Le code de censure Hays est rédigé en 1930, deux ans après l’arrivée du parlant, par le catholique Joseph Breen, un journaliste, pour une administration dirigée par le protestant Hays, un ancien ministre des PTT. A l’époque, les ligues de vertu sont violemment déchaînées contre le cinéma, surtout chez les catholiques. Il y a des manifestations dans les églises, des pétitions sont signées à la sortie de la messe, d’où l’institution du code Hays à l’initiative des grands studios.
Très vite, cela devient un jeu chez les réalisateurs de contourner le code. On appelle ère pré-code la période de 1930 à 1934 où certains films tentent au maximum de transgresser la censure en usant de métaphores incroyables ou en faisant dire aux personnages le contraire de ce qu’ils pensent réellement. Le “trouple” de “Sérénade à trois” de Lubitsch n’arrête pas de dire “No Sex”. Or “No Sex”, quand on est trois et qu’on ne se quitte pas, ça veut dire “Sex”.
Certains films mettent le feu aux poudres comme “Convention City” avec Joan Blondell. L’histoire de cadres se retrouvant pour un congrès au fin fond des Etats-Unis et là, c’est la foire aux strings. Le film marche, Jack Warner est content mais on a retrouvé des mémos de l’époque qui prouvent qu’il a eu des problèmes avec la censure. La Warner détruira d’ailleurs toutes les copies. Depuis, le film est invisible. Joan Blondell y serait très peu vêtue mais impossible de le vérifier.
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Tous ces films pré-code très audacieux vont entraîner le 1er juillet 1934 la création de l’administration Hays et du bureau Breen, dirigé par Joseph Breen, qui a pour charge de tamponner préalablement tous les scénarios, d’avoir un représentant sur le tournage et de visionner les films. La censure se déploie désormais sur trois étapes, ce qui change absolument tout. Et cela va, bien sûr, avoir des conséquences sur les actrices et la représentation de la femme.
Il ne faut pas oublier que la majorité des spectateurs étaient des spectatrices. Le cinéma était le premier loisir populaire, on y allait dix fois plus à l’époque qu’aujourd’hui. Les studios hollywoodiens avaient la puissance qu’ont de nos jours Google ou Facebook. Le bureau Breen va provoquer l’essor des Women Pictures, soit le mélodrame féminin. Au lieu de montrer des filles en tenues légères, on joue sur une sorte de pornographie du désespoir, un voyeurisme empathique et conservateur. On fait des femmes des martyrs plutôt que des objets sexuels.
Mais très vite, ce genre du Women Picture donne des choses étonnantes. Par exemple, “Imitation of Life” de John M. Stahl en 1934 sur l’amitié entre une femme blanche et une femme noire, ce qui est vachement gonflé pour l’époque. C’est aussi cette vogue des Women Pictures qui va permettre à Bette Davis de tenir des rôles de femmes fortes comme, par exemple, dans “l’Insoumise”. Deux autres genres sont nés à la suite du code Hays. D’une part, la screwball comedy où, bizarrement, le ressort comique est la femme. Et ce dès 1934 dans “Train de luxe” avec Carole Lombard puis dans les autres comédies de Hawks, “la Dame du vendredi”, “l’Impossible M. Bébé” et “Chérie, je me sens rajeunir”.
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Et puis, la guerre va avoir plusieurs conséquences. D’abord parce qu’il faut divertir les G.I.. D’un seul coup, le fait de s’adresser aux soldats autorise des choses telles que “The Gang’s All Here”, tourné pendant la guerre avec toutes les actrices de la Fox et cette scène incroyable où des danseuses soulèvent des bananes… La guerre va également accompagner la naissance du film noir, autre conséquence du code Hays. Le code Hays dit que le vice doit être puni. C’est ce qui se passe dans les films noirs, sauf qu’avant de faire triompher la morale, les réalisateurs en profitent pour mettre en scène des personnages qui en sont à l’opposé. “La chambre conjugale doit être représentée de manière convenable”, l’un des préceptes du code Hays, la femme fatale n’en a que faire.»
Hollywood, la cité du Mal
Stanwyck, de la traînée à la femme sacrificielle
« Barbara Stanwyck est d’abord une des idoles de l’ère pré-code. Dans ce film incroyable qu’est “Baby Face”, elle couche avec tous les mecs pour s’élever dans la société. Il y a notamment cette scène surréaliste où le conseil d’administration de la banque la convoque parce que le président et le directeur général viennent de s’entretuer pour elle.
Puis, à partir de 1934, elle devient une des actrices emblématiques du Women Picture, l’incarnation de la mère qui souffre. Elle traverse tous ces rôles avec une dignité qui n’appartient qu’à elle tout en servant toujours le propos du film. Je pense, par exemple, à “Stella Dallas” de King Vidor, un de ses plus grands rôles. L’histoire d’une femme qui épouse un type d’une condition très supérieure à la sienne et lui donne une fille avant qu’ils ne se séparent. Elle ne peut pas vivre loin des bars populaires, des gens de sa catégorie sociale. Quand elle comprend qu’elle est un obstacle pour sa fille qui, elle, a les gênes de la fortune, elle la laisse rejoindre son père, se marier avec un type de la haute-société et disparaître totalement de sa vie. La censure a poussé Stanwyck à devenir une femme sacrificielle.»
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Parité bien ordonnée...
« Il n’y avait aucune parité, en particulier chez les metteurs en scène. Certains comme Darryl Zanuck, le boss de la Fox, affirmaient même que jamais ils ne laisseraient une femme réaliser un film. On trouvait quelques réalisatrices du temps du muet mais elles ont à peu près disparues par la suite. Lorsque la Guilde des Réalisateurs a été créée en 1936, une seule femme en faisait partie: Dorothy Arzner. Peu après, Ida Lupino, d’abord actrice, va devenir réalisatrice presque par hasard: elle produisait “Avant de t’aimer » et, comme le réalisateur Elmer Clifton est tombé malade, elle a pris le relais. Puis elle a continué à mettre en scène.
En revanche, un quart des scénarios du Hollywood des studios était écrit par des femmes. Cela vient de ce que la littérature populaire américaine était largement colonisée par les femmes. “Autant en emporte le vent” est écrit par une femme. Les grands mélodrames comme “Histoire d’un amour” et “Mirage de la vie” sont tirées des œuvres de Fanny Hurst. Pas mal de films, adaptés d’histoires écrites par des femmes, étaient scénarisées par des femmes. Certaines scénaristes étaient d’ailleurs amenées par les stars féminines. Garbo vivait avec un essaim de scénaristes femmes dont Salka Viertel, l’auteur de “la Reine Christine”. Si on trouvait de l’empathie féminine dans les films, c’était en partie grâce aux scénaristes. En revanche, les rares actrices noires à s’imposer à l’époque le faisaient dans des rôles de domestiques.»
Hepburn, à l’avant-garde du progrès
« Quand Katharine Hepburn arrive à la MGM, elle est l’actrice la plus anticonformiste dans le studio le plus conformiste. A la RKO, elle choisissait des films qui faisaient scandale comme “Sylvia Scarlett”. Lors des périodes de basses eaux, elle se consacrait au théâtre. Elle y a monté “The Philadelphia Story”, une pièce dont elle a acquis les droits avec Howard Hughes pour les revendre et faire le film à la MGM. Elle devient une MGM girl et, en même temps, elle y impose des idées nouvelles, entre autres sur la parité.
Son deuxième film pour le studio, sur un scénario qu’elle a acheté et revendu en percevant la moitié du prix, c’est “la Femme de l’année” pour lequel elle choisit son partenaire, Spencer Tracy, qui va devenir l’homme de sa vie. Dans “Madame porte la culotte”, elle parle de la relation entre un homme et une femme qui travaillent, elle montre qu’une épouse trompée et battue par son mari peut lui tirer dessus car c’est une forme de légitime défense.
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Hollywood : la partouze pour tous
Hepburn accompagne les idées nouvelles. Même esthétiquement, elle va imposer son style. Hepburn n’est pas une femme des années 30, elle est sportive, énergique. Et à côté de ça, elle a un chien incroyable. Il faut la voir draguer Cary Grant dans “l’Impossible Mr. Bébé” ou Spencer Tracy dans “la Femme de l’année”. En 1967, un an après la chute en désuétude du code, elle tourne dans “Devine qui vient dîner ?” [l’histoire d’une jeune femme blanche qui présente son futur mari noir à ses parents, ndlr]. Aujourd’hui, le film paraît didactique mais il faut le replacer dans son contexte: jusque-là, le code Hays interdisait les mariages interraciaux à l’écran.»
Cinéma - Katharine Hepburn ferme (presque) la porte du grand Hollywood Madame portait la culotte ! La preuve par huit du talent Un fil de fer barbelé fleurissant
Par Luc Honorez
Temps de lecture: 10 min
Cinéma - Katharine Hepburn ferme (presque) la porte du grand Hollywood
Madame portait la culotte
* Katharine Hepburn meurt tranquillement à 96 ans. Elle fut la grande actrice du XXe siècle. * Son amour de l'ombre pour Spencer Tracy fut légendaire.
LUC HONOREZ
La maison du lac a définitivement fermé ses volets. Hank et Katie (Fonda et Hepburn) sont morts, partis voir ailleurs si les canards sauvages de l'au-delà sont aussi beaux que ceux qu'on voyait dans les films hollywoodiens en noir et blanc.
Vingt ans après le décès de Henry « Hank » Fonda, Katharine Hepburn claque la porte de la vie avec sa dignité habituelle.
Elle était la grande, la plus grande dame du ciné américain dont l'époque d'or se réduit à quelques ombres : Kirk Douglas, Widmark, Glenn Ford. Hollywood n'est plus qu'un grand fantôme dont nous dévorons la toile sur la table des DVD.
Katie, de sang écossais, naquit dans le Connecticut. Sa mère se bat pour le vote des femmes et le contrôle des naissances, son père est médecin. La jeune Kate, qui décrochera un diplôme de psychologue, fut élevée dans un milieu présidé par l'intelligence, l'individualité et l'audace.
En 1921, l'adolescente découvre Tom, son frère aîné, l'un des six enfants de la tribu, pendu. Elle domina ce traumatisme émotionnel. Qui allait la poursuivre en durcissant sa personnalité et en l'isolant des mondanités.
À 19 ans, elle va à Baltimore, rencontre Ed H. Knoof, directeur du Stock Theatre, qui trouve gauche sa voix et heurtés ses gestes. Elle le harcèle... Il lui donne un rôle dans « La tsarine » .
Elle se rend à New York pour perfectionner sa diction et entre dans un groupe de jeunes amis comprenant James Stewart et Henry Fonda..
Elle joue quelques pièces, épouse Ludlow Ogden Smith, un aristocrate de Philadelphie. Plus tard, elle reçoit ses premiers rôles à Broadway (« The Animal Kingdom », avec Leslie Howard). Mais sa haute taille fait paraître frêle Leslie Howard, futur Ashley d'« Autant en emporte le vent », et elle est renvoyée.
Un directeur des studios RKO, David O. Selznick, futur concepteur d'« Autant en emporte le vent », est informé de la naissance d'un talent. Il engage Katie pour le film « Héritage » sous la direction de Cukor.
Déjà forte tête, elle réfute les 500 dollars de cachet proposés par Selznick. Mille cinq cents dollars et pas un penny de moins, dit-elle ! Elle les eut.
Est-ce pour cela qu'en 1938, Selznick, préparant « Autant en emporte le vent », refuse que Hepburn incarne Scarlett O'Hara, ce que désire Cukor, l'un des réalisateurs, non crédités, de ce film signé Sam Wood ? Hepburn tenant tête à Clark « Reth Butler » Gable : quel duel au sommet, ç'aurait été !
« Héritage » triomphe. Et la RKO tient une star. À 24 ans, Hepburn reçoit son premier oscar pour le rôle d'Eva Lovelace dans « Morning Glory ». Puis, elle retrouve « son » metteur en scène, l'ami d'une vie, George Cukor qui lui fait tourner, en 1932, « Les quatre filles du docteur March ». Homosexuel, Cukor transférait ses fantasmes féminins sur les comédiennes et les sublimait.
Elle ouvre la palette de tous ses talents dans « Sylvia Scarlett », un chef-d'oeuvre de Cukor : une jeune fille se fait passer pour un garçon et se mêle à une bande de voleurs londoniens. Cary Grant est son partenaire. Sous le rire couve une thèse dans laquelle Cukor défend le droit humain d'être à la fois femelle et mâle.
En 1938, dans « L'impossible M. Bébé », une irrésistible comédie de Howard Hawks, Hepburn et Cary Grant portent le rire et le charisme à incandescence.
A l'époque, on trouve que l'actrice n'est guère belle. Mince, garçonne, elle ne répond pas aux canons de beauté. Aujourd'hui, quand on voit des photos de ce temps-là, Katie est à couper le souffle, élégante, longiligne, accrochant la lumière, tel un cyclone de printemps ! Elle revient au théâtre, en 1939, avec « Philadelphia Story ». Cette pièce transforme sa vie professionnelle. Elle en présente une adaptation cinématographique à la MGM. Et Louis Mayer accepte.
Une actrice qui impose ses goûts : du jamais vu au temps des grands studios ! Cukor réalise « Philadelphia Story » (« Indiscrétions ») qui renoue le duo Hepburn et Cary Grant avec James Stewart en faux timide marivaudant. Si le tandem fonctionna si bien, c'est qu'il donnait l'impression que Cary était la femme et Katie l'homme !
En 1942, « La femme de l'année » fut le premier des neuf films que Spencer Tracy et Katie (« Madame porte la culotte » est le plus célèbre) tournèrent ensemble. Une profonde intimité les unit dès le premier jour. Avant qu'il ne lui soit présenté par le producteur Joë Mankiewicz, Kate objecte que Spencer est petit. Il vous ramènera à votre taille, répond le sarcastique Mankiewicz ! Pour Spencer, Hepburn quittera son amant, le milliardaire Howard Hughes.
Les deux acteurs s'aimèrent pour la vie. Même si Tracy ne divorça jamais de son épouse ! Voyez-vous, pour la plupart des hommes, je suis assommante parce que je suis tant agitée que j'en deviens une peste. Mais Spencer est si viril que pour lui je ne suis plus que sa mouche du coche. Il m'écrase positivement, et cela ne me déplaît pas. Je l'aime tant que, malgré mon foutu caractère, j'ai accepté d'être sa femme de l'ombre. Ce qui ne m'empêche pas de lui faire des scènes. Ce serait trop facile pour lui sinon !, avoue- t-elle.
Quant à Spencer, il confie à Frank Capra, leur directeur de « L'enjeu » (1948) : Katie, ce sac d'os, m'aide à répéter mes rôles. Vous seriez surpris, Frank, de la façon dont elle dit un texte. Elle est folle, mais avec génie. Après le tournage, Capra déclare : Quand Spencer et son « sac d'os » jouent une scène, les caméras, les lumières et les micros, n'existent plus. Je m'assieds, je regarde et je m'émerveille.
Après « Madame porte la culotte », toujours avec Tracy, John Huston l'engage dans « La reine africaine ». Elle y joue une vieille fille qui tombe amoureuse d'un cabochard alcoolique (Bogart).
Lauren Bacall, rejoignant Bogart sur les extérieurs congolais, tombe sous le charme : Dans une robe à 80 dollars que Hepburn traite comme une guenille, personne n'est plus sexy. Elle a les jambes de Dietrich. Et je dénonce comme calomnie la plaisanterie qui consiste à dire que, en lançant un chapeau sur Kate, il s'accrochera où qu'il tombe !
Après « Vacances à Venise » (1955), de David Lean, ses rôles deviennent moins intéressants (« Vodka et jupon », avec Bob Hope). En 1956, elle opère pourtant un retour en force grâce au « Faiseur de pluie », avec Burt Lancaster.
En 1959, elle s'offre un personnage extraordinaire dans « Soudain l'été dernier », de Joë Mankiewicz, avec Liz Taylor et Monty Clift. Elle y tient le rôle d'une mère amoureuse de son défunt fils homosexuel. Son portrait d'une « mante religieuse » croquant ceux qui s'adonnent au sexe est prodigieux.
Elle a 51 ans, Tracy est gravement malade. Spencer, toujours marié à une femme handicapée, entretenant deux ménages, quittant Hepburn pour son autre foyer. Et inversement.
Spencer paye cher son goût pour la boisson. Il avoue : Toujours un petit coup dans le nez, juste assez pour apprécier la vie. En considérant tout ce que j'ai ingurgité, c'est un miracle que je n'aie pas capoté plus tôt. Heureusement, cette vieille Kathie a pris la situation en main. Pour le moment, elle suit un traitement sur elle. S'il ne la tue pas, elle me le fera suivre ensuite ! L'amour entre Spencer et Hepburn était si digne que Hollywood, capitale des racontars, ne se permit jamais aucune rumeur déplaisante sur le couple, malgré leur situation familiale assez extraordinaire pour l'époque...
En 1967, la comédienne décide de tourner ce qu'elle sait être le dernier film de son compagnon, « Devine qui vient dîner ? », de Stanley Kramer. Spencer est mourant. Porté par Hepburn, il réussira une très bonne prestation.
Spencer décédé, Katharine reprend le collier : « Un lion en hiver » (1968), avec Peter O'Toole, et l'exécrable « Folle de Chaillot » (1969). Un peu déçue, elle se console à Broadway avec un grand « musical », « Coco Chanel », qui tint l'affiche pendant plusieurs années.
Katie a toujours une volonté de fer, même si la maladie de Parkinson lui donne un léger tremblement qu'elle ne parvient pas à maîtriser. Mais, jusqu'à ses 90 ans, elle jouera des téléfilms.
En 1974, on la revoit au cinéma dans « Une bible et un fusil », la suite des aventures du shérif True Grit. Elle y découvre John Wayne et lui dit d'emblée : Tu as une grosse tête, un gros nez, une peau sillonnée de rides. Tu es comme moi : une patate séchée ! Mais j'adore m'appuyer sur toi...
Une de ses dernières grandes apparitions - elle continua à faire de la télé - se trouve dans « La maison du lac », oeuvre larmoyante de Mark Rydell, devenue précieuse aujourd'hui parce qu'elle est une sorte de testament de Hepburn et de Fonda.
La philosophie et le talent de cette star, qui apparut, une dernière fois, dans « Love Affair », en 1994, avec Warren Beatty, se résument en une déclaration de la fin de ses jours : Ma mère qui était un ange disait toujours : faites-vous d'abord plaisir à vous-même, ainsi vous serez au moins sûr que quelqu'un sera satisfait. Les femmes qui se sacrifient me rendent mélancolique. Une chose est certaine : que je sois d'humeur affable ou morose, j'ai toujours su apprécier la vie.·
La preuve par huit du talent
En 70 ans de carrière, Katharine Hepburn a épinglé une centaine de scènes d'anthologie. Petit choix.
« L'impossible M. Bébé » (Howard Hawks, 1938). Femme du monde aguichant un scientifique timide (Cary Grant), elle porte une superbe robe à traîne lors d'une réception. Cary marche sur le tissu et l'arrière du vêtement se déchire. Katharine ne s'en rend pas compte et se demande pourquoi Cary - qui veut cacher la culotte de la demoiselle - marche collé contre elle.
« Indiscrétions » (« Philadelphia story », George Cukor, 1940). Voulant saouler son ex-mari (re-Grant) qu'elle aime encore, elle émèche par erreur un prétendant timide (James Stewart) et plonge dans une ivresse qui déchaîne sa libido.
« La reine africaine » (John Huston, 1951). Femme mûrissante, fille de pasteur en Afrique, elle rencontre un marin alcoolique (Humphrey Bogart). Celui-ci la traite de bêcheuse sans grâce, jusqu'à ce que, soudain, elle se décoince, à sa grande surprise.
« Vacances à Venise » (David Lean, 1954). Vieille fille en vacances, elle veut cacher qu'elle est tombée sous le charme d'un bel Italien (Rozzano Brazzi), se lance dans un discours sur l'art, recule et tombe dans un canal.
« Soudain l'été dernier » (Jo Mankiewicz, 1959). Mère possessive, confite dans la morale et pourtant hantée par des fantasmes noirs, elle s'effondre face à un psy (Montgomery Clift) lorsqu'elle doit décrire la mort de son fils, un homosexuel, dont la femme (Liz Taylor) lui servait d'appât pour attirer les jeunes gens.
« Devine qui vient dîner » (Stanley Kramer, 1967). Elle use de circonvolutions verbales pour faire comprendre à son mari (Spencer Tracy) que leur fille va se fiancer avec un Noir (Sidney Poitier).
« Une bible et des fusils » (Stuart Millar, 1975). Une puritaine et un shérif obèse et chenu (John Wayne) s'unissent contre des méchants. Elle frappe John Wayne avec une bible car il jure et boit trop.
« La maison du lac » (Mark Rydell, 1981). Le regard attendri de Katharine Hepburn sur Henry Fonda qui, alors qu'il est réellement mourant, joue son mari qui vient finir ses jours près du lac de leur jeunesse.·
L. H.
Un fil de fer barbelé fleurissant ANALYSE
LUC HONOREZ
Un fil de fer barbelé qui fleurit dès qu'on le bouge ou l'arrose d'une eau de rire... Une voix haut perchée dont elle se servait pour rythmer ses déplacements. Une grâce qui pique dans le drame. Et pic et pic et colégram dans l'humour ! Une cabocharde décidée à mener sa vie en garçon, de se payer une nuit d'amour avec Henry Fonda, Gary Cooper, James Stewart ou Howard Hugues, puis de les virer pour devenir une sublime midinette acceptant d'être la femme de l'ombre d'un homme marié. Refusant de parler de sa vie privée. Mais en nourrissant tous ses rôles.
Katharine Hepburn créa un nouveau jeu dramatique dans le Hollywood des années 30. Face au charisme marmoréen qui était de mise parmi la moitié des acteurs mâles de l'époque, l'autre part jouant la charmante patauderie, elle décida de rejeter la nunucherie, la joliesse et la soumission qui étaient alors de mise chez les comédiennes.
Katharine choisit d'être un point d'exclamation sur l'écran. Ce qui transformait immédiatement Fredric March, Spencer Tracy, Bogart ou Peter O'Toole en points d'interrogation, face à cette fille qui introduisait un brin d'acier dans leurs histoires et féminisait leur machisme. Point d'exclamation contre point d'interrogation : quelles magnifiques alchimie cinématographique et métaphore sur la vie !
Eminemment sexuelle dans ses comédies ou ses films doux-amers sur l'âge qui vient, elle jouait celle dont les faveurs, coupantes mais savoureuses, se méritent, font que le pantouflard doit se changer en chasseur qui ne craint pas les ronces.
A 45 ans, elle eut l'intelligence d'aborder des personnages plus avancés qu'elle dans le temps. De vieilles filles qui n'attendaient qu'un « latin lover » ou un baroudeur africain pour se décoincer. Tirez la chevillette et la bobinette cherra, semblait dire la magnifique chiffonnée à John Wayne, Rozzano Brazzi, Sidney Poitier ou Montgomery Clift.
Jouant toujours, et jusqu'à la fin, sur le fil de la transgression, Katharine Hepburn réussit à l'électrifier et à nous mettre cent mille volts dans le corps. Magie d'éclair d'une actrice qui fut un immense film à elle seule. Et que toute comédienne, en 2003 encore, envie.·
Katharine Hepburn: Le biopic qui s’intéresse à sa part d’ombre
Publié le
Selon la biographie qui sert de trame au film, la star considérait être un homme.
Le mythe d’une Katharine Hepburn éperdument amoureuse de Spencer Tracy a été renversé par William J. Mann dans sa biographie de l’actrice aux quatre Oscars, publiée en 2006. À la lumière de la correspondance de la comédienne et d’entretiens avec ses proches, l’auteur de cet ouvrage en est venu à la conclusion que Katharine Hepburn considérait être un homme, ce qu’elle exprimait notamment au travers de son alter ego, Jimmy. Des producteurs/trices indépendant.e.s s’attellent à un biopic fondé sur cette biographie. « Il ne s’agit pas de la Kate Hepburn de légende, avec ces photos d’elle et Spencer Tracy, mais plutôt de la femme fascinante et complexe qu’elle était en privé, décrit le producteur Richard Akel à Variety. En réalité, elle était beaucoup plus intéressante et finalement bien plus profonde que le mythe qu’elle a créé. »
Le film se penchera sur ses premières années dans l’industrie du cinéma mais aussi sur son adolescence où elle était androgyne. Dans sa biographie, William J. Mann explique ainsi que le père de Katherine Hepburn ne prêtait attention qu’au frère de celle-ci, parce qu’il était un garçon. En quête de reconnaissance, elle a cherché à l’impressionner et ne s’est finalement jamais considérée comme une femme. « “Je suis le chaînon manquant” entre les genres, répétait-elle souvent selon le biographe cité par The Advocate. Elle savait qu’au bout du compte, elle n’était pas une femme comme elle aurait dû l’être. Elle avait le corps d’une femme, mais ressentait dans son cœur et dans son âme qu’elle était un homme. Tout le monde prétend savoir qu’elle était une femme libérée qui se rebellait contre les rôles traditionnels donnés aux femmes, mais je pense que ça allait plus loin. »
Une vision mise en images par la réalisatrice Clare Beavan. Ouvertement lesbienne, affirme AfterEllen, celle-ci a déjà été derrière la caméra pour un documentaire sur Martina Navratilova et un biopic sur l’écrivaine britannique bisexuelle Daphne du Maurier. La relation amoureuse de Kate Hepburn, ou en tout cas amicale, avec Laura Harding sera présente dans ce film qui veut mettre l’accent sur « les sacrifices qu’elle a consentis pour sa carrière ». William J. Mann avait pensé à Ellen Page pour incarner Kate Hepburn dans ce film, mais on ignore si la production l’a approchée. Ce biopic sur l’actrice fera en tout cas de la concurrence à un autre biopic, qui se penche surtout sur la relation qu’elle entretenait avec Spencer Tracy.
À l’instar de William J. Mann, qui n’emploie jamais les termes « trans’ » ou « transgenre » dans sa biographie pour désigner Kate Hepburn au motif qu’ils seraient anachroniques, nous avons fait le choix (peut-être erroné) de conserver le féminin.
«Hollywood, la cité des femmes» est le premier livre à décrire avec précision la trajectoire des femmes qui ont construit le mythe hollywoodien. D’une plume érudite et passionnée, l’auteur évoque plus d’une centaine d’actrices et ouvre sur une nouvelle lecture de l’histoire d’Hollywood, à travers le rôle des femmes.
Description de l'ouvrage :
Elles sont à la fois un reflet et une force agissante des transformations de la société. Hollywood, la cité des femmes sera ainsi le premier livre à décrire avec précision, la trajectoire des stars qui ont construit le mythe hollywoodien, et une invitation à revoir leurs films. Dans ces portraits bio-filmographiques, Antoine Sire remet en perspective l’actrice, la femme et ses combats, en une période charnière pour le cinéma mais aussi pour l’Histoire.
Description de l'ouvrage :
Une présentation d'une centaine d'actrices qui ont construit le mythe hollywoodien pendant l'âge d'or du cinéma.
Sommaire :
1ere partie (chapitre 1 à 3)
-Etoiles de la MGM : Garbo, Harlow, Shearer, Rainer, Loy
-Belles en detresse : Wray, O'Sullivan, Keeler, Blondell, Sidney
-Dans l'Amerique de Frank Capra : Arthur, Stanwick, Colbert
-Entre Comedie et Tragedie : Lombard, Rosalind Russell, Dunne, Goddard
-Le Monde de Bette : Bette Davis, Astor, Hopkins
3eme partie (chapitre 10 à 14)
-Autant en emporte Selznick : V.Leigh, Jones, Le Chemin de croix des Femmes Noires d'Hollywood (Hattie McDaniel, Nina Mae McKinney, Louise Beavers, Ethel Waters, Lena Horne, Dorothy Dandridge)
-Des britanniques à Hollywood (et quelques françaises) : Garson, Kerr, Simmons, O'Hara, actrices françaises (Simon, Darrieux, Morgan, Presle, Calvet, Darcel, Maurey et Caron)
-Actrices de caractere : Crosman, Moorehead, Judith Anderson, La Revolution des grands meres (Dame May Whitty, Ouspenskaya, Barrymore, Ritter)
-Danseuses magiques : Rogers, Hayworth, Grable, Charysse, Reines du divertissement (Esther Williams, Henie, Merman, Sothern, Allyson, Grayson, Jane Powell, Eleanor Powell, Ann Miller, Miranda)
-Deux rebelles à Hollywood : De Havilland, Bergman
4eme partie (chapitre 15 à 17)
-Films noirs et dames de pique : Bacall, Turner, Tierney, Joan Bennett, Lake, Trevor, Winters, Entre classiques et cinema bis (Lizabeth Scott, Grahame, Totter, Windsor, Sterling, Greer, Fleming, Dahl, Raines, Geraldine Fitzgerald, Hagen, O'Donnell, Foch, Cummins, Keyes, Domergue, Day, Alexis Smith, Kirk, Roman, Cleo Moore, Beverly Michaels)